La part du fils, pour les nuls

par Pascale Mottura
dimanche 27 octobre 2019

Mercredi 23 octobre 2019, François Busnel lors de son émission La Grande Librairie a présenté La part du fils, dernier livre de Jean-Luc Coatalem publié par les éditions Stock, comme la « quête d’un grand-père arrêté pour des faits de résistance ». Or c’est faux. Le grand-père Coatalem n’a pas été arrêté puis déporté en 1943 pour des faits de résistance.
Le fond et la forme de cet ouvrage ambigu offrent matière à discussion. 
La forme est bizarre : roman familial écrit à la manière d’un récit biographique mâtiné de séquences autobiographiques. Quel est ce genre littéraire que l’on peine à circonscrire ?
Le fond est contestable car l’auteur brouille à dessein les traces historiques.
Plus largement, ce cas interroge sur la manière dont le faux peut être validé et diffusé, parfois en toute bonne foi, par les médias et les institutions.
Alors, contre les faits alternatifs et la post-vérité : le devoir de mémoire !
 

« On ne se tient pas quitte si aisément avec la vérité, même en littérature.
L’entrelacement du vrai et du faux, dans le fictif, comment le démêler et le caractériser ? »

Philippe Mengue, in Deleuze et la question de la vérité en littérature

 

La part du fils est un ouvrage sous-tendu par la volonté de l’auteur de faire croire que son grand-père serait mort en déportation pour actes qualifiés de Résistance (action clandestine et para-militaire).

Tout au long de cet objet littéraire indéterminé, le texte est savamment orchestré, émaillé d’indications subliminales visant à portraiturer un grand-père Résistant actif, terroriste héroïque.

Si cette affabulation n’était que passagère dans le livre, cela ne prêterait pas beaucoup à conséquence. Mais elle court tout au long de l’histoire, elle en forme la colonne vertébrale. Elle en constitue le début et la fin, l’alpha et l’oméga.

« Est-ce que la vérité c’est l’exactitude ou est-ce que c’est l’émotion que vous ressentez par rapport à un fait ?! » demande Jean-Luc Coatalem (profession journaliste, par ailleurs) sur le plateau de LGL…
Eh bien c’est exactement la définition de la post-vérité : « post-truth, en anglais, fut le mot de l'année 2016, selon l'Oxford Dictionnary. Il se rapporte, explique la publication britannique, aux « circonstances dans lesquelles les faits objectifs ont moins d'influence sur l'opinion publique que ceux qui font appel à l'émotion ou aux croyances personnelles ». 1

A lire les papiers promotionnels, l’astuce a bien fonctionné : « Mon grand-père ce héros » a titré par exemple le magazine Elle
Pour ma part (« ma part de fille »), je suis choquée de lire dans la presse, d’entendre sur les ondes (ex : La Dispute, sur France Culture, 26 septembre) et maintenant à la télé, les termes de « glorieux » et de « Résistant » accolés à la figure de ce grand-père paternel.

Déporté, oui. Résistant, non ! Camille Coatalem (Paol, dans le récit) est effectivement mort en déportation, broyé par la machine nazie, comme des millions d’autres personnes. Il a été déporté dans le cadre de l’opération Meerschaum (cf. explications infra). C’est tragique mais cela n’autorise pas à prétendre à un statut qui n’est pas le sien.

Inutile de rappeler la puissance d’impact de la littérature. Livre imprimé fait mémoire. Il fait foi. Si personne ne réagit à cette part du fils imaginaire, par la suite qui osera remettre en question son contenu sur un Résistant fantasmé ? D’autant plus si un prix littéraire vient le couronner ! 2
C’est la porte ouverte à toute usurpation mémorielle.

Le site du Goncourt des Lycéens indique que l’auteur a fait en ce mois d’octobre une tournée dans différents lycées. C’est pourquoi il semble utile de procéder à une explication de texte car pour décrypter ce livre il faut posséder quelques notions de l’historiographie de cette période.

Au plan de la pédagogie de la Résistance, ce livre est une aberration. Les lecteurs néophytes pourraient croire que la mention « mort pour la France » (seule récompense morale obtenue par le grand-père, relative à l’état civil, rappelons-le) est plus honorifique que la Médaille de la Résistance ou que la Légion d’Honneur ! Et que dire de la différence entre le statut de Déporté Interné Résistant et celui de Déporté Interné Politique ? l’auteur s’en fiche, brouille volontairement les pistes. Ou encore de la distinction entre réseau et mouvement de la Résistance ?
Et quid de la logique de la recherche dans les archives, présentée sciemment de manière inversée dans le livre afin de servir le propos souhaité… ?

Certes, chacun est en droit de s’illusionner, de se mentir. Tout le monde a le droit de fantasmer ses aïeux. Si Coatalem avait écrit un roman sur un grand-père pirate dans les Caraïbes, je m’en ficherais royalement. Même les descendants de vrais pirates n’y trouveraient rien à redire, je suppose, du moment que le livre se présenterait clairement comme entièrement romancé, fruit d’une imagination débordante.

Mais là, il s’agit d’une mémoire encore à défendre, celle des Résistants (hommes et femmes) qui furent torturés et massacrés pour leurs actions valeureuses contre l’ennemi nazi.

Quitte à avoir une imagination débridée, au vu des pièces d’archives il se trouve que Jean-Luc Coatalem aurait tout aussi bien pu brosser le portrait d’un grand-père pétainiste, provichyste, jusqu’en mars 1943.

L’auteur rétorque : « tous les faits historiques donnés sont vrais et vérifiés et lorsque j’extrapole je le dis à chaque fois, ne trompant jamais le lecteur sur la réalité ».
Ah oui ?

Explication de texte

Je ne m’occupe ici que du filigrane du livre touchant aux prétendues actions du grand-père dans la Résistance.

Les faits

L’examen des archives (Service Historique de la Défense) fournit les informations suivantes :

Camille Coatalem n’a appartenu à aucun réseau de la Résistance, mais a rejoint le 15 mars 1943 le mouvement Libération Nord dans le cadre duquel son unique activité (les attestations FFI, établies dès 1946, sont claires) a consisté à fabriquer de faux papiers pour les réfractaires au STO et ce, pendant 4 mois et demi, jusqu’au 1er septembre 1943, date de son arrestation sur dénonciation. Cette dénonciation résultait de motifs personnels (vengeance d’un salarié licencié) et portait sur un propos anti-allemand qu’aurait tenu Camille Coatalem.
Donc,

Jusque-là il travaillait sans problème en tant que responsable du personnel et chef comptable pour une sous-division des Chantiers de Bretagne, sous la férule de l’Organisation Todt.
(Les historiens nomment cela : « collaboration économique »).
Dans un courrier écrit par son épouse le 15 octobre 1943, adressé au président du Conseil, préfecture du Finistère, on peut lire cette phrase : « depuis trois ans que mon mari travaille pour les autorités d’occupation, ces dernières n’ont eu qu’à se louer des relations qu’il a eues avec elles ». 

Devenu « chair à chantier », Camille Coatalem est mort à l’infirmerie de Bergen-Belsen le 12 mai 1944 à l’âge de 49 ans.
Sa veuve a cherché à obtenir pour lui le statut de Déporté Résistant. Sans succès. Le ministère des Anciens Combattants et Victimes de Guerre a rejeté sa demande en juillet 1956 (suite à une relance faite par la veuve laquelle avait déposé sa demande en 1952 - le dossier, apparemment, n’avait pas été jugé prioritaire). Motif du rejet : « l’intéressé ne remplit pas les conditions exigées ». C’est le statut de Déporté Interné Politique qui a été appliqué à son cas en juin 1963, suite à un deuxième examen du dossier.

Rappelons que la loi du 6 août 1948 définit un statut des déportés et internés de la Résistance, celle du 9 septembre un statut de déporté et interné politique. Ce dernier ne renvoie pas à une quelconque activité politique, il concerne l’ensemble des autres déportés non résistants (juifs, victimes de rafles, réfractaires au STO, communistes, personnes ayant manifesté des opinions anti-allemandes, etc.), à l’exclusion des condamnés de droit commun et des étrangers.

Si deux statuts différents de déportés ont été créés par l’Etat, ce n’est pas pour rien !

De fait, présenter Camille Coatalem comme un déporté Résistant est illégitime.

Comparaison avec le contenu de La part du fils

N.B. : l’auteur dit dans son récit avoir consulté les archives du Service Historique de la Défense à Vincennes et à Caen.

Les citations utilisées ne sont pas exhaustives. Bien d’autres éléments du récit pourraient également étayer la démonstration.

L’arrestation violente et les interrogatoires sous torture : entièrement inventés

Le chapitre 3 détaille une arrestation violente « … du sang coulait de sa bouche, du nez, imbibait sa chemise /…/ et l’autre type de lui refiler un dernier coup de poing, salopard de terroriste, c’est qu’il finirait par lui dégueulasser sa voiture de fonction ! » (p.19).
Certes, l’auteur précise « j’imagine » mais une scène qui a réellement existé peut être imaginée, « recomposée », comme c’est écrit dans la postface. Inventée de toutes pièces est plus juste ici.

Page 254, à la fin du livre, l’auteur décrit autrement l’arrestation, telle qu’un témoin âgé de 82 ans la lui a raconté, c’est-à-dire telle que la mère de celui-ci « lui avait raconté durant son adolescence » : « ni violence, ni précipitation, juste cette détermination froide des inspecteurs ».

Mais, d’entrée de jeu, le sujet du livre a été implanté dans la tête du lecteur (Inception !) : Paol était considéré comme terroriste (ce qui veut dire lutte armée, sabotage) par la Gestapo. On est en plein roman… bien que le style du récit soit autre…

Sont semées tout au long du récit des allusions à des interrogatoires sous torture laissant croire que Camille Coatalem est un Résistant considéré comme important aux yeux de la Gestapo :
p. 16 : « Incarcéré avec les politiques et les terroristes. Interrogé ».
pp. 19-20 : « Puis les interrogatoires se succédaient /…/ Désormais, Paol est un ennemi du Reich, un indésirable /…/ tout le village sera au courant /…/ il n’y a pas de héros, il doit oublier le réseau ». (Question : quel réseau ? Camille Coatalem n’a appartenu à aucun réseau).
p.43 : « il a mal partout, il a été cogné. A gauche, deux autres types, dont l’un a des doigts cassés, ils remuent sur leur bat-flanc, en gémissant. Par prudence, on se parle au minimum, à cause des mouchards »
p.45 : « Les questions reprennent sous la lampe. /…/ Certes, pour le résistant, la règle est de se taire quelque temps afin que les membres du réseau se planquent, puis d’en avouer le moins possible ou de révéler des banalités en évitant le supplice de trop./…/ Et quand arrive son tour, et il vient, la geôle qui s’ouvre…il nie en bloc, il doit enfouir ce qu’il sait », etc. (Question : que sait-il donc ?).
p.67 : « Son profil sera jugé assez sérieux pour qu’il soit interrogé, tabassé ».
p.109 : « faut dire que Paol avait changé, son visage s’était creusé, émacié, les interrogatoires avaient laissé des séquelles ».

N.B. : Les réseaux étaient une cible prioritaire de l’occupant. La Gestapo était bien trop occupée avec les saboteurs de l’Armée Secrète et les agents de renseignement, du réseau Alliance par exemple, pour gaspiller du temps et de l’énergie avec du menu fretin. En outre, torturer avant leur départ des hommes destinés au travail dans des camps en Allemagne eût été pour le moins contreproductif…

Les diverses activités de résistance cachées : entièrement inventées.

Le chapitre 10, pp.67-70, est consacré à la supputation d’actions clandestines qui auraient été menées par Paol dans le cadre de l’un ou l’autre réseau actif en Bretagne. Idem page 135.

Au cours de son récit, l’auteur se contredit. Tout en évoquant souvent, on l’a vu, l’appartenance de Paol à un réseau, il avoue : « en dépit de mes recherches, Paol reste introuvable », « je n’ai jamais relevé le nom de Paol dans une organisation » expliquant cet échec par la maladresse de ses recherches, l’incomplétude des archives, ou encore le secret absolu qui régnait au sein des réseaux dont les membres agissaient sous pseudonymes. Pourtant, les noms d’emprunt des vrais Résistants furent généralement connus après la Libération ! A lire Coatalem on se demande par quel miracle les Résistants, les vrais terroristes, ont pu être reconnus et médaillés, notamment à titre posthume… !

Il est possible que des Résistants soient restés inconnus, des isolés, des sans famille, ceux qui seraient morts sans que personne, aucun proche ou aucun membre du réseau ou du mouvement, rescapé, ne se soit soucié de leur rendre justice après la guerre. Ce n’est, de loin, pas la majorité.

Dans le cas de Camille Coatalem des attestations ont bien été délivrées, dès 1946. Les mémoires étaient encore très fraîches et, sur ce territoire, tout le monde se connaît (l’auteur l’indique lui-même à plusieurs reprises) :
p.25 : « le patelin était minuscule et les familles liées /…/ Non, le mieux aurait été d’interroger les descendants du docteur Vourc’h, l’ancien maire, résistant dès la première heure ». (Question : l’auteur l’a-t-il fait ? Il n’en parle pas).
p.69 : « Dans le mouchoir de poche de Kergat, il paraît invraisemblable qu’on n’ait pas approché ce soldat, ou qu’il n’ait rien fait, lui, pour les rejoindre. » On rétorquera qu’il est tout aussi invraisemblable que, dans ce mouchoir de poche, personne n’ait produit après la guerre d’autres attestations que celles qui existent, alors que la famille s’est démenée pour en obtenir !

On notera donc qu’il existait localement des personnes qui auraient pu attester d’activités de résistance autres que la fabrication de faux papiers si ces activités avaient existé… On pense notamment au fils aîné de Camille Coatalem, Ronan, qui, après avoir rejoint Londres en 1943 (puis avoir déserté et avoir été condamné pour cela par un tribunal militaire), « referait surface des années plus tard ». Décédé dans les années 80 à l’âge de 56 ans, pourquoi n’a-t-il donné aucune piste sur un réseau présumé alors que Coatalem insiste lourdement sur le fait que le père l’aurait aidé à partir en Angleterre ? et que sa mère était en peine de fournir au ministère des attestations idoines ?

Page 31 : « des mots sonores comme des médailles : résistant, déporté politique, disparu en Allemagne, mention honorifique de « Mort pour la France ».
N.B. : le grand-père n’ayant reçu aucune médaille pour le conflit 39/45, la mention « mort pour la France » est présentée comme particulièrement honorifique, soulignée ici, et de nouveau à la toute fin du récit p.259. Rappelons que si, instituée par la loi du 2 juillet 1915, la mention « Mort pour la France » signifiait alors généralement « mort au champ d’honneur », témoignage de reconnaissance de la Nation à tous ceux qui mouraient sur les champs de bataille ou faits prisonniers, ses conditions d’attribution ont été plusieurs fois élargies à partir du décret de mars 1922. Entre autres exemples, elle peut être attribuée à des civils morts lors d’un bombardement. Cette mention, qui est relative à l’état civil (notée sur l’acte de décès) ne sous-entend pas une mort consécutive à une action honorifique mais une mort survenue du fait d’une guerre.

Le motif et le contexte de la déportation

Tout au long du récit, on nous assène les mots : « résistant, déporté », « résistance puis déportation ».

Page 197, on apprend enfin le contexte de la déportation du grand-père grâce aux Archives d’Arolsen : « Il était précisé que Paol avait été incarcéré puis déporté lors de l’opération « Meerschaum », soit « Ecume de mer ». Là, l’auteur écrit : « -c’est - Le nom de code pour la déportation de Français placés en détention de sûreté pour faits de résistance contre l’occupation allemande », créant volontairement une immédiate confusion dans son texte avec la directive NN (Nuit et Brouillard) qui concernait, elle, les prisonniers représentant « un danger pour la sécurité de l'armée allemande » (saboteurs, résistants, opposants ou réfractaires à la politique ou aux méthodes du Troisième Reich).
Curieusement, la définition de l’Aktion Meerschaum donnée par les historiens est différente de celle de Coatalem, à savoir : nom de code d'une opération de « recrutement » en Europe de l’ouest d’une main d’œuvre apte à travailler pour le Reich.
Plusieurs milliers d’hommes furent ainsi arrêtés dans toute la France pour s’être rendus coupables de délits politiques mineurs ou plus vaguement soupçonnés de sentiments anti-allemands et considérés comme simplement « douteux » par les autorités d’occupation.

Quant au motif de l’arrestation : « inconnu », sur laquelle bute tant l’auteur, c’est la raison - ou plutôt l’absence de raison - indiquée le plus souvent sur les fiches des déportés de l’opération Meerschaum.

L’homologation FFI et le rejet du statut de Déporté Résistant

Page 123, un début d’aveu ? : « Avec le temps je finis par douter de l’appartenance de Paol à la Résistance ». Mais l’auteur se reprend vite… Citant la première décision ministérielle, négative, il écrit : « une décision du ministère des Anciens Combattants, datant de 1956, avait rejeté sa qualification de déporté résistant, faute de preuves suffisantes ». Or, comme on l’a vu, le document stipule : « l’intéressé ne remplit pas les conditions exigées par les dispositions combinées des articles R.286 et R.287 du Code des Pensions Militaires d’Invalidité et des Victimes de la Guerre ».
Et l’auteur se garde bien d’évoquer le deuxième examen du dossier, en 1963, lequel a abouti à l’attribution du titre de déporté politique.

A la toute fin du livre, pp. 259-260, comme un magicien sort un lapin de son chapeau, l’auteur brandit les attestations ayant servi à l’homologation FFI pour « prouver » que Camille Coatalem fut bien un Résistant ! Ces pièces datant de 1946 et 1949 sont celles qui ne mentionnent rien d’autre comme activité que la fabrication de faux papiers pour des réfractaires au STO. Ce sont celles que l’on trouve logiquement en premier au SHD quand on se lance dans des recherches ! Pourquoi les placer à la toute fin du récit ?

Quant au grade de lieutenant sur lequel Coatalem insiste, c’était simplement le grade de l’officier de réserve qu’était son grand-père avant la guerre de 39-45. Dans la Résistance on conservait son grade antérieur !

Est-il besoin d’ajouter que ces attestations figurent bien entendu dans le dossier examiné par l’Etat en 1956, puis en 1962-63. L’auteur se garde bien de clore son livre sur ces décisions ministérielles, lesquelles, pourtant, devraient fermer la porte à toute supputation.

Sous couvert de littérature, on pourrait s’attribuer de fausses gloires familiales ? Et être couronné pour cela par des prix ?

C’est sûr, les descendants des Résistants valeureux ne sont pas bien nombreux et ma petite voix en colère ne portera pas loin…

Combien étaient-ils d’ailleurs, ces Résistants ? Cf. :

Au final, je m’adresse particulièrement aux jeunes : si une troisième guerre mondiale éclate, surtout ne bougez pas, attendez tranquillement la fin du conflit, laissez les autres se faire massacrer, ne prenez pas les armes, gardez-vous bien de pratiquer sabotage ou renseignement. Toute votre famille s’en portera mieux, vos descendants aussi.

Car vous risquez gros : subir les pires tortures, mourir dans d’effroyables conditions, et pourquoi ? pour quel absolu, quel idéal ? lutter contre le fascisme, le totalitarisme, les extrémismes de tous poils ? Foutaise !

Sachez que 75 ans après la fin de la guerre (c’est quoi 75 ans ? le temps d’une petite vie) tout le monde se moquera de votre mémoire ; liberté et confort recouvrés, les gens danseront sur votre cadavre. Certains prétendront même que leurs aïeux ont fait les mêmes choses que vous et ils seront applaudis.

Pascale Mottura

octobre 2019

P.S. :

Concernant ma « part de fille », je signale avoir écrit une chronique publiée par la revue L’Inactuelle le 28 septembre dernier, titrée « La Résistance à l’oubli ». Ce texte a pour but d’attirer l’attention de la troisième génération (et de la quatrième…) sur le fait que, grâce aux archives, il est possible de s’armer afin de mieux résister à tous ceux qui tenteraient de biaiser, voire d’occulter l’histoire. J’y développe un point de vue critique sur La part du fils, mais sans entrer dans les détails, ce que j’ai pris la peine de faire ici. 

Cf. : https://linactuelle.fr/index.php/2019/09/28/resistance-oubli-pascale-mottura/

"D'où je parle", et pourquoi ? : grand-père maternel mort en déportation à 37 ans, Croix de Guerre 39/45 avec palme, Médaillé de la Résistance, Légion d’Honneur à titre posthume.

Notes
1- Source : https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2017/01/25/faits-alternatifs-fake-news-post-verite-petit-lexique-de-la-crise-de-l-information_5068848_4355770.html#ancre_post-v&eacute ;rit&eacute ;&nbsp ;

2- Au jour où je termine cet article, La part du fils est encore en lice pour le Goncourt, le Renaudot, ainsi que pour le Goncourt et le Renaudot des lycéens. En outre, il a figuré sur la première liste du grand prix du roman de l’Académie Française 2019.


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