Le Monde ou comment reprocher à Taddeï son manque de courage en publiant un papier qui n’en a pas

par pimit
lundi 20 janvier 2014

« Mieux vaut être couard une minute que mort tout le reste de la vie », à ce rythme là, Judith Perrignon a encore de beaux jours devant elle.

J’invite à la lecture du papier du Monde "Frédéric Taddeï, l’homme sans convictions" pour comprendre de quoi il est question ici.

Si beaucoup sont terrifiés par l’état de délitement du journalisme dans notre Nation de gouailleurs où le débat est intrinsèquement lié à notre tempérament et la rhétorique portée sur le piédestal des arts, cette Tribune dans ce qui est censé se faire de plus intellectuel dans l’univers de la presse hexagonale a de quoi terriblement les conforter.

Si la rhétorique, redoutable arme politique conduisant les Parlements de Provinces à faire plier un empoté Louis XV, ou Voltaire réhabilitant La Barre, le débat, lui, permettra également de rétablir des profondes injustices qui jalonnent notre Histoire à l’instar du procès Dreyfus.

Judith Perrignon, de son côté pense utiliser la rhétorique et crucifie le débat. Dans sa logique implacable, tous les débats ne sont pas bons exister. C’est un parti pris qui n’est pas dénué d’une certaine raison, mais la lâcheté dont elle fait preuve en s’attaquant plus au moyen qu’à la fin est, elle, totalement dénuée de noblesse. Dom, la Perrignon n’en caresse même pas l’espoir. Don, on verra qu’elle n’en a point plus.

Etude d’un texte à charge grotesque de la Procureur Perrignon.

Dès les prémices, en parlant des années 2000, « Années des émotions plus que des convictions » écrit celle qui fera un livre intitulé La Nuit du Fouquet’s , loin d’elle l’idée avec un titre semblable, de chercher à capter l’audience « buzzique » d’une opinion qui s’emballe.

En 2012 en commet un autre N’oubliez pas que je joue coécrit avec Sonia Rykiel connue pour ses prises de positions acerbes et courageuses a l’instar de la « demode ». Non vraiment, rien de normatif qu’une journaliste « politique » qui partage l’affiche avec une star des Fashion Week. Dans une enquête américaine, le « The State of the News Media in 2004 » indiquait que les reportages sur les débats nationaux dans les plus grands magazines américains avaient chutés de 25% alors qu’à la même période les papiers sur les célébrités et « l’entertainment » avaient doublés. 8 ans plus tard, notre journaliste politique écrit un livre sûrement rempli d’analyses de son champs d’expertise avec une co-auteur toute trouvée pour ces questions là…

Mais la technique descriptive de sa Némésis du moment est une leçon d’objectivité journalistique : « Sinon, il a la voix plus traînante et le cheveu plus gris qu’à la télé ». Comprendre, « c’est un blasé amer ». Quant au récit de la couleur des cheveux de sa cible, dont on se serait bien passé par ailleurs, elle est digne d’un dialogue de rencontre d’un anonyme avec une star du showbiz : « Vous faites plus petit qu’à la télé ». Déjà Madame Perrignon donne le ton de l’utilité de son raisonnement.

Réfléchissant avec une intensité d’une remarquable fadeur sur le rôle du journaliste, elle lâche, probablement avec la fierté du puceau tout juste déniaisé : « Ça laisse aux autres le poids des responsabilités et le rôle du mauvais coucheur. »

Prouvant une fois de plus, si besoin, que le journalisme publié dans ce qui se croit de plus cérébrale en France, n’est qu’un vomi de formules plates.

Elle l’ose, cette brillante journaliste !

Elle l’ose, coucher un axiome sur le papier sans voir la contradiction entre sa profession et sa prise de positions. A croire qu’elle n’a pas une once de compréhension primaire de ce qu’elle dit. Mais pourrait-on rappeler à Madame la Procureur, que c’est précisément le rôle d’un journaliste digne de ce nom que de donner des clefs de compréhension au lecteur et de laisser cette latence qu’elle qualifie avec arrogance « de mauvais coucheur » et que d’autres, pourtant, appelleraient « interprétation ». Mais non, Perrignon ne sourcille pas, selon elle le journaliste doit traduire, le peuple est probablement trop con pour le faire seul.

Puis le phare continue de nous guider : « Taddeï lui a rétorqué qu’il était pour la liberté de parole, tant que personne ne tombait sous le coup de la loi. A l’image, lui et son principe l’emportaient haut la main. »

De nouveaux elle traduit, « A l’image, lui et son principe l’emportaient haut la main » avec un souci des formules également aussi puissant que la précision de vocabulaire est dédaigneux : un « lui » de hauteur qui vise à qualifier Taddeï et surtout à le disqualifier (j’ai aussi mon petit sens de la formule).

Encore : « lui et son principe l’emportaient haut la main ». La loi, selon notre brillante éditorialiste, est « un principe » propre à Taddeï. Le procureur Perrignon ne lésine pas à brocarder la loi de la République, peut-être est-ce une invitation à s’en affranchir. Madame Perrignon serait-elle plus dissidente qu’elle ne le prétend ? Mmmmh, je vois dès lors pointer le doux fumet du brûlot contestataire.

Il n’en est malheureusement rien… Tout cela retombe bien vite et la gaule sera de courte durée. Seule dureté à l’horizon est celle d’une forme qui dessert un fond qui n’en avait pourtant pas besoin.

Elle illustre son texte avec une imagerie propre à un lavage de cerveaux d’une répugnante inefficacité : « ricane-t-il ». Ignoble rictus réservé aux pervers manipulateurs ou aux farauds moqueurs…

Ah cet insolent Taddeï : « Ça excite les autres, qui lui cherchent un camp. » !

Mais ça excite qui au juste ? Elle ? Car le spectateur se contre fou du camp de Taddeï. D’ailleurs depuis quand exactement le journaliste doit avoir un camp ?

Et là on atteint le paroxysme de l’insensé.

Perrignon écrit : « L’animateur défend, comme à son habitude, la liberté de parole ». Pourquoi ce « comme à son habitude » disqualifiant ? Ne devrait-ce pas être la partie non négociable de tout journaliste ? N’est-ce pas le principe fondateur de cette profession ? Comprend-elle seulement la mission difficile de Reporters sans Frontières à travers le monde et plus particulièrement maintenant ?

Elle reproche à Taddeï de faire son boulot correctement en somme. Une aberration qui trouve écho dans un journal traditionnel à grand tirage, qui en dit long sur l’effondrement des valeurs que ces professionnels sont censés défendre.

Il est reproché à Taddeï ses invités. Au lieu de s’attaquer aux invités, elle s’attaque au medium. Sous couvert de la liberté d’expression Taddeï rechercherait la couverture médiatique : « Ça fait du buzz. Il ne s’est pas trompé d’époque ».

Le déballage cuistre de la journaliste, lui, n’est pas « mainstream » peut-être ? Tirer sur un homme à terre n’a jamais ouvert les portes de l’Académie encore moins celles du Panthéon. Car Taddeï, depuis qu’il a invité l’impensable n’a pu éviter les remontrances, elles viennent de lui coûter son émission.

Voir un psy est pour la journaliste l’ultime indicateur de possession d’une conscience, d’un équilibre et de n’être plus suspect.

Ne pas en voir un en revanche…« D’où lui viennent ses tripes froides ? Aucun psy ne lui posera sérieusement la question, il n’en voit pas ». Taddeï t’es un sombre connard, tu ne vois pas de psy !

« Il est devenu le miroir concave des débats français en pleine dislocation. ». S’il en est le miroir, pourquoi notre journaliste n’attaque-t-elle pas tous les autres journalistes de sa courageuse verve ? Peut-être parce qu’il n’y en a pas d’autres, et que Taddeï n’est le miroir de rien sinon d’un débat qui n’existe plus. Elle aurait bien du mal à se battre contre ces chimères depuis longtemps disparues.

« Et si certains invités refusent de se serrer la main en coulisses, on s’invective rarement sur le plateau. » Taddeï, sur ton plateau les invités ne s’entre déchiquètent pas, tu devrais avoir honte ! Nous voulons du sang et des larmes. Au contraire tes invités font preuves de retenue et de lâcheté. C’est de ta faute s’ils se haïssent en privé mais n’ont pas le courage de le montrer au petit écran. Tu biaises le débat en tenant ton émission. Lâches les fauves, laisses les se dévorer, du panache bordel ! On est là pour les jeux pas pour le pain…

Un papier incroyable au sens littéral du terme dans lequel la journaliste ne rougit pas de sa subjectivité, répand en place public les ressorts qui visent à déconstruire son opposant. Il est inquiétant de voir un article si froidement exposer les dérives de ce qu’il prétend justement combattre. Plus aucune subtilité du journaliste exposant ses arguments, plus aucune gêne de démontrer en Une que l’on est contre le débat.

Un papier qui s’attaque au contenant plutôt qu’au contenu. Puisqu’il est reproché au seul journaliste du PAF qui fait correctement son travail de le faire, quelle est la prochaine étape ? A qui Madame Perrigon va-t-elle s’attaquer ensuite ?

On peut douter qu’elle s’en prenne à ceux qui faillissent à leurs devoirs, une autoanalyse est fortement déconseillée par Freud.

En fin de compte la journaliste, en condamnant Taddeï pour son manque de convictions, nous montre qu’elle n’en est pas dépourvue de son côté quand elle conclue son délit par un Oh combien courageux : « A suivre donc. »

L’objet :

http://www.lemonde.fr/actualite-medias/article/2013/11/08/frederic-taddei-l-homme-sans-convictions_3509637_3236.html

Voici "L’homme sans convictions" : http://www.dailymotion.com/video/xrpk9u_interview-de-frederic-taddei-le-21-juin-2012-l-integrale_news


Lire l'article complet, et les commentaires