Monique Pinçon-Charlot : quand le pseudo service public est partial, fermé et brutal
par Laurent Herblay
samedi 6 avril 2019
C’est un papier d’Acrimed qui m’a alerté sur l’incroyable interview de Monique Pinçon-Charlot sur le plateau de C l’hebdo, émission qui s’était déjà illustrée par le traitement assez biaisé du débat sur le hijab de Décathlon entre Zineb El Rhazoui et Aurélien Taché il y a un mois. Derrière une forme assez douce, la prise de recul sur les mécanismes de cette émission est profondément révoltante.
Les chiens de garde de l’oligolibéralisme
Bien sûr, il faut veiller aux généralisations abusives. Après tout, Ismaël Emelien en a fait la douloureuse expérience la semaine dernière sur le plateau de l’émission pourtant politiquement correcte C’est à Vous, de la même chaine. Patrick Cohen l’a placé face à ses contradictions fermement, démontrant qu’il n’est pas un défenseur sans nuance du macronisme. Mais si parfois le dit service public fait un bon travail, comme le fait Elise Lucet en général, trop souvent, les journalistes du service public se font, consciemment ou pas, les ayatollah de la pensée dominante oligolibérale, défendant de facto les 1% contre les 99% ou des visions contraires à notre société, comme le communautarisme.
La réception de Monique Pinçon-Charlot sur le plateau de C l’hebdo est probablement un des cas les plus emblématiques. A priori, la thèse de la sociologue, « Macron, président des ultra-riches » ne prête guère à la polémique. Même le Monde, pourtant grand défenseur de la majorité actuelle, doit bien reconnaître, au regard de l’impact des mesures fiscales du gouvernement sur les ménages, que sa politique favorise outrageusement les ultra-riches. En effet, selon l’institut des finances publiques, les 1% des ménages les plus riches ont gagné près de 6% de pouvoir d’achat, quand les 22% les plus modestes ont perdu jusqu’à 1% de pouvoir d’achat, les classes moyennes gagnant 1%.
Il eut été intéressant d’inviter un économiste, qui aurait pu compléter les propos de la sociologue qui a consacré sa vie à étudier les plus riches et qui est stupéfaite de constater que Macron va bien plus loin encore que Sarkozy, notamment avec la flat tax sur les revenus du capital, qui ramène à 12,8% l’imposition de ces revenus (le 30% comprend les prélèvements sociaux), un taux dérisoire par rapport à l’imposition des revenus. Mais non, la meute de 5 contradicteurs et l’arbitre partial ont construit une défense de Macron en expurgeant du débat les éléments gênants pour se concentrer sur quelques éléments de défense bien choisis pour redorer l’image du monarque présidentiel.
D’abord, le fait qu’il a réussi des concours anonymes et son ascension hors parti, pour contre-carrer le fait qu’il serait le candidat du système. Une défense un peu dérisoire pour l’ancien conseiller des deux précédents présidents, ancien ministre, et largement appuyé par une partie des médias. Ensuite, une volée de bois vert à Monique Pinçon-Charlot pour avoir dit qu’il était le « candidat de la banque », en affirmant que cela nourrit les théories du complot, alors même que la sociologue souligne qu’elle est parle du capitalisme financier en général. Bref, l’émission donnait l’impression d’être un procès aux relents totalitaires, totalement inégal, à 6 contre 1, laissant bien peu de temps à la sociologue…
Merci à Acrimed pour ce joli décryptage de cette forfaiture de service public, une véritable honte journaliste d’autant plus choquante que le sujet ne devrait pas porter à polémique. Quelle misère de voir une telle émission aussi caricaturalement biaisée ! La liberté dont se prévalent ces journalistes serait plus crédible s’ils ne versaient pas si facilement dans la défense de Macron.