Vers le début de la fin pour l’Etat Islamique ?

par bruno
mardi 26 janvier 2016

Les américains et les turcs ont-ils décidé d'en finir avec l'EI et de renforcer les groupes rebelles syriens ? Le président Biden, en visite à Istanbul, vient de proposer d'augmenter le soutien aux groupes combattants sunnites et de lancer une opération militaire contre Daesh si aucune solution politique n'est trouvée pour résoudre le problème. Ceci au moment où l'armée régulière syrienne appuyée par les russes gagne du terrain. La ville stratégique de Sama est tombée aux mains du gouvernement de Damas, coupant les routes d'approvisionnement rebelles vers les provinces d'Idlib, Hama et Lattaquié.

Les turcs auraient envahi la ville frontière syrienne de Jarablus le 19 janvier. C'est par cette zone que transitent les volontaires djihadistes. Jarablus est contrôlée par l'EI qui aurait laissé l'armée turque débarquer sans coup férir. Cette invasion serait-elle les prémices de la formation de la zone tampon turque le long de la frontière ? Aucun grand média occidental n'a confirmé l'information. Si elle est vraie, c'est un tournant important de la guerre. On peut se demander ce que vont faire les Russes. Selon cet article, les russes, les américains et les turcs se coordonneraient pour éviter tout incident lié à cette invasion. Les russes auraient accepté l'entrée des turcs à condition que leur zone tampon n'aille pas jusqu'à la méditerranée. Pourtant, beaucoup d'observateurs pensaient que les russes, pour faire payer aux turcs l'attaque du Sukhoi, auraient favorisé la jonction des forces kurdes à la frontière turque. Si les turcs occupent Jarablus, cette jonction sera plus difficile. Parmi les résultats de la visite de Biden en Turquie, une promesse : Les américains vont fournir de l'aide technique pour sécuriser la frontière.

On peut se demander pourquoi cette action n'a pas été effectuée plus tôt par les turcs et encouragée par les américains : Cette zone est la seule voie de communication de l'EI avec un pays tiers. Si les turcs avaient vraiment voulu lutter contre l'EI, ils auraient fermé leur frontière depuis très longtemps. Cette attitude alimente les soupçons de duplicité à l'égard de l'EI. Les djihadistes vont être affaiblis s'ils ne peuvent plus utiliser cette route pour recruter de nouveaux membres et trafiquer avec la Turquie. Durant cette visite, la Turquie a aussi suggéré que les Etats-Unis et elle s'accordent sur les groupes acceptés à la conférence de paix de Genève. Connaissant le tropisme turc pour les groupes islamistes syriens, il est possible que les turcs utilisent les américains pour faire accepter des rebelles fondamentalistes à la tables des négociations.

Mon hypothèse est la suivante : les turcs lâchent l'EI en fermant leur frontière. Le soutien passif à l'EI est actuellement trop coûteux politiquement. En échange, ils veulent un soutien accru à leur propres groupes rebelles en Syrie ( Jaish-al-Islam est fondamentaliste et a une légère tendance à combattre avec le Front al Nosra et Ahrar ash-Sham) pour ne pas laisser Assad reconquérir trop de territoire Syrien et ainsi peser sur l'après-guerre. Cela devient urgent puisque comme mentionné plus bas, les américains abandonneraient la Syrie à la Russie.

De plus, les américains bâtiraient une base aérienne en territoire kurde syrien. Près d'une base russe en préparation. Et près des puits de pétrole contrôlés par les forces kurdes de la région.

En décembre, nous écrivions qu'Erdogan allait retirer ses forces d'Irak sous la pression de Washington. Des troupes ont été retirées, leur nombre précis restant inconnu, mais un contingent turc continue de défier la souveraineté irakienne. Selon le blog Moon of Alabama, ce revirement serait possible en raison de la perte d'influence iranienne sur le gouvernement irakien. Les américains laissent les turcs s'installer en Irak pour signifier aux Irakiens qui sont les patrons : Vous refusez nos bases mais nous sommes les seuls à pouvoir faire partir les turcs et empêcher l'indépendance kurdes. Les américains contrôlent le nouveau premier ministre Al-Abadi, contrairement au précédent, Al-Maliki plus proche de l'Iran. Ils reconnaissent l'influence russe en Syrie mais ne laisseront pas les russes intervenir en Irak, une intervention réclamée par les iraniens et les irakiens pour lutter contre l'EI. Les américains ont réduit l'influence iranienne en chassant Al-Maliki du pouvoir en Irak. Mais les Irakiens sont prêts à utiliser la force pour faire partir les turcs. Le jeu américain risque de se retourner contre eux et de provoquer une guerre entre l'Irak et la Turquie. Décidément, apporter la démocratie en Irak, c'est plus compliqué que prévu...


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