20% des députés Brésiliens soupconnés de corruption

par Alain Rojo
mercredi 2 août 2006

L’opération « Sangsues », montée par la police fédérale Brésilienne, découvre une gigantesque opération de corruption où seraient mêlés 104 des 513 députés de l’assemblée brésilienne.

Une Commission Parlementaire d’Investigation (CPI) enquête sur les résultats de l’opération "Sangsues" montée par la police fédérale brésilienne à la suite de la découverte d’un réseau organisé de vente d’ambulances sur-facturées.

Fondée sur le principe que tout achat pour les municipalités doit faire l’objet d’un appel d’offre, la PLANAM, une entreprise qui fabrique des ambulances, a suggéré à des députés qu’ils pourraient "favoriser" le choix de son entreprise moyennant une sur-facturation de 100% du prix des ambulances, une grande partie de la différence allant dans la poche des députés.

Le dispositif mis en place consistait, pour les députés, à commander des ambulances pour leur circonscription, puis "d’intervenir" auprès des services gérant les appels d’offres pour que la PLANAM soit sélectionnée, même si ils étaient en général 2 fois plus chers que leurs concurrents.

Une fois le contrat passé et payé, le député recevait sa commission, soit directement par virement sur son compte, soit sur celui d’un proche, soit en liquide ou enfin à travers d’avantages matériels (voitures, voyages, etc...).

A partir de plaintes des autres compagnies d’ambulances, les services financiers de la police fédérale ont découvert, tout au long d’une enquête minutieuse de plus d’un an, ce système parfaitement au point.

Le scandale a éclaté quand le directeur de la PLANAM, mis en examen pour corruption active, a accepté, moyennant une réduction de peine, de dévoiler tous les détails sur cette affaire, y compris et surtout le nom de chaque député, avec le détail des sommes reçues.

En tout, 104 députés sont concernés, quasiment tous de l’opposition (à la grande joie du gouvernement dans cette période électorale). Ils ont été décomposés en 4 groupes :

Ceux pour qui les preuves sont formelles, avec paiement des commissions sur leur propre compte bancaire ou celui d’un proche

Ceux pour qui il y a des indices très fort, regroupant les députés payés en liquide.

Ceux cités dans les différentes dépositions des membres de la PLANAM, sans preuves financières, mais avec des avantages matériels.

Enfin, le dernier groupe simplement suspect pour avoir commandé des ambulances qui ont été livrés par la PLANAM, mais sans liaison avérée de corruption (pour l’instant).

Les 3 premiers groupes représentent 90 députés, les 14 restants pouvant éventuellement être disculpés au cour de l’enquête de la CPI.

Plus d’un tiers de ces députés font partis d’un groupe parlementaire "évangéliste", déjà connu pour manipuler des sommes considérables liés (officiellement) aux donations des fidèles, mais dont l’origine et la destination restent très obscures.

Hier, la CPI a augmenté son enquête à 3 ministères du gouvernement actuel (Lula) et de l’ancien (F.H. Cardoso), supposant logiquement que des fonctionnaires et politiques au plus haut niveau devaient être impliqués dans la tâche de faciliter le choix de la PLANAM dans les appels d’offres.

Ce scandale, qui tombe 4 mois avant les élections présidentielles et législatives de novembre 2006, devrait permettre au minimum d’éliminer une partie du coté "noir" de l’assemblée, en rendant pour le moins inéligibles ces députés pendant 5 ans (soit 2 législatures).

Néanmoins, ce scandale montre à quel point la corruption continue à pourrir le Brésil, l’empêchant d’avancer vers ses conquêtes sociales et privilégiant l’intérêt personnel au dépend de celui de l’ensemble du peuple brésilien.


Lire l'article complet, et les commentaires