La pétition sur le chalutage de Pénélope Bagieu : infantilisation et inculture politique au service du « buzz »

par Raphaël M.
jeudi 21 novembre 2013

La pétition mise en ligne par Pénélope Bagieu, l’auteure de « Joséphine » et autres bandes dessinées parues dans Femina et Oops , rencontre un franc succès sur les réseaux sociaux et a récolté en quelques jours des centaines de milliers de signatures.

Vous pouvez, si par bonheur vous avez encore échappé à cette odieuse démagogie, la consulter en cliquant sur le lien suivant : http://www.penelope-jolicoeur.com/2013/11/index.html

Lorsque Pénélope Bagieu se contente de croquer avec humour potache et couleurs chatoyantes les péripéties de la vie des femmes consuméristes dans la presse qui leur est consacrée – presse ordurière qui tout en se voulant féministe n’est en réalité qu’une insulte faite à l’intelligence de toute la gente féminine, et qui est à n’en pas douter le plus grand vecteur de misogynie – elle est finalement dans son rôle d’idiote utile, d’agent de perversion au service du grand capital. Mais lorsque Pénélope Bagieu, prototype de la conscience politique zéro et du bisounoursisme , se lance dans l’action militante, on s’attend bien évidemment au pire, et on est servi.

Tout cela part à n'en pas douter d’un bon sentiment. On est tous d’accord, le chalutage en eaux profondes ce n’est « pas bien ». En revanche, signer une pétition pour tenter de faire pression sur la commission européenne, voilà qui est d’une naïveté absolument insupportable. L'enfer est pavé de bonnes intentions.

D’abord pour des raisons institutionnelles et sans vouloir rentrer dans le détail, Pénélope tente de nous faire croire que la France ferait obstruction au projet de loi, ce qui est totalement impossible puisque la politique commune de la pêche, barbarement surnommée PCP par nos gentils technocrates européens friands d’acronymes auxquels personne ne comprend rien (et c’est fait exprès), est une compétence exclusive de l’union européenne. Donc les Etats-membres n’ont plus leur mot à dire puisqu’ils ont délégué leur souveraineté au profit d’une institution supranationale. Bagieu ne semble donc pas connaître toute la différence qu’il peut exister entre coopération internationale classique et le système européen sui generis fondé sur l’intégration, qui exclut justement les Etats de tout processus décisionnel. Ce n’est pas un crime en soit que d’ignorer ce genre de choses, sauf évidemment quand on utilise sa pseudo-notoriété glanée dans les médias poubelles pour prétendre informer et mobiliser sur le net, auquel cas on se renseigne ou on continue de parler de tampons et de tri sélectif (rien de mieux pour se donner bonne conscience). Donc la France ne fait pas blocage, elle n’est plus en mesure de le faire. Pénélope croit et par conséquent nous fait croire que la France est responsable du chalutage et que l’UE est seule à même de nous sauver. Désinformation et inculture politique totale. Si la France est responsable de quelque chose, c’est d’avoir donner tous les pouvoirs à cette entreprise de mort qu’est l’Europe politique. Et là, bizarrement, les pétitions visant à dénoncer cet état de fait rencontrent beaucoup moins de succès.

La commission européenne, qu’on le dise une bonne fois pour toute, n’est pas LA solution à nos problèmes mais bel et bien LE problème. Si les multinationales - en l’occurrence c’est le groupe Intermarché qui est visé- se permettent de racler le fond des océans et de se comporter en règle générale comme des barbares sans foi ni loi, c’est parce que c’est elles qui font la loi à la commission, temple du lobbying et du clientélisme(qu’on ne me parle pas du parlement européen qui ne sert absolument à rien et dans lequel tout le monde vote pareil). Elles rédigent elles-mêmes les directives et les règlements. Par conséquent, Pénélope Bagieu, dans son inculture crasse, et tout en infantilisant le lecteur, fait passer le bourreau pour notre sauveur. Venant de ce parfait archétype de la misère intellectuelle du boboïdal moyen, c’est le contraire qui nous eut étonné.

Alors évidemment, cette initiative politique au ras des pâquerettes et par conséquent populaire, fera parler d’elle et qui sait, ô miracle, pourrait durcir à terme la règlementation sur le chalutage. Mais alors le remède serait pire que le mal car il contribuerait à laisser penser que la commission protège l’environnement et se soucie du bien-être de ses ouailles alors même que ces problématiques ne se seraient jamais posé si la commission n’existait pas. Un joli coup de pub pour la construction européenne en somme.

Comme se tue à le dire depuis des années François Asselineau, de manière assez héroïque et sans aucun relai médiatique (contrairement n’en doutons pas au bisounours Pénélope Bagieu dont toute l’intelligentsia incroyablement stupide se fera l’écho), l’union européenne est totalement anti-démocratique (ce qui à la rigueur ne nous dérangerait pas trop), et fonctionne sur le principe du despotisme éclairé ; du despotisme éclairé par le néo-libéralisme dans sa pire acception.

Nous ne devons jamais signer une pétition pour faire pression sur la commission, il faut tout simplement se débarrasser de la commission.

Au-delà de l’inculture qui dégouline de cette pétition sentimentaliste à l’extrême, c’est l’inquiétante infantilisation du lecteur qui nous effraie (rien que le titre : prends 5 minutes et signe copain...). Il faut croire, au regard du succès et du nombre de partage, que les gens aiment qu’on leur parle comme à des demeurés. Des dessins médiocres, un ton sarcastique, voilà qui suffit à mettre la toile en émoi. Misère de la « comm ». Finalement les politiques, les publicitaires et les médias font bien de prendre la ménagère de moins de 50 ans, le jeune branché inculte ou la pétasse faussement politisée (cœur de cible en l’espèce) pour des protoprimates, parce qu’en définitive ça marche.Ce n'est pas tant la pétition en soi qui nous revulse, mais le suivisme aveugle des masses totalement débilisées par ce genre de techniques marketing.

On ne changera pas le monde avec des pétitions jouant sur l’émotionnel, ni avec des chansons pourries, ni en défilant entre Bastille et nation avec une autorisation préfectorale, encore moins en votant UMPSFNFGEELV, mais en élevant le niveau de conscience et de revendication, en cessant de s’agiter pour minimiser les conséquences tout en feignant d’en ignorer les causes, ou pire, en les chérissant, pour reprendre le célèbre mot de Bossuet.


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