Franz-Olivier Giesbert, l’homme qui voulait la peau de Jean-François Copé

Jean-François Copé avait effectivement, suite aux révélations du Point sur la société Bygmalion, évoqué dans une conférence de presse des "tartuffes bouffis", se nourrissant avec une "délectation perverse" de leurs "magistère moral de pacotille" pour le "lyncher publiquement" et l'envoyer au "bûcher médiatique". Il s’agirait donc simplement d’un prêté pour un rendu. Pourquoi pas. Mais comme FOG avait déjà descendu Copé en flèche dans le Grand Journal la semaine dernière pendant le festival de Cannes, je me suis demandé s’il n’existait pas une rancœur autre, dont l’origine se situerait en amont de l’affaire Bygmalion et qui expliquerait peut-être que Le Point ait révélé en premier l’escroquerie.

Me voilà donc parti à rechercher dans les articles et les vidéos disponibles sur Internet. Rapidement, je tombe sur cet éditorial daté du 14 novembre 2013 et intitulé « Quand M. Copé s'en ira, la droite se réveillera  ». On peut notamment y lire que « M. Copé l'a transformée [l’UMP] en Fort-Apache, une sorte de version à la française du Tea Party […]. Il emmène donc la droite dans le mur avec la complicité d'un petit clan d'obligés et de médias enamourés qu'il sait traiter. » Voilà des propos qui n’ont rien à envier à ceux du sieur Copé en termes de manque de respect et qui furent prononcés bien avant l’affaire Bygmalion.

Quelques jours après, FOG s’exprime sur RMC en tenant des propos similaires à ceux de cet édito et en lâchant carrément « Copé est nul ». Il s’embarque dans une tirade dont il a le secret :

Franz-Olivier Giesbert : "Copé est nul" par rmc

 

Dans la vidéo précédente, FOG fait allusion à la faible popularité de Jean-François Copé, chose qu’il a balancée à la figure de l’intéressé dans Des Paroles et Des Actes sur France 2 en Octobre 2013. Là, c’est un morceau anthologique de critique acerbe où il lui assène qu’il a « triché pour prendre le parti » et que l’émission vient de recevoir l’homme politique le plus impopulaire de France :

 

C’est donc peut-être dans cette fameuse « triche » dont FOG semble être absolument certain que réside la source de l’animosité. Continuons à remonter dans le temps. Suite à cette élection rocambolesque de fin 2012 pour la tête de l’UMP, FOG a publié un éditorial tonitruant le 29/11/2012, mais où Copé n’en prend pas encore plein la figure, cela reste raisonnable : « Quant à Copé, qui est parti pour être président à vie de l'UMP, et même encore après sa mort, il aura tôt fait de remonter sur son cheval pour d'autres aventures ».

Quelques jours plus tôt, le 22/11/2012, FOG écrivait à propos de Copé, toujours dans Le Point : « C'est cette même ligne Buisson qui a mis du vent dans les voiles de Jean-François Copé. S'il veut avoir un jour un destin national, il serait bien inspiré de s'en détacher, maintenant qu'il a bien rempli ses filets de pêche. Gageons qu'il saura le faire : cet homme est trop malin et talentueux pour ne pas comprendre que son avenir est à ce prix. »

Bingo ! C’est bien au cours de cette élection interne désastreuse de l’UMP que l’avis de Franz-Olivier Giesbert a opéré un virage à 180°. En une semaine chrono, Jean-François Copé est passé dans le cœur de FOG de l’admiration au dédain le plus profond. L’absence de moralité supposée de l’ex-patron de l’UMP semble avoir été à l’origine du déchaînement du journaliste. Ce dernier avait avoué posséder un « petit côté justicier » dans une interview donnée suite à la sortie de son livre sur Nicolas Sarkozy (cf. vidéo plus bas).

Question moralité pourtant, je m’interroge sur Franz-Olivier Giesbert, ce personnage haut en couleur et aimé des français pour son bagout et sa spontanéité. A cause de son affection assumée pour François Mitterrand dont la moralité pourrait sérieusement être mise en doute parce qu’il a favorisé la montée du FN, mais aussi à cause de sa manière toute particulière de concevoir l’humilité et qu’il expose dans cette vidéo très intéressante. Pour lui, le principe même du journaliste, c’est de changer d’avis (à partir 2:50) :

L’anecdote expliquant que Jean Daniel, fondateur du Nouvel Observateur et mentor de FOG, a raconté de manière radicalement différente un évènement suite à un coup de fil de Mitterrand est significative. Si le monde est en perpétuel changement, qu’on ne se baigne jamais deux fois dans le même fleuve (Héraclite), changer d’avis en fonction du sens du vent me paraît plutôt une soumission au pouvoir. Un pouvoir qui affiche en façade la moralité, mais qui ne la pratique pas. Cette conception spéciale de l’humilité coïncide avec sa déclaration en fin de vidéo : « je ne suis pas du tout prétentieux ».

Hier soir, Jean-François Copé prenait la parole au 20h de TF1 pour se défendre, déclarer une bonne foi « totale » et s’assurer que sa carrière politique ne touche pas à sa fin. Un petit reportage nous a appris que l’ex-patron de l’UMP conserve toujours avec lui une figurine de Zorro, le héros de son enfance. Justicier masqué, Zorro remonte chaque fois à cheval en cas de chute. Peut-être que l’enquête de la justice officielle, non masquée, permettra de déterminer qui de Franz-Olivier Giesbert ou de Jean-François Copé incarne le mieux le rôle du justicier ? Mais il est vrai qu’à l’heure qu’il est, Copé-Zorro est largement distancé par son concurrent qui va pouvoir savourer tranquillement quelques canons sur la Canebière.

Joaquim Defghi

Blog : actudupouvoir.fr

Twitter : @JDefghi

 

Le petit côté justicier de FOG à 4 :49 de la vidéo :

Franz-Olivier Giesbert viré de son émission par... par tv5mondelinvite