Qui a cassé Florence ?

par olivier cabanel
mercredi 16 février 2011

Nicolas Sarközy vient de se dresser sur ses petits ergots en menaçant le Mexique.

Mal lui en a pris, le Mexique vient de lui faire savoir que, devant l’ingérence française sur la justice mexicaine, il ne participerait plus à « l’année du Mexique » manifestation prestigieuse prévue le 15 mars 2011 en France.

Bref historique de l’affaire Cassez  : le 9 septembre 2005, la police met en scène l’arrestation de Florence dans le ranch d’Israël Vallarta, faisant passer son arrestation pour un flagrant délit, ce que Genaro Garcia Luna, directeur de l’AFI (agence fédérale d’investigation mexicaine) reconnait, avouant qu’il s’agissait d’une « reconstitution demandée par les médias et que cet élément ne serait pas pris en compte lors du procès de l’intéressée ». lien

Ce Génaro Garcia Luna est depuis devenu le tout puissant « secrétaire de la sécurité publique ».

Mais au-delà de la difficulté à comprendre ce qui est réellement reproché à Florence Cassez, et de démêler le fabriqué de l’authentique, c’est le rapport étrange qu’entretient la France et le Mexique qui peut intriguer.

Florence Cassez avait donc logiquement demandé une révision de son procès, déclenchant la confirmation de la sentence : 60 ans de prison et provoquant un émoi justifié dans le camp français.

MAM avait tiré la première, tentant peut-être de faire oublier ses impairs tunisiens, en déclarant :

« Je suis consternée par la décision du tribunal de cassation (…) c’est un déni de justice ». lien

Venant d’une ministre dont l’image s’est singulièrement dégradée depuis quelques temps, elle n’était peut être pas la mieux placée pour faire de telles déclarations, elle qui, après avoir accepté les largesses de l’ex-dictateur Ben Ali, se trouve de nouveau, par parents interposés, impliquée dans une affaire immobilière tunisienne. lien

Elle  avait auparavant tenté d’étouffer l’affaire des « bornes internet », en intervenant « discrètement » auprès de la ministre de la justice. lien

Après MAM, le Chef de l’Etat entre dans la danse.

Devant le flop de sa conférence de presse, et suite à sa gaffe face aux magistrats, qu’il montre à tort du doigt, on pourrait penser qu’il tente à nouveau de redorer son blason à bon compte.

Il aurait peut-être dû consulter des professionnels de la diplomatie, avant de décider que « l’année du Mexique  » serait maintenue en France, mais qu’elle serait dédiée à Florence Cassez. lien

N’importe quel analyste politique aurait tiré les conséquences d’une telle décision.

Devant un tel camouflet, le Mexique n’avait d’autre alternative que de décider de ne plus participer à cette « année du Mexique »

Il y avait pourtant d’autres solutions.

Car plutôt que de s’engager sur le terrain glissant choisi, Sarközy aurait pu s’aventurer sur le terrain économique.

En effet, le Mexique et la France font de juteux échanges dans le monde des affaires.

Le Mexique est le deuxième partenaire commercial de la France en Amérique latine, et d’après le « petit journal » les échanges commerciaux entre les deux nations ont augmenté de quasiment 126% depuis 2000.

En 2010, les exportations mexicaines ont atteint 535 millions de dollars, soit une augmentation de 21,6% par an.

Ajoutons que les entreprises françaises entretiennent avec leurs partenaires mexicains de très profitables relations puisque les exportations françaises ont atteint 2741 milliards de dollars, soit une augmentation de 19,2%. lien

Devant ce rapport de force à l’avantage de la France, les entreprises françaises décidant de ne plus proposer au Mexique tout ce qu’elle lui vend, on peut imaginer que celui-ci aurait agi avec moins de légèreté dans l’affaire Florence Cassez.

Alors quel poids pouvait avoir la déclaration sarkozyste de maintenir « l’année du Mexique », en la dédiant à Florence Cassez ?

Ça ne pouvait déboucher que sur un geste de colère mexicain, coupant d’avance toute solution diplomatique.

Sarkozy aurait voulu faire échouer d’avance toute négociation qu’il ne s’y serait pas pris autrement.

S’agit-il surtout de pouvoir continuer à commercer tranquillement avec le Mexique ?

D’autant que les français n’ont pas pu oublier un épisode cocasse de la grippe H1N1.

En effet, juste avant que la ministre de la santé, la « blanche » Roselyne, ne tente de provoquer la panique avec sa pandémie bidon, on aura noté la création d’une « usine à vaccin » au Mexique justement.

Le 9 mars 2009, Sanofi-Aventis a investi 100 millions € dans une « usine à vaccins » à Ocoyoacac, au Mexique, « dans l’éventualité où une pandémie de grippe humaine vienne à être déclarée  », et Sarkozy en personne a tenu à être présent, aux cotés du président Calderon, lors de l’inauguration de la dite usine. lien

Quelques mois après, la pandémie était comme par hasard déclarée par l’OMS, dont par la suite on s’est inquiété des conflits d’intérêts possibles entre les labos et cette organisation déclarée « indépendante ».

De plus, d’après le site « pharmacritique  », des liens évidents apparaissent entre François Sarkozy, frère du chef de l’état, patron de «  LongeviTV », et Sanofi-Aventis, dont l’un des financeurs-sponsors est justement cette entreprise.

La France aura gaspillé à cette occasion plus de 2 milliards €, et Sanofi-Aventis aura engrangé 7,2 milliards € de profits en 2009. lien

On pourrait ajouter, pour compléter le tableau, l’invitation faite par Calderon, à Sarkozy, suite à l’inauguration de « l’usine a vaccin » mexicaine, à passer quelques jours de vacances dans une luxueuse villa, avec un groupe d’entrepreneurs mexicains, dont Roberto Hernandez Ramirez, banquier, accusé par des médias mexicains et américains d’être lié au narcotrafic.

Ce que Sarkozy a démenti, mais qui a été confirmé par « Rue 89  ». lien

A l’époque, Florence Cassez était déjà emprisonnée au Mexique, et on se demande pourquoi, à l’époque, le Chef de l’Etat Français n’aurait-il pas plaidé la cause de notre concitoyenne enfermée ?

Il ne pouvait trouver meilleure occasion.

D’autant qu’il a même eu l’occasion de diner en tête à tête avec le président mexicain le 8 mars 2009.

Ce cadeau fait à notre président a été estimé à 50 000 euros d’après « Médiapart ». lien

Lorsqu’un chef de l’état est si bienveillant avec un autre, comment n’aurait-il pas accepté un geste supplémentaire, en acceptant que Florence Cassez soit transférée en France pour y être jugée ?

Tout cela ne sent pas très bon.

Mais comme dit mon vieil ami africain :

« Les hommes sont comme les brosses à dents, sans le manche, ils ne servent à rien »

 L’image illustrant l’article provient de « jmayrault.fr »

 


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