Les familles des victimes …

par C’est Nabum
jeudi 26 mars 2015

Quand la dignité s'écrase aussi en plein vol

Leur drame fait de vous des charognards !

Une nouvelle catastrophe, et le grand cirque médiatique se met en branle dans l'instant. Le manège est parfaitement réglé et rien ne peut désormais prendre de court nos champions de l'indécence en boucle. Il n'est d'ailleurs plus temps de s'indigner ou de s'étonner : tout ceci est entré dans les mœurs, si on peut qualifier ainsi ce déballage insane.

Cette fois, les procédures habituelles ne sont pas opérantes. Les malheureux ont eu l'indélicatesse de s'écraser dans une zone inaccessible. Le regard insidieux ne va pas pouvoir se déplacer aisément. Il va falloir trouver autre chose pour occuper les heures d'antenne ou bien de radio. Qu'importe, nos joyeux drilles du malheur des autres ne sont jamais en reste.

Après le ballet des experts qui ont échafaudé toutes les hypothèses possibles, les supputations acceptables, les extrapolations farfelues ou pas, il faut encore, pour satisfaire à l'heure nauséeuse de ces temps immondes, laisser la parole aux auditeurs et spectateurs qui y vont de leurs scenarii personnels. Tout est bon pour que les éditions spéciales se gonflent à satiété

Il y a bien sûr la parade des politiques. Ils leur faut aller sur place, faire des effets de manche, avoir de la compassion à revendre, des figures d'enterrement et des mots qui resteront dans l'histoire. Le bénéfice est tel sur l'image de marque que nul désormais ne songe à mettre un peu de distance à l'exploitation du drame. Personne n'enquêtera jamais sur les perturbations et les inconvénients que peut imposer aux équipes de secours la survenue intempestive de trois chefs d 'état en goguette.

J'allais oublier le feuilleton des boîtes noires qui en font dire de toutes les couleurs à tous les spécialistes qui se découvrent des talents de scénariste. Attendre les premiers résultats, les premières conclusions n'est plus possible. D'ailleurs, quand elles arriveront, elles seront repoussées par d'autres évènements plus urgents. L'information ne doit se vivre qu'en direct : c'est la loi de cette société infâme.

Je me refuse, quant à moi, à regarder la moindre image quand le fait est annoncé. J'ai fait le choix de rester humain quand tous ces professionnels du sang et des larmes ne souhaitent que faire de nous des charognards, repus d'horreur et d'émotion. Je plains sincèrement ceux qui ont succombé à cette terrible régression ; la compassion n'a pas besoin d'images pour s'exercer quand on a un cœur.

Mais revenons à notre drame présent. Il a mis en lumière une nouvelle catégorie qui, jusque là, avait été négligée. C'est le contexte qui a imposé ce nouveau rôle. La montagne refusant de se laisser filmer, aux navettes macabres des hélicoptères il a fallu ajouter un soupçon de sensibilité, une dose d'émotion et de belles histoires larmoyantes. Cette fois, ce sont les familles des victimes qui ont hérité du regard impudique des œilletons de la honte.

Elles sont attendues, elles sont en route, elles seront reçues par des familles grâce un élan de solidarité, elles seront encadrées par une armée de psychologues, elles sont sous le feu des projecteurs … « Bien sûr, nous respecterons leur deuil et leur intimité » soufflent quelques journalistes qui se rendent compte de leur ignominie. Puis, le petit sentiment de gêne évacué, il faut bien continuer à traquer le malheur des autres …

Je n'espère plus que tous ces professionnels de l'exposition médiatique puissent modifier leurs pratiques. Il est désormais trop tard pour espérer d'eux le moindre sentiment. Mais que diable ! c'est bien à cause de nous, en notre nom, prétendument pour satisfaire notre curiosité et notre droit de savoir qu'ils se conduisent ainsi … C'est bien la plus terrible des explications.

Cessez donc de vous conduire ainsi, je vous en supplie. Repoussez ce désir insupportable de voir pour croire, de regarder pour partager, de réagir pour compatir, … Ne tombez pas dans le piège ignoble que vous tendent ces caméras et ces micros. Et surtout, laissez ces pauvres gens à leur immense chagrin sans avoir cette volonté inhumaine de les suivre à la trace. Je pense que vous valez beaucoup mieux que veulent nous le laisser croire les journalistes de l'effroi !

Ontologiquement vôtre.


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