Suppression de la publicité sur la télévision publique : un débat peut en cacher un autre

par dominos67
mercredi 27 février 2008

La méthode de Nicolas Sarkozy faite d’annonces chocs est très efficace pour faire parler et créer des polémiques, mais peut parfois cacher les vrais débats : l’exemple du futur de la télévision publique.

Dans sa conférence de presse du 9 janvier 2008, Nicolas Sarkozy déclarait : « Je souhaite que le cahier des charges de la télévision publique soit revu, profondément, et que l’on réfléchisse à la suppression totale de la publicité sur les chaînes publiques qui pourraient être financées par une taxe sur les recettes publicitaires accrue des chaînes privées et par une taxe infinitésimale sur le chiffre d’affaires de nouveaux moyens de communication, comme l’accès à internet ou la téléphonie mobile ».

Depuis bientôt deux mois, tout le monde discute de la deuxième partie de cette phrase, c’est-à-dire le financement de la télévision publique, mais l’idée principale, à mon sens, de la révision du "cahier des charges de la télévision publique" a été totalement "zappé".

Tout cela à cause du style Sarkozy qui ne peut s’empêcher pour lancer une idée de provoquer.

Ainsi, l’idée de revoir le cahier des charges pour introduire plus de "culture" paraît séduisante et, d’ailleurs, l’actuel président de France Télévision Patrick de Carolis mène déjà une politique en ce sens ; le théâtre en direct à la télévision est le meilleur exemple récent. Annoncer simplement une révision du cahier des charges de la télévision aurait donc occasionné quelques débats dans les émissions de Jean-Marc Morandini, mais sans plus.

Mais le président veut marquer son temps avec des décisions qui n’ont pas pu être prises jusqu’à maintenant pour marquer sa "rupture", et il en prend d’autant plus de plaisir que les idées avaient été proposées, mais non réalisées par la gauche en son temps.

On pourrait donc dire que Nicolas Sarkozy a réussi son coup car, presque deux mois plus tard, le sujet est toujours d’actualité (création d’une commission dirigée par Jean-Francois Copé il y a une semaine, nombreux articles de journaux). Malheureusement pour lui, cette "provocation" est en train de se retourner contre lui, un peu comme tout ce qu’il entreprend depuis quelques semaines. Elle est symptomatique de la précipitation des annonces du président (outre la suppression de la publicité, on peut citer la mémoire de la Shoah).

En effet, en ces temps de baisse du pouvoir d’achat, quel était le besoin d’évoquer la suppression de la publicité à la télévision publique que personne ne semble demander et qui est synonyme pour les Français de la création d’une augmentation de la redevance ou de la création d’un nouvel impôt... donc d’une diminution du pouvoir d’achat.

Il se trouve coincé maintenant entre renoncer à sa proposition ou augmenter une taxe. Nous prenons le chemin d’un compromis entre les deux.

En effet, en ce qui concerne le recul sur la proposition initiale, lors de l’investiture de la commission, le président a évoqué la possibilité de supprimer la publicité seulement après 20 heures et, dans une dépêche AFP, on apprend que la ministre de Culture Christine Albanel "a évoqué la possibilité d’un maintien de la publicité sur les écrans des chaînes locales de France 3 et sur les chaînes du Réseau France outre-mer (RFO)". En ce qui concerne l’augmentation d’une taxe, outre la piste évoquée par le président lors de sa conférence de presse, on parle d’un élargissement de l’assiette de la redevance avec l’imposition des résidences secondaires.

Espérons que tous les débats autour du financement serviront vraiment à l’audiovisuel public et que le temps passé (et donc l’argent) n’aura pas seulement servi à changer son financement sans aucun impact sur les programmes. C’est un des problèmes avec Nicolas Sarkozy, la forme est souvent critiquée et donc la polémique cache le débat de fond.

Rendez-vous dans quelques mois pour voir si cette méthode est efficace.


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