Un rapport des Nations Unies sur Gaza

par Leila
mercredi 25 mars 2009

Le bureau de coordination des affaires humanitaires des Nations Unies (UNDP) a publié les résultats d’une enquête effectuée dans la Bande de Gaza entre le 25 janvier et le 1er février 2009. On trouvera ici une mise à jour pour la semaine du 10 au 16 mars. Le blocus de Gaza continue comme avant.

FIELD UPDATE ON GAZA FROM THE HUMANITARIAN COORDINATOR

Panorama de la situation


Le blocus de la Bande de Gaza est maintenu tandis que des militants palestiniens continuent de tirer sur Israël des roquettes artisanales et que l’armée israélienne poursuit ses raids aériens. Les tunnels à la frontière égyptienne, seule voie de passage pour les produits de base qui n’ont pas le droit de franchir les points de passage officiels, et qui, selon les autorités israéliennes, servent à la contrebande d’armes, ont été attaqués par l’aviation. Leur destruction a provoqué une diminution de la quantité totale des denrées qui arrivent à Gaza. Depuis le cessez-le-feu, des affrontements violents entre les forces israéliennes et des militants de la Bande de Gaza ont fait six morts palestiniens, dont un enfant.

Le niveau général de l’aide humanitaire qui est autorisée à pénétrer à Gaza reste en dessous des besoins les plus urgents. Les partenaires de l’aide humanitaire font constamment des appels pour que l’accès à Gaza des biens et des personnes soit facilité. Un document de l’équipe locale de l’OCHA intitulé "Cadre pour la fourniture d’une assistance humanitaire à Gaza", a pour but de fixer un ensemble de "normes minimales" pour l’accès des biens et des personnes.

Attitudes et perceptions des résidents à la suite des opérations militaires israéliennes

Enquête effectuée par échantillonnage auprès de 1.815 ménages

65% des Gazaouis vivent en dessous du seuil de pauvreté et 37% vivent dans une extrême pauvreté ;

66% des chômeurs sont dans un état d’extrême pauvreté ; il y en avait 56% avant le récent conflit ;

Plus d’un million de personnes sur 1,4 million d’habitants, soit 75% de la population de Gaza, se sentent en insécurité pour l’une des trois raisons suivantes : le conflit israélo-palestinien (42%) ; le contrôle israélien aux frontières (27%) qui empêche les mouvements des personnes et des biens ; et la tension inter palestinienne ;

La plupart des ménages de la Bande de Gaza souffrent du manque d’argent et d’un accès limité à des choses fondamentales telles que les vivres, l’eau, l’électricité, les sanitaires, mais leur besoin le plus grand est actuellement la sécurité personnelle ;

Près de 40% des ménages que nous avons interrogés ont été déplacés à la suite des opérations militaires israéliennes ;

25% des ménages de Gaza pensent qu’un soutien psychologique et social est la chose dont ils auraient le plus besoin, et 49% considèrent que c’est actuellement, et de loin, la chose la plus importante pour les enfants.

Importation de denrées


Cette semaine, 671 camions de marchandises dont 121 provenaient d’organisations humanitaires (18%) ont été autorisés à entrer à Gaza, contre 1.080 la semaine dernière. Ceci représente une moyenne de 122 camions de marchandises par jour ouvrable, contre 246 pendant la troisième semaine de juillet 2008. Les denrées importées comprenaient : des vivres (520 camions, 68%), des fournitures médicales (16 camions, 2%), des produits d’hygiène et de nettoyage, se limitant à de l’eau de javel, du papier hygiénique, des couches pour bébé (84 camions, 11%) et des biens tels que des couvertures, des matelas et, pour la première fois depuis octobre 2008, des vêtements (33 camions, 4%). 14 camions contenant des fournitures de papeterie pour l’éducation et 4 camions chargés de produits agricoles (des œufs fécondés) ont été autorisés à entrer.

Quant au bétail, aux appareils électriques, aux véhicules de transport, aux emballages et aux matériaux de construction, rien n’a eu le droit d’entrer. Les articles interdits par les autorités israéliennes la semaine dernière comportaient de la confiture, des biscuits et de la purée de tomates. Ces produits se trouvaient dans une cargaison comportant 498 colis de USAID et 2.488 colis de World Vision qui ont été bloqués à un poste frontière. Selon le COGAT (Coordinator of Government Activities in the Territories, organe israélien de coordination), tous les colis contenant des denrées alimentaires telles que le thé, les biscuits et les dattes continueront d’être bloqués.

Carburants


Pas une goutte de pétrole n’a pu entrer à Gaza via Israël la semaine dernière. Toutefois, l’association des propriétaires de stations-service a fait savoir que le volume de carburant transféré par les tunnels à la frontière égyptienne a augmenté, passant à près de 50.000 litres de diesel et 30.000 litres de pétrole par jour. Depuis la semaine dernière, le diesel est un peu plus disponible sur le marché tandis que le pétrole est toujours rare. Les prix du pétrole et du diesel ont diminué cette semaine, passant respectivement de 8 et 5 shekels à 5 et 3 shekels le litre. (Le change est actuellement de 5,5 Shekels pour 1 €)


Un total de 675 tonnes de gaz pour la cuisine a été autorisé cette semaine, contre 420 tonnes la semaine dernière, ce qui représente 39% des besoins estimés. Pour les centrales électriques, deux millions de litres de gaz industriel ont été autorisés au total, ce qui représente 71% des besoins hebdomadaires selon les responsables palestiniens de l’énergie.

État des points de passage

Le point de passage de Sufa est resté fermé. Toutefois, le COGAT a informé l’OCHA que Surfa n’est plus désormais un point de passage entre Gaza et Israël.

Le point de passage de Karni est resté fermé. Le convoyeur à bande de céréales de Karni est resté opérationnel deux jours. Le couloir pour transporter le ciment (ouvert jusqu’au 29 octobre 2008) reste complètement fermé.

Les pipelines de Nahal Oz ont été ouverts pendant cinq jours. Le COGAT a informé l’OCHA que le nombre de jours ouvrables est passé à cinq jours par semaine (du dimanche au jeudi).

Le point de passage de Kerem Shalom a été ouvert partiellement pendant cette période.

Le point de passage de Rafah reste totalement interdit aux camions.

Déplacements du personnel humanitaire

Les déplacements du personnel des Nations Unies à l’intérieur de la Bande de Gaza et vers l’extérieur dépendent, entre autres facteurs, de la disponibilité des véhicules blindés, dont le nombre est sévèrement restreint. Actuellement, 17 véhicules attendent toujours l’autorisation d’entrée des autorités israéliennes, dont les procédures sont toujours très longues, ce qui entrave considérablement l’action humanitaire.

Beaucoup d’organisations humanitaires présentes à Gaza ont dû se faire habiliter par le Hamas, en plus de l’habilitation qu’ils ont déjà obtenue de l’autorité palestinienne à Ramallah.L’association des Agences Internationales pour le Développement (AIDA) mène actuellement une enquête sur l’accès des ONGs à Gaza.

Logistique

Le groupe logistique continue de plaider pour que la fourniture de biens humanitaires à Gaza soit augmentée. Il a demandé au COGAT l’autorisation de transporter des articles de papeterie de l’UNICEF, des kits d’éducation pour les jeunes enfants, des jouets, du matériel médical envoyé de Grande-Bretagne, des fournitures vétérinaires et 704 sacs de poudre à laver envoyés par World Vision.

Le groupe logistique a présenté aux autorités israéliennes un grand nombre de propositions, notamment le droit d’utiliser des gaines maritimes pour le transport de marchandises humanitaires, avec le retour des gaines vides, et celui de mettre des palettes sur des camions pour installer l’éclairage au point de passage de Karem Shalom, côté Gaza, afin de permettre de travailler la nuit.

Le groupe logistique tient constamment à jour la liste de ses propositions aux autorités israéliennes et des réponses qui lui sont données.

Protection civile

Il est urgent de revoir les procédures faites pour que des enfants reçoivent un traitement médical à l’extérieur de la Bande de Gaza, car les mécanismes de contrôle sont inadéquats, particulièrement pour les enfants non accompagnés. Un autre sujet de préoccupation est celui des prétendues disparitions d’enfants. Quand la base de données des victimes de la guerre sera définitivement établie, il faudra préciser le nombre de morts par rapport au nombre de personnes disparues. De plus, le groupe protection a constaté que des retards interminables dans les procédures judiciaires concernant l’héritage des personnes tuées pendant la guerre contribuent à détériorer encore davantage la situation économique de leurs familles.

Électricité


Près de 90% de la population de la Bande Gaza souffre de coupures d’électricité intermittentes de quatre à cinq heures par jour. Le 15 mars, la Compagnie électrique de Gaza faisait état d’un déficit d’énergie de 19%. Le lendemain, un problème technique a provoqué l’arrêt d’une turbine dans la centrale électrique. Gaza City et la région centre ont été les plus touchées, avec des coupures de courant de 8 à 12 heures. La turbine est en réparation, mais les ingénieurs pensent qu’une telle panne pourrait être évitée si des pièces de rechange étaient disponibles.

Première récupération

À la suite de la publication du plan palestinien de reconstruction de Gaza pour 2009/2010 (Palestinian National Early Recovery and Reconstruction Plan), quatre groupes ont été instaurés sous l’égide du groupe de première récupération (gouvernance, ménages, utilitaires et environnement). L’objectif est d’attribuer des priorités entre les régions pour la première récupération et les efforts de reconstruction, à mesure que les accès s’améliorent.

Eau et voirie

Environ 50.000 personnes n’ont toujours pas accès au réseau d’eau potable, tandis que 100.000 autres subissent des coupures intermittentes. Les associations ACF, CARE, Oxfam et PHG continuent de livrer de l’eau par camions-citernes aux ménages concernés. Le manque de matériaux et d’équipements pour le nettoyage et la voirie continue d’entraver les efforts de réparation et de réhabilitation. Lors d’un récent échantillonnage en février, on a comparé les données concernant les cas de diarrhée chez les enfants de moins de trois ans venus en consultation à l’UNRWA (Bureau de secours des Nations Unies) avec celles des semaines correspondantes de l’année dernière. On a constaté une augmentation de la maladie de 18%. Elle est due probablement à la détérioration du réseau d’eau potable au cours de la guerre.

Éducation

Le besoin d’un soutien psychologique et social pour les enfants scolarisés et leurs professeurs a conduit à la formation d’un groupe animé par le forum Sharek Youth qui rassemble une dizaine d’organisations, parmi lesquelles des universités de Gaza. Une formation pour les enseignants des 354 écoles de Gaza et les conseillers des ONGs est en préparation.

La pénurie de biens à Gaza reste un obstacle majeur à de nombreuses interventions destinées à l’éducation, depuis la restauration des locaux scolaires jusqu’à la fourniture du matériel nécessaire aux professeurs et aux conseillers.

Sécurité alimentaire, agriculture


La disponibilité de la plupart des aliments de base est à un niveau acceptable, pour les produits frais comme pour les produits secs, mais la situation est très instable. Des problèmes subsistent pour certains articles. Le poulet, la viande, les produits de nettoyage et le gaz pour la cuisine sont en rupture de stock depuis le 10 mars.

La pénurie de nourriture animale et de gaz a contribué à faire augmenter le prix du poulet ce mois-ci de 12 à 17 shekels le kg.

En mars, le stock total de farine de blé dans les minoteries de Gaza est de 11 millions de tonnes, ce qui est suffisant pour couvrir les besoins de la population pendant 24 jours (soit jusqu’au 3 avril).

Le bureau de la porte-parole de l’armée israélienne a fait savoir le 11 mars qu’Israël avait pris la décision de réduire la zone de pêche à trois miles nautiques de la côte. Depuis 2002, la zone de pêche avait été réduite à 8 miles nautiques, en dépit de la distance de 20 miles nautiques que le gouvernement israélien avait acceptée lors des accords d’Oslo, et de la distance de 12 miles qu’il avait acceptée un peu plus tard. La limitation de la zone de pêche est une menace pour les 3.000 familles dont la pêche est la seule source de revenus.

De sévères restrictions sur les produits entrants agricoles continuent de retarder la récupération et les efforts de réhabilitation des terrains, des serres, des pépinières, des routes, des puits et des réseaux d’irrigation. L’interdiction d’importer des animaux vivants oblige les cultivateurs à faire des efforts d’élevage avec le cheptel existant et rend inabordable le prix de la viande, que ce soit du bœuf, du mouton ou du poulet, pour la majorité des consommateurs.

Ce rapport est disponible en anglais sur le site de Free Gaza

Traduction LF



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