L’UDF, les médias, leurs actionnaires et la loi

par Adam Kesher
lundi 20 novembre 2006

Le projet de loi déposé par l’UDF vendredi a pour objectif "d’empêcher les groupes industriels dont l’activité dépend des commandes de l’Etat à plus de 20% de leur chiffre d’affaires, de détenir directement ou indirectement plus de 3% du capital d’un média".

Sont évidemment visés Bouygues (TF1), Dassault (Socpresse -> Le Figaro) et Lagardère (Hachette -> Europe 1, Paris Match, JDD...).

La difficulté d’avoir un débat sur le sujet de l’actionnariat des médias tient naturellement à la censure médiatique qui l’entoure... José nous invite à relayer l’information puisque les médias se font étrangement discrets sur le sujet... Dont acte.

Les blogueurs pourraient aider à "produire" du bruit, à leur niveau. Mais pour cela il faut qu’ils «  s’organisent », et pas seulement qu’ils se fassent l’écho de ce qu’ils voient dans les médias... C’est donc loin d’être gagné.

Sur le fond, on se félicitera d’abord de ce que l’UDF transforme les sujets qu’il aborde en propositions. Le pavé dans la mare jeté par François Bayrou (rejoint sur un terrain proche par Laurent Fabius au cours de la primaire socialiste) il y a quelques semaines ne reste pas lettre morte (cf. également l’article d’AgoraVox : François Bayrou, le candidat qui ne plaît pas aux médias, a-t-il une chance de s’imposer ?).

Certains essaient donc de faire vivre le sujet, un sujet qui dérange. On attend aussi les réactions des spécialistes de l’observation médiatique, Acrimed par exemple.

Sur la proposition de loi en elle-même, on note donc que l’UDF propose que ce soient les liens entre l’actionnaire et l’Etat qui déterminent la limite à ne pas franchir. Autrement dit, si vous êtes un groupe industriel, vous choisissez entre les commandes de l’Etat et la participation aux médias.

On comprend la logique : si l’Etat vous fait vivre, vous êtes susceptible de faire pression sur les médias que vous détenez pour ne pas nuire à la réputation de votre client, ou plus généralement pour ne pas produire de l’information ou de l’opinion qui nuise à l’Etat. Et si vous ne faites pas pression vous-même sur les rédactions, pas de problème : l’autocensure veille.

Le problème serait donc le traitement de l’Etat par la presse. Mais n’est-il pas beaucoup plus complexe ? On peut opposer certaines critiques à la vision des choses induites par l’UDF :

A gauche de l’UDF, on objectera sans doute qu’il faut aller plus loin et rendre leur liberté aux médias (voir la déclaration adoptée à la suite des premiers Etats généraux pour le pluralisme médiatique). A droite, on dira qu’il faut être réaliste et permettre aux médias de gagner leur vie pour garantir leur pérennité, ou qu’il s’agit d’un faux problème.

Le projet de loi UDF a des avantages et des inconvénients, mais devrait servir de base de discussion. Pour bien couvrir la question, il conviendrait de répondre à deux questions :

Je n’ai de réponse ni à l’une, ni à l’autre. Sachant qu’on peut aussi balayer la première de ces deux questions en répondant que ce n’est pas ce qu’on veut de toute façon...

L’équilibre entre la liberté et l’économie est bien fragile. Et il ne faudra pas oublier que la question à laquelle on devra principalement répondre est de savoir comment le système médiatique, dans son ensemble, peut permettre d’éclairer les citoyens sur le monde qui les entoure.

Des billets sur des sujets voisins :

La polémique Schönberg
L’avenir de la presse quotidienne en question
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Crédit images : Le Plan B (zoom disponible de la carte de la presse sur ce site)

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