Les WC sont au fond du 5e couloir.

par Guillaume Buffet
mardi 27 mars 2007

Les rencontres du 5e pouvoir, samedi 24, ont ouvert des perspectives extraordinaires pour notre démocratie. Elle ont aussi démontré que tout ceci pouvait se transformer assez vite en un vide total. Quelques petites réflexions pour que le 5e pouvoir ne soit pas une impasse.

Petit détour par la littérature (!)
Suite à la rencontre avec un bug, le petit Peter vient de se découvrir une formidable capacité à lancer sa Toile partout. Très égocentrique dans un premier temps, il ne pense qu’à en profiter pour draguer sa voisine (ouah, quel nul). Alors qu’il rencontre un rapide succès qu’il arrive à monnayer (chichement, si la Toile permettait de gagner beaucoup ça se saurait), un vilain pirate vient piquer dans la caisse. Tout à son nombril, Peter laisse le pirate s’échapper alors qu’il pouvait - fastoche - lui péter la gueule pour rendre l’argent à son marchand de liens (sponsorisés ?) et autres combats truqués. Quel con, alors que son oncle Ben venait de le mettre en garde : "With great power comes great responsibility". Il ne peut pas écouter un peu son oncle, non ? Et paf, ça ne manque pas, l’affreux pirate va justement buter le tonton qui passait par là.

Peter se sent super mal, on le comprend.
Il est super énervé. On le serait à moins.
Il va péter la gueule du pirate (ça soulage). Lequel pirate a la politesse de s’éclater la tronche sur le trottoir en tombant du 5e étage tout seul comme un grand.

La morale est sauve.

Et vous, blogueurs, vous continuez à ne pas écouter tonton Ben. C’est fou ça.

With great power comes great responsibility

Il vous dit.

Le point de vue de Shimon Peres
Je vois que ce grand moment de littérature (pour les incultes qui ne l’auraient pas reconnu, cette scène n’est issue ni de Phèdre ni de Candide, mais "un monument du cinquième art de la fin du vingtième siècle" : Spiderman 1 - désolé j’aurais bien aimé que ce soit issu de Spiderman 2.0, quand je prends le pouvoir sur la Toile, mais c’est pas vrai), je vois donc que ce monument vous laisse de glace. Trop intello, trop compliqué, certainement.

Alors j’ai demandé à un petit gars du quartier de vous proposer une version plus accessible. Il s’appelle Shimon. Pas la copine à Guy Lux dans Intervilles, je précise. Non, non, un moins connu chez nous mais pas mal quand-même. Il s’appelle Shimon Peres celui-là. Tout plein de décorations. Prix Nobel de la Paix à ce qu’il paraît. Ancien Premier ministre. Un mec bien quoi.
Eh bien Shimon, je suis sûr que lui il a vu Spiderman.
Quand il est venu au Web 3 - comme quoi, vous voyez c’est une vraie star - il a dit : "The World is pregnant". It will give birth to a new World. And, you bloggers, you have great responsabities.

Voui. Il l’a dit. En plus il a donné le mode d’emploi, lui contrairement à tonton Ben qui se contente de sortir des grandes phrases à la con.

M. Peres a expliqué qu’Internet allait faciliter la diffusion de la culture et des technologies. Que, grâce à elles, les projets d’entreprises privées seraient beaucoup plus faciles à réaliser partout dans la planète. Que ces projets d’entreprise allaient apporter du développement et de la richesse. Qu’ils seraient donc une solution à la misère et aux guerres de la planète.
Car pour Shimon Peres, l’entreprise privée est la meilleure arme contre les guerres. Il estime que si les jeunes Palestiniens, Israéliens et Jordaniens avaient les moyens de développer des projets d’entreprises privées, ils trouveraient immédiatement les moyens d’une paix durable.

"les rencontres du 5e pouvoir" : éviter l’impasse
Savoir si le 5e pouvoir existe n’est pas tellement la question. Qu’il soit un pouvoir, un antipouvoir, un contre-pouvoir ou un méta-pouvoir, on s’en cogne grave. Ce qui est certain c’est que ceux qui, grâce à leur talent de journaliste citoyen* - ou de commentateurs - savent se créer une audience, bref que toute la communauté Agoravox a une grande responsabilité.
La responsabilité de faire que les sujets lourds, importants, vitaux qui sont traités ici comme ailleurs ne perdent pas tout leur intérêt à cause de nombrilismes exacerbés, d’égocentrisme surdimensionnés, de luttes de clochers radicalisées (poil au nez).
J’ai retenu de cette journée que le fond d’Agoravox est salué par la plupart comme un nouveau souffle démocratique. Mais que la forme, violence des propos, complexité des échanges, pauvreté de beaucoup, fait perdre énormément à l’ensemble.
Animer cette journée a été pour moi passionnant. Et difficile. J’imagine à quel point le même travail est fascinant - et désespérant - pour Joël, Carlo et le comité éditorial d’Agoravox. Entre rédacteurs et commentateurs, responsabilisons-nous pour remercier Agoravox de nous donner cette possibilité d’expression. Pour lui permettre de se développer. Pour continuer à constituer ce 5e pouvoir qui lutte pour plus de démocratie dont nous avons besoin. En respectant les points de vue.

Je n’ai pas la clef, mais...

Sans avoir la solution, je constate en effet que pour un article passionnant, on retrouve des centaines de commentaires inutiles à la conversation. Que ceux qui écrivent ces commentaires le savent. Qu’ils polluent donc volontairement les débats et dégradent donc la qualité d’Agoravox. Posez-vous donc la question systématiquement : mon commentaire est-il directement lié au sujet de l’article ? Apporte-t il une valeur ajoutée ? Permet-il de faire avancer ce débat ?
En ce qui me concerne, je n’écris QUE sur des sujets pour lesquels je m’estime légitime. Je ne commente que si j’estime avoir la légitimité pour le faire et que mon expérience fait avancer le débat. Je vous soumets mes choix. Je suis ouvert à vos commentaires.

* C’est Thomas Blard qui l’a dit samedi : c’est le talent qui fait le journaliste...

N.B. L’ensemble des autres compte-rendu de cette journée sont disponibles à partir de cet article de Carlo Revelli.


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