Les gilets jaunes : des média toujours plus foulards rouges

par Laurent Herblay
vendredi 8 mars 2019

Depuis le début, la couverture médiatique du mouvement des Gilets Jaunes est profondément biaisée. En remettant en cause un pouvoir et une idéologie que la plupart des média défendent, nos révolutionnaires du 21ème siècle commettent probablement un crime de lèse-majesté. Après quelques semaines à se chercher, la machine médiatique fait feu de tout bois pour défendre Macron.

 

Ignorer, minorer, amalgamer et caricaturer
 
Nous sommes aujourd’hui dans le quatrième temps médiatique du traitement des Gilets Jaunes. Au début, totalement déstabilisés par cette révolte moderne de la France périphérique, le sujet saturait les ondes, d’une manière relativement neutre, si ce n’est la reprise de l’intox du ministre de l’intérieur qui disait y voir la main de l’extrême-droite, alors que les actes de dégradation semblaient bien plus venir de l’autre côté du spectre politique. Puis, la fin de l’année approchant, ces éditorialistes voulaient siffler la fin du mouvement. Sa poursuite en janvier créa une nouvelle stupeur où les Gilets Jaunes reprirent le dessus médiatique du fait de leur persistance, très majoritairement non violente.
 
Mais depuis que l’idole présidentielle a lancé son pseudo grand débat, la grande majorité des médias est revenue à une position de défense du pouvoir, dont on se demande si elle est vraiment moins caricaturale que ce qui se passe en régime autoritaire… Passons sur l’extase ridicule provoquée par les marathons bavards du président retransmis en direct sur les chaines d’information, dont l’intérêt se traduit par le niveau des audiences. Mais toute une mécanique assez troublante s’est mise en place depuis quelques semaines. D’abord, les différents actes sont souvent rétrogradés à une portion congrue dans les journaux, alors même que le fait que le mouvement se poursuive est exceptionnel.
 
 
Ensuite, il est tout de même permis de douter des chiffres officiels de participation, les images semblant indiquer une mobilisation plus forte. Des décomptes peu suspects de sympathie jaune évoquaient d’ailleurs plus de 100 000 participants il y a un mois, près de trois fois les faibles recensements officiels. Plus choquant encore, les amalgames effarants réalisés sur la base de quelques casseurs ou provocateurs extrémistes, dénoncés par Michel Onfray dans un bon papier : les gilets jaunes seraient antisémites, et d’extrême-droite. Manque de chance, les insultes contre Finkielkraut venait d’un islamiste, et sa victime a pris soin d’exonérer les Gilets Jaunes de responsabilité ici…
 
Mais ce n’est pas tout, le mouvement est incriminé pour un accident routier, ou pour les pertes qu’il font subir à l’économie, sans même mise en perspective avec l’importance qu’a le droit de manifester dans une démocratie. Pour couronner le tout, la propagande macroniste tourne à plein, entre glorification de la prime dite Macronet traitement ubuesque des évolutions sondagières, une hausse d’un point de confiance, dans la marge d’erreur des instituts, étant traitée comme une « remontée ». De même, sa popularité est qualifiée de stable quand plus de 70% de la population continue à ne pas lui faire confiance. Un internaute a bien vu de dire plutôt que « son impopularité reste stable »…
 
Pour finir, il y a cette petite musique révoltante consistant à dire que les positions des Gilets Jaunes seraient incompréhensibles, alors que leur demande est claire : plus de justice sociale et fiscale, notamment pour les territoires périphériques. Il est bien normal que le mouvement se poursuive quand le pouvoir fait preuve d’une telle mauvaise foi alors même qu’il prétend organiser un débat, qui n’est en réalité qu’une campagne. Et que dire de ceux qui caricaturent les propositions des Gilets Jaunes. Nulle volonté de baisse générale des impôts, mais volonté de faire payer leur juste part aux plus riches et aux multinationales au lieu de toujours leur demander moins, au détriment de tous les autres
 
 
Après, certains média se demandent pourquoi ils n’ont pas bonne presse dans les manifestations de Gilets Jaunes… Le traitement du mouvement depuis un mois est devenu extraordinairement biaisé et malveillant. Bien sûr, pour l’instant, le chouchou des média s’en sort, dans une configuration politique qui lui va. Mais il ne faut pas croire que cette situation soit autre chose qu’un château de cartes…

Lire l'article complet, et les commentaires