Liberté sans frontière ?

par Gérard Ayache
jeudi 5 octobre 2006

 

Robert Redeker est ce professeur de philosophie qui se crut libre d’écrire dans Le Figaro une tribune bien nommée « libre » sur l’attitude du monde dit « libre » face aux provocations islamistes. Certain de la protection démocratique de sa liberté d’expression, inscrite dans le marbre des textes constitutionnels de notre République, le malheureux professeur avait tout simplement oublié qu’il vivait à l’ère de l’hypermonde sans frontières. Et que sa liberté fondamentale allait entrer en collision, à la vitesse d’un clic de souris, avec un autre monde que le sien, une autre civilisation, une autre culture, une autre morale. D’autres sensibilités exacerbées, si ce n’est manipulées.

Et voilà notre bon professeur menacé de mort par les pères de la vertu islamiste, objet d’une fatwa vengeresse, contraint de fuir et de se cacher, lui et toute sa famille, protégé par quelques policiers et par le tollé frileux de l’intelligentsia française et la montée au créneau de circonstance des politiques embarrassés.

Quasi simultanément, les représentations de l’Idoménée de Mozart sont annulées au Deutsche Oper de Berlin. Le metteur en scène, M. Neuenfels, s’était cru libre de libertés avec Jésus, Bouddha et, malheureusement pour lui, Mahomet. Certes, on ne coupa pas la tête du téméraire metteur en scène, mais on lui coupa la chique.

Ces deux exemples nous interrogent sur le sort de la sacro-sainte liberté d’expression dans un monde sans frontière, baigné des flux de l’hyper-information. Cette liberté est inscrite dans la loi, mais les lois sont celles des États, et les États sont dilués dans l’hypermonde souverain.

La liberté d’expression est-elle, elle aussi, diluée, désintégrée dans le chaos des multiples espaces du monde ? Sommes-nous dorénavant condamnés à écrire, mettre en scène, en bref, créer, avec toute la menace du monde posée au-dessus de nos têtes, comme une immense épée de Damoclès ?

Ou sommes-nous tout simplement en train de vivre un des plus récents avatars du terrorisme hypermondial qui vise désormais les plis de notre intelligence ? Qui nourrit insidieusement nos peurs et nos (mauvaises) consciences ? Sommes-nous ainsi entrés subrepticement dans la guerre de la passion contre la raison, de la violence contre l’idée, de la bêtise contre la pensée ? De la lumière contre la nuit ?


Lire l'article complet, et les commentaires