Ne pas consommer trop chaud !

par T. Albert Gamotte
vendredi 27 mars 2009

L’info est une cuisine subtile qui se goûte à bonne température, qui faut mâcher longuement, avaler lentement, et dont il convient de donner son avis qu’après une digestion totale... les épices ayant souvent un effet différé...

Trop chaude, nous ne pouvons goûter la sauce. Il faut la laisser un peu tiédir afin qu’elle révèle ses arômes. Il en est de même avec l’info.
 
Nous sélectionnons et entendons les info avec les oreilles de nos opinions. Nous sélectionnons les mots et les tournures de phrases avec les filtres de nos croyances. Or nos opinions et nos croyances ne sont pas « raisonnables ». Ce sont des affects, comme les autres.
 
Les idéologies auxquelles nous adhérons ne sont que rarement les fruits élaborés d’une réflexion profonde. Un peu de psychosociologie et l’école de Palo Alto nous montrent que nous avons une image de nous, construite au long de l’enfance et de l’adolescence et que les idéologies que nous « choisissons » sont en congruence avec cette image que nous nous donnons à voir et donnons à voir aux autres.
 
Cette base détermine une bonne partie de nos goûts, de nos attitudes vestimentaires, de notre styles. Bref, l’habit ne fait pas le moine mais il est issu de sa pensée profonde, il signale son identité choisie.
 
C’est donc au travers de ce que nous croyons être que nous filtrons notre vision du monde…
 
En voulez-vous un exemple récent ?
 
L’info est tombée, brutale : « le Pape a dit…..préservatif…. » et là, à partir de ces simples mots, notre opinion-filtre prend le relais : « Quel con ce Pape ! dire qu’il ne faut pas utiliser le préservatif dans un pays africain miné par le SIDA ! » Juste indignation exploitée par la presse qui en fait des tonnes.
 
Avons-nous pris la peine d’écouter ce qu’a dit le Pape ? Non, nous reprenons en cœur les commentaires des commentateurs autorisés qui eux-mêmes reprennent ce que l’opinion publique a envie d’entendre. Car il est de bon ton, surtout en France, de se montrer anti-pape, anti-clérical et anti-religion…
 
Mais qu’a-t-il dit ce pape ? Il a simplement dit que l’on ne pouvait compter sur des distributions de préservatifs pour juguler le SIDA et il nous demande d’examiner notre responsabilité en tant qu’acteurs sexuels. C’est pourtant du bon sens ! Il n’a pas dit qu’il ne faut pas, lorsque l’on veut avoir une vie sexuelle plus large de ne pas prendre les précautions indispensables.
 
Et puis qui cela concerne-t-il ? Cela ne concerne que ceux qui se reconnaissent une identité de « chrétien catholique apostolique d’obédience romaine ». Lorsque le chef de la secte des adorateurs de l’oignon décide qu’il ne faut plus se laver les fesses, pour ma part, je ne me sens pas obligé d’adhérer. Pourquoi les non cathos sont ils offusqués d’un avis qui ne les concerne pas ?
 
Q’en conclure ? Il me semble que cette triste affaire est assez emblématique ce notre façon de traiter l’info, je l’ai dit. Elle révèle nos mécanismes et peut, en cela nous aider à prendre du recul, a moins laisser parler nos affects en la matière. Nous y gagnerons en liberté. Car c’est par les affects et non par la raison que les médias nous manipulent et nous gouvernent. Il sont les meilleurs alliés d’un pouvoir global. Bref, évitons de croire à priori les « on dit qu’il a dit… ».
 
T. Albert Gamotte

Lire l'article complet, et les commentaires