17 octobre 1961 : quand la propagande fabrique un « crime d’Etat »

par Catherine Segurane
mardi 18 octobre 2011

Le 17 octobre 1961, à Paris, une manifestation du FLN est durement réprimée et fait des morts. La propagande s'en est emparée, gonflant les chiffres sans limite pour lui donner la dimension tout à fait fallacieuse d'un crime d'Etat, d'un massacre volontaire par la police.

Le 17 octobre 2001, l'indécence fut à son comble : une manifestation se déroula en présence de Bertrand Delanoë et de l'ambassadeur d'Algérie, derrière une banderole portant comme inscription : "Reconnaissance du crime d'Etat". Nous nous permettons de faire observer qu'il n'entre pas dans le rôle d'un ambassadeur de traiter de criminel l'Etat auprès duquel il est accrédité.

François Hollande, lui aussi, s'est vautré dans la repentance pour une commémoration à Asnières.

Nous rappellerons que, sur le terrain de la manifestation du 17 octobre 1961, trois morts en tout et pour tout ont été relevés ( sept en étendant un peu le périmètre). Des enquêtes ont eu lieu : ils ne s'agit pas de meurtres volontaires par des policiers.

En supputant sur les morts différées et sur les cadavres non retrouvés, on peut peut-être augmenter un peu ces chiffres, mais pas dans des limites astronomiques. En tous cas, l'honnèteté intellectuelle devrait obliger à reconnaître que le rattachement d'autres morts à la manifestation est hautement hypothétique.

De plus, les morts en marge de la manifestation pouvaient aussi avoir le FLN pour auteur.

« Il faut reconnaître ce qui s’est produit. Aujourd’hui je le fais en tant que socialiste, ensuite ce sera à la République de dire ce qui s’est passé »

Il a ensuite assisté au dévoilement d’une plaque commémorative sur laquelle il est écrit : « [...] De ce pont, et d’autres ponts de la région parisienne, des manifestants algériens furent jetés dans la Seine le 17 octobre 1961, victimes d’une répression aveugle. A leur mémoire, le 17 octobre 2011 ».

Français ! sachez pour qui vous risquer de voter en 2012 !

L'an dernier, j'avais fait paraître deux articles sur le sujet dans Agoravox :

Le 17 octobre 1961 (première partie - essai de dénombrement des morts)

Le 17 octobre 1961 (deuxième partie - la propagande à l'oeuvre)

Cette année, le Général Maurice Faivre a pris la plume dans un article intitulé La bataille de Paris du 17 octobre 1961. Spécialiste de la guerre d'Algérie, Vice-Président de la Commission française d'histoire militaire (1999), il a été élu par 106 historiens civils et militaires.

Le général Faivre souligne le manque de sérieux de certains historiens particulièrement inflationnistes sur le nombre de morts. Il souligne cruellement comment Benjamin Stora oscille, d'un ouvrage à l'autre, entre les dizaines et les centaines. Et comment d'autres (Einaudi, Paul Thibault, Sylvie Thénault) ont écrit sans avoir accédé aux archives. Il souligne que Jean-Paul Brunet, historien émérite et le seul qui ait eu accès à toutes les archives (police, justice, hopitaux, IML), évalue le nombre de morts à une trentaine. Avant cela, Brunet avait eu l'occasion de souligner que l'historien du dimanche Einaudi (qui n'a pas de diplôme d'histoire) est un admirateur de Mao et de Pol Pot, et un hagiographe du FLN.

Le général Faivre rétablit les choses avec autorité sur plusieurs points :

Sur les violences entre mouvements algériens :

"Ces deux décisions se sont traduites par le massacre en métropole d’au moins 3.957 nord-africains, 150 Européens, 16 militaires, 53 policiers et 48 harkis (le Monde du 20 mars 1962). Ces actions terroristes expliquent, sans les excuser, l’exaspération des policiers et les excès auxquels ils se sont livrés."

Sur le caractère prétendument pacifique de la manifestation du 17 octobre :

 "La Fédération de France ordonnait une manifestationpacifique et obligatoire ; l'obligation se traduisait, selon Mandelkern, par des menaces de mort adressées aux Français-musulmans qui n'obéiraient pas à cet ordre ; quant à la consigne de manifestation pacifique, elle n'a pas empêché la présence de commandos armés qui les premiers ont ouvert le feu. Quant aux manifestants, ils ont observé ensuite la loi du silence, sauf quand il s'agissait d'accuser les forces de l'ordre."

Sur le supposé massacre dans la cour de la Préfecture de police :

"Linda Amiri, ayant eu accès aux archives de la Fédération de France du FLN, dément le massacre dénoncé dans la cour de la Préfecture de Police (ce que confirme Montaner)"

(Note : Linda Amiri est en pourtant général favorable aux thèses du FLN).

Sur les noyades :

"Le problème des noyades dans la Seine est plus difficile à élucider. Une seule noyade a été observée, au pont Saint-Michel. Au total, 34 cadavres ont été retirés de la Seine et des canaux en octobre, qui dans leur grande majorité, selon J.-P. Brunet, ne paraissent pas imputables à la répression de la police ; retenus par les barrages de Suresnes et de Bezons, ils étaient tous conduits à l'IML. Selon les harkis de Paris, les noyades étaient une pratique courante du FLN.

Mandelkern observe que les nombreux cadavres relevés dans la Seine, la Marne et les canaux, ne sont pas tous des victimes des règlements de compte FLN/MNA, et que le contre-terrorisme s'insinue. Les responsabilités sont donc partagées entre des groupes de choc étoffés du FLN-MNA, et des équipes marginales de contre-terroristes."


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