La loi du mort-kilomètre, votre vision du monde est biaisée

par Nicolas_M
jeudi 28 mars 2019

 

Un principe fondamental est enseigné dans toutes les écoles de journalisme, la loi du mort-kilomètre, aussi appelé principe de proximité. Ce biais, comme beaucoup d'autres, altère notre perception du monde.

En 2000, Jacques-Philippe Leyens, professeur de psychologie, s'est livré à une expérience sur la perception des informations. Il a scindé des volontaires belges en 2 groupes, et a donné à chaque groupe la même information à lire, relatant un incendie. Au premier groupe, il a annoncé que l'incendie avait eu lieu en Belgique, au second en Angleterre. Puis il a demandé à chaque groupe quelles émotions il avait ressenti.

Le premier groupe a exprimé des émotions propres à l'homme, comme le chagrin, le désespoir ou la culpabilité. Le second groupe a exprimé des émotions primaires, comme la peur ou la douleur. En fonction de la distance d'un évènement, distance kilométrique ou distance culturelle, nous n'éprouvons pas la même empathie pour les victimes, car nous n'évaluons pas la gravité des faits de la même manière.

 

Le rôle des médias n'est pas d'informer, mais d'augmenter leur audience. Ainsi, les conflits les plus ravageurs de ce siècle, comme celui au Yémen actuellement, sont systématiquement passés sous silence. Au mieux, un rapide article dans la rubrique des faits divers ou des opinions évoque rapidement les 22 millions de personnes en détresse et les 100 000 à 200 000 morts ... Alors qu'une roquette tombant dans un quartier israélien faisant un blessé léger sera systématiquement en Une de nombreux journaux.

 

Ce qui permet à un média de se vendre, ce sont les émotions qu'il véhicule. Ainsi, la disparition inquiétante d'une jeune fille, surtout si l'enquête s'annonce riche en rebondissements, peut créer toute une série d'articles. Chaque bribe d'enquête détaillant le plus possible la vie de la disparue. Ainsi, l'auditeur s'identifie facilement à la présumée victime, l'information devient rapidement la discussion principale autour de la machine à café, et ceci pendant plusieurs jours. L'information occultant de ce fait les 40 000 disparitions annuelles en France. Soit 110 par jour.

 

De la même manière, il y a de cela quelques semaines, les clients des médias ont été abondamment noyés sous les annonces d'actes antisémites. Chaque croix gammée près d'une école, chaque cimetière dégradé était systématiquement ponctionné d'un article de presse. Bien entendu, aucun rapport avec le diner du CRIF. Les journaux ont martelé que les actes antisémites étaient en forte hausse depuis l'année dernière, le chiffre 74% a été répété absolument partout, pensez-y, 541 actes antisémites dans l'année, jamais la France n'avait été aussi raciste ... en omettant volontairement de préciser que l'antisémitisme est en baisse presque constante depuis 20 ans. Ou que plus de 3 millions de faits de délinquance ont été enregistrés sur la même période. Visiblement, mettre une information dans son contexte ou relativiser avec d'autres chiffres n'est pas vendeur.

 

Le terme "média d'information" n'a aucune signification. Du Figaro à Libé, de TF1 en passant par BFM TV, aucun média ne relate ce qui se passe dans le monde de manière plus objective que Closer. Et, à moins de faire des recherches longues et poussées sur Internet, de passer un temps énorme à catégoriser l'information, il est aujourd'hui presque impossible d'avoir une vision non biaisée de l'état du monde. Il est important de remettre l'information telle qu'elle nous est présentée à sa place : une source d'inspiration pour les discussions avec Gégé au coin du bar.


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