Marianne se fout de notre gueule

par Sergio L.
lundi 14 mars 2011

La contre-leçon de journalisme de Maurice Szafran et Nicolas Domenach chez Laurent Ruquier.

Lorsque Maurice Szafran et son comparse Nicolas Domenach ont débarqué sur le plateau d’On n’est pas couché, c’était déjà mal embringué : Zemmour, rougissant, avait coquettement avoué qu’il était « toujours content de retrouver Domenach ». Mais ceci n’est que bagatelle et vétille comparé aux développements ultérieurs de nos deux respectables journalistes lors de leur passage dans le désormais fameux fauteuil de Ruquier.

Car détrompez-vous, malgré un sous-titre racoleur destiné à attirer le chaland gauchiste « Ce que Sarkozy n’aurait jamais dû nous dire », n’est pas le brûlot anti-sarkozyste qu’on pourrait attendre de journalistes dits « de gauche », non, il s’agit en réalité du compte-rendu de deux décennies de pantalonnade de trois quinqua assoiffés de pouvoir et de célébrité. Rivalités, hypocrisie, conflits agrémentés de « tu me casses les couilles » (Nicolas D. à Nicolas S.), parce que ça fait viril, et ego surdimensionné «  tu sais bien que je suis le meilleur d’entre eux [les hommes politiques] » (Nicolas S. à Szafran), et enfin, réconciliation entre hommes toute en émotion retenue, bref, tout y est.

Tout y est pour nous faire détester cette caste de journalistes qui croient -et disent- que petit-déjeuner chez Martin Bouygues relève du « journalisme de terrain » et non de connivence scandaleuse avec le pouvoir politique et économique

Tout y est pour décrédibiliser Marianne, qui se revendique chaque semaine, à coup de unes agressives et parfois diffamatoires à l’égard des hommes politiques (M Besson, Kouchner et Sarkozy vous en parleront mieux que moi), comme le seul organe de presse magazine « de gauche ». Quels dirigeants réellement de gauche iraient mettre sur la place publique leur familiarité avec un président de droite, leurs invitations régulières à déjeuner, et surtout, un livre dont la principale révélation est que Sarkozy aurait un « comportement brutal » vis-à-vis de ses collaborateurs, ô surprise. Fallait-il vraiment être à tu et à toi avec Nicolas Sarkozy pour en arriver à cette conclusion ? Rien n’est moins sûr.

Tout y est également pour mettre en lumière le fait que Domenach et Szafran n’ont pas l’ombre d’une conviction politique, juste un amour démesuré pour eux-mêmes et leur image de journalistes admis dans les cercles des puissants. D’autre part, leurs dizaines d’années de travail en tandem semblent les avoir unis dans une seule et unique entité arrogante, leur enlevant ainsi tout sens critique l’un envers l’autre, tel un symétrique journalistique des frères Bogdanov.

Les deux compères avouent, dans un accès de franchise euphémique, qu’ils ont « pu être proches de Sarkozy »[1]. C’est un début, mais ce n’est pas suffisant pour combler le fossé – si cher à Marianne – entre les dirigeants de ce magazine et ses lecteurs, dont je fais partie, et qui pensent à raison que Marianne se fout de leur gueule.


[1] JDD du 11 mars 2011

 

Maurice Szafran et Nicolas Domenach dans On n'est pas couché le 12 mars 2011


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