Encore un petit journal militant « censuré »

par JL ML
jeudi 12 avril 2007

Après « Nexus », « Pratiques de Santé », « Info Traitements », un petit journal « différent », « Morphéus », se voit à son tour retirer son numéro par la Commission paritaire des publications et agences de presse (CPPAP), dans l’indifférence des grands médias.

Les thèmes abordés par Morphéus ne sont sans doute pas “politiquement corrects”. Il suffit de consulter les “unes” des différents numéros pour s’en convaincre. De même, il est petit : tirage à trois mille exemplaires avec mille deux cents abonnés au site Web (www.morpheus.fr).

Sont-ce des raisons pour tenter de le bâillonner ?

En effet, la CPPAP vient de lui retirer son agrément lui barrant ainsi la route aux aides dont bénéficie la presse en général. Une sorte de censure indirecte (d’où les guillemets dans le titre autour du mot censure).

« Cela implique pour nous, commente Frédéric Morin, le responsable du magazine, une explosion de la TVA qui passe de 2,1% à 19,6% soit un cinquième du chiffre d’affaires et un coût postal multiplié par trois. Ces dispositions iniques détruisent l’émergence d’une presse libre en France. La Commission paritaire, dont la fonction initiale était de protéger la pluralité et la liberté de la presse, devient le bras armé d’une oligarchie financière de la pensée unique. D’ailleurs cette même presse garde le silence concernant cette entreprise de destruction globale de la presse indépendante montante. L’objectif affiché des services du Premier ministre (dont dépend la CPPAP) est évidemment de réduire les coûts d’aide à la presse. Cependant ces dispositions n’auront comme résultat que de stériliser toute la petite presse montante, laissant aux grands groupes, ceux qui ont de l’argent, le monopole concerté de l’information ou plus précisément de la non-information. »

On ne prête qu’aux riches...

La CPPAP réunit le pouvoir politique et le pouvoir patronal de presse, à l’exclusion des journalistes et du public/lecteur. Ses membres sont juges et partie : les ministères peuvent sanctionner ceux qui s’écartent des pensées officielles, notamment en matière de santé ; les patrons de presse peuvent barrer la route à leurs concurrents. Ils prennent des décisions sans débat public. Le prétexte, en l’occurrence, est que Morphéus n’a pas vendu tout à fait 50 % de ces exemplaires sur le total diffusé. Vendre plus de 50 % est un des critères pour bénéficier du numéro de la Commission. « Or, je connais bien des publications actuellement en kiosque qui n’atteignent pas ce seuil », dit Frédéric Morin.

L’autre effet pervers de cette politique, c’est qu’elle pousse du coup un certain nombre de titres à circuler totalement hors des circuits officiels, c’est-à-dire sans dépôt légal, ni ISSN, ni, bien sûr, CPPAP. « Il y a le risque de voir pulluler des publications sous le coude, sans plus aucun contrôle et ne respectant aucune règle. J’en connais quelques-unes. On ouvre une boîte de Pandore », avertit M. Morin.

Le directeur de Morphéus a créé un logo : « Presse libre sans CPPAP » (voir sur son site) qui pourra être apposé aux titres indépendants qui se sont vu refuser le n° de CPPAP. Une charte éthique devrait être élaborée. Ces titres pourront être diffusés par la Poste, avec un tarif spécifique mais sans aucune aide publique.


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