Crash A 330 : L’indécence des médias

par actu
mardi 2 juin 2009

Disparition de l’avion d’Air France

 Hier, le 1er juin 2009 disparaissait un avion d’Air FranceLa dépêche AFP était courte : « Air France précise que le vol AF 447, qui avait quitté Rio lundi 19h locale devait atterrir ce lundi à 11h15 à Roissy CDG, avait à son bord 216 passagers et 12 membres d’équipage. On est sans nouvelles de ce vol depuis 4h20 lundi matin ».

Pourtant, les journalistes depuis lundi triomphent. Triomphent dans leur activité favorite : Deviner des informations à partir de rien, et capter le spectateur en proposant la pire des catastrophes à imaginer. 
Comment faire de l’info sans info ? Avec un avion qui se crashe : même sans avion, même sans crash. Mais rien ne les arrête, c’est du pain béni pour ces médias avides d’images sensationnalistes.

En effet, les différentes chaînes d’informations prennent la chose au sérieux. BFM TV installe un direct censé suivre les moindres évolutions de l’affaire. Mais comme il n’y a pas d’évolution, on propose des images de décollages d’avions, on interroge le directeur du musée de l’aviation (Oui, tous les autres invités experts étaient déjà pris sur les autres chaînes). Les premiers mots des reporters sur I télé, TF1 ne varient pas : « Écoutez nous ne savons toujours presque rien pour le moment »…  

Ils n’ont pourtant pas pensé qu’il était préférable de se taire. Les journalistes vont donc combler le rien avec le tout. C’est à dire avec le président. « Le président a déclaré que toutes les administrations devaient faire le nécessaire pour retrouver l’avion et d’éventuels survivants ». Oui ! c’est important de le préciser, c’est une information capitale. Certains à l’esprit mal placé auraient pu croire que le président avait demandé de ne rien faire. 

Une imagination sans limite.

Dans l’après-midi, les médias n’ont plus grand chose à dire pour attirer l’attention. La liste des passagers étant répétée sans cesse et le fait que personne ne sache rien, aussi. Ils ont donc trouvé le moyen d’exposer quelques familles qui « auraient dû prendre ce vol » mais qui « par chance ne l’ont pas pris ». Vous pouvez également retrouver un témoignage dans les colonnes du parisien, de plusieurs passagers ayant échappé au destin tragique. Comme un analyste financier au passeport périmé qui n’a pas pu prendre l’A 330. 
Tandis que la couverture de tous les journaux (Ouest France, le Parisien, Nice matin…) exhibe les familles en pleurs dans l’attente d’une information ( eux attendent une vraie information). 

On est donc au summum de l’indécence.  

Où est l’information ?

Montrer des gens qui ont eu de la chance, essayer des faire des hypothèses, appeler les experts, les physiciens pour parler de l’orage, les ingénieurs pour parler des avions. En réalité, la pire des choses pour un journaliste, c’est d’avoir une information à dire, sans faits concrets à l’appui. Alors, lorsque ce fléau les touche, ils sont capables de tout et même de raconter n’importe quoi.

Le début de la contre information.

Les différentes radios s’arrachent les experts restant, Bourdin sur BFM précise qu’il faut être prudent car « l’on ne sait rien », mais enchaîne, comme tous les autres, sur les circonstances éventuelles de l’accident. Toutes les radios ont également le même Leitmotiv : « Pensez-vous que cela puisse être un attentat ? ». Oui, une belle explosion, quoi de mieux pour les journalistes ?

Mais c’est sur RTL que débutait la contre information, lorsqu’un personnel de l’aviation prétend que l’avion était trop loin des côtes pour pouvoir lancer un signal de détresse. Alors qu’au même moment sur RFM, le directeur de l’aviation civil déclarait qu’ils auraient pu à n’importe quel moment lancer un signal.

Les journalistes n’ont donc peur de rien. Imaginer le pire des accidents. Et le raconter de façon sordide dans les médias, en ignorant le mal que cela peut faire. Depuis la disparition de l’avion, nous assistons à tout sauf à l’essence même du journalisme : relater l’informationMais, ce n’est que le début. Il ne faut pas être grand mage pour savoir que dès que l’avion sera retrouvé, les photos des familles désespérées, les photos des débris, et peut-être même des corps seront exposées à tous. Pour l’intérêt de… de personne. Et cela, en oubliant de respecter la profession, à courir derrière le scoop et à étaler impunément l’horreur. Mais aussi en oubliant de respecter les familles, qui n’ont sûrement pas besoin de cela.

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D.Perrotin


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