Soupirants au Trône d’Assad & Militarisation du Levant

par Narcisse Jean Alcide Nana
mercredi 18 septembre 2013

Les lendemains de Printemps Arabe ont livré un double verdict sans sans appel. D’abord, les maîtres-récits du panarabisme ont tracé de grands sentiers qui ne menaient nulle part. Damas, foyer incandescent du panarabisme s’est révélée tombeau du flambeau qu’elle entendait porter haut. Dans les salles de travail de Damas et du Caire, l’islam politique à l’eau de rose panarabiste a avorté d’un mort-né. Ensuite, on convient aujourd’hui qu’aussi bien le chiffre des 80.000 victimes de la guerre Syrienne que la parenthèse sanglante de Tahir-Square ont outrepassé les revendications fondées pour des réformes sociales ou le simple rattrapage d’un changement de régime. En guise de bouquet final au Printemps Arabe, une messe de requiem aux successions monarchiques. La roue tournante des monarchies bicyclettes s’est irrémédiablement rompue à coup de contre-résistances aux troux d’air des aspirations démocratiques dans le Levant. La période post-Printemps Arabe a vu naître, non seulement une militarsiation accrue du Levant, mais aussi un péril dans le tournant post-Assad. La Syrie est devenue le nouveau Vietnam du Levant. Elle passe désormais pour le centre de gravité du terrorisme international.

En transformant le Moyen-Orient en un champ de marathon diplomatique, l’axe Moscou-Damas-Paris-Washington a mit à nu les enjeux d’une reconfiguration de géopolitique du Levant. Le clash des soupirants au trône d’Assad a atteint son point culminant. Pour preuve, en trois ans de conflit Syrien, la hantise d’une hégémonie Sunnite de la Syrie a mit en posture avant-gardiste la survie du Hezbollah-Hamas et de l’Iran. Moscou n’entend pas renoncer à jouer du violon en Méditerranée. La Russie ne concedera pas sa base navale de Tartous et ses dividendes commerciales à la kyrielle d’acteurs transnationaux dans la région.

Autant dire que le contrôle du Levant passera nécessairement par une main haute sur Damas. D’où la rébellion Syrienne résonne au delà de ses propres frontières.Les marchants d’armes Russes ont élu en Damas une clientèle assurée. Selon le Stockholm International Research Institute, les importations d’armes Syriennes ont connu une augmentation de 600% entre 2007 et 2011. Comme fournisseur principal du marché d’armes Syrien, la Russie couvre près de 72% de la demande Syrienne. Assad a déjà payé cash la facture de près de $ 1 milliard de dollar de contrat pour la livraison de 4 systèmes de missiles sol-air S-300. Damas a aussi payé $ 550 millions pour la commande de 36 jets Yak-130 d’entraînement. Depuis 2009, la Russie a investi plus de $ 20 milliards de dollars en Syrie. Dans l’industrie de l’énergie Syrienne, les compagnies Russes Stroitransgaz et Tatneft sont des partenaires majeurs de la Syrie.

Le Qatar a financé la rébellion Syrienne à hauteur de $ 1-3 milliard de dollars d’aide. En 2011, la Syrie a fait l’annonce d’une découverte de champs gigantesques de pétrole dans la cité de Homs. Les premiers puits de pétrole de Homs pourraient produire 400.000 mètres cub de pétrole par jour. La route stratégique du pétrole dans le Levant ne pouvait laisser indifférents des pétro-monarchies comme le Qatar et l’Arabie-Saoudite. Des éléments concordans laissent croire que les militants djihadistes de Jabhat al-Nusra, soutenus par l’Arabie Saoudite, furent les architectes de l’offensive à Aleppo, Deir al-Zor, Idlib et Hama ainsi que dans les périphéries de Damas.Ce groupe revendique plus de 70 attentats terroristes en Syrie depuis le début du conflit. Le ministère Russe des Affaires Etrangères signale qu’il existerait au moins entre 600 et 6000 militants islamiques rebelles Chechenes du Caucase combattant en Syrie. Les cellules rebelles peuvent déclencher souvent des combats simultanés dans près de 100 localités à la fois. Ce qui a poussé les forces de défenses Syriennes à une totale refondation tactique.

Le Levant s’est ainsi transformé en un volcan en ébullion. La Jordanie en état d’alerte. Elle positionne ses batteries de missiles Patriotes pour dissuader d’éventuelles attaques de son territoire par la coalition Syrienne. Ankara est devenue une puissance de feu aux portes du Levant.

Le marathon dans la ligne d’arrivée post-Assad ouvrirait la boîte de pandore d’une Syrie transformée en un haut laboratoire d’anarchie sous la coupes de djihadistes acéphales. Autant Washington s’est illustrée experte inégalée comme bulldozzer raplatissant en cendres les régimes tyraniques, autant elle n’a jamais fait la preuve de sa volonté de reconstruction des nations après crise. L’Afghanistan, l’Irak, le Yemen et la Libye sont encore un champ expérimental d’ébullisions de violence et d’anarchie. Le trône tant convoité d’Assad ne devrait pourtant pas occulter l’indispensable sécurité du peuple Syrien. 
 

Narcisse Jean Alcide Nana,

International Security Studies


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