Sarkozy et les connards de journalistes ou l’avénement de l’OTM (Off Techniquement Modifié)

par Bruant
lundi 26 mai 2008

Ici, comme sur d’autres blogs - à tel point que c’est devenu une tarte à la crème 2.0 - on aime parler de la “fin du off“.

Jusqu’au web 2.0, le off se dégustait à l’apéritif dans un entrefilet, ce confidentiel écrit petit, mais chuchoté tout haut et permettait à un journal folklorique satirique comme Le Canard enchaîné de vivre. Et puis le web 2.0 est arrivé, on a vu George Allen traiter un militant adverse de macaque, Ségolène Royal à propos des profs, Alain Duhamel déclarer sa préférence pour Bayrou, Rachida Dati sur… pas mal de choses, Nicolas Sarkozy demander aux pauvres cons de se casser, etc.

Mais le off a connu une nouvelle mutation cette semaine (enfin, n’étant pas omniscient sur la toile, il y a sûrement des précédents me direz-vous).

Vous avez peut-être suivi la controverse (vite réglée) entre la rubrique Téléphone rouge du Nouvel Observateur et le blog Coulisses de Bruxelles de Jean Quatremer, journaliste à Libération : à lire chez Quatremer, épisode 1 et épisode 2.

En gros, Le Nouvel Obs publie dans sa rubrique un off qui rend compte d’une réunion entre Sarko et les journalistes où le président aurait lâché un nom d’oiseau à l’égard de la profession (”connards”). Problème, parmi les journalistes présents, un d’eux, Jean Quatremer donc, tient un blog. Il a donc la possibilité technique de réagir rapidement et personnellement.

Le journaliste de Libération publie alors un long billet détaillé qui brise le off de circonstance pour prouver que l’information du Nouvel Hoax Obs était mensongère. L’administration de la preuve est fouillée : verbatims, photos de la réunion et fines descriptions de la journée. Tout ce qui doit faire la différence entre un bruit de couloir et une information.

Bref : on voit à travers cet exemple que le off sécrète son propre anticorps… et devient le “Off Techniquement Modifié” (OTM).

Et là réside la morale de l’histoire. Techniquement modifié, le off change de statut.

Je m’explique : relayé dans la presse papier, il relève de l’irréfutable : pour des raisons professionnelles (solidarité pro., filtre de la rédaction par exemple), techniques (attendre la prochaine parution, etc.), le off est difficilement réfutable et rarement réfuté dans l’espace public. Le off à la papa emprunte plus à la rumeur qu’au journalisme. Dans ces rubriques, on peut dire tout et son contraire, la vérité est toute relative. Pour pousser la caricature, ces rubriques sont des sortes de no man’s land de l’information. Vrai ou faux, on ne discute pas de la véracité du propos. C’est un espace entre parenthèses.

Le off techniquement modifié a lui au moins le mérite de permettre la confrontation des témoignages et le recoupement des informations décrédibilisant ainsi la mauvaise herbe du ragot.

Voilà une raison pour laquelle, même pour les journalistes, internet a aujourd’hui du bon…


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