35 ans de recherche désespérée de politique sociale…
par Laurent Herblay
mardi 10 juillet 2018
Aujourd’hui, notre jupiter de pacotille va confortablement faire son discours de l’Etat de l’Union au lieu de répondre démocratiquement à des journalistes, alors que quelques députés macronistes appellent à un rééquilibrage social. Un appel ridicule à celui qui dénonçait le « pognon dingue » que coûteraient les aides sociales, qui assume complètement l’absence de politique sociale.
Trois décennies et demie de politiques antisociales
Pour qui prend un peu de recul, l’absence de vraies politiques sociales depuis si longtemps est stupéfiante. On pourra objecter qu’il y a eu le RMI, mais le passif de ceux qui l’ont voté est tellement lourd (marché unique européen, libéralisation de la finance et du commerce, franc cher, indépendance de la banque de France), que ce legs paraît bien léger. Puis, le Chirac de la « fracture sociale », s’il fut au début plus généreux sur le SMIC que Hollande, fut l’homme d’un virage austéritaire brutal pour mettre à notre pays les menottes monétaires européennes. Jospin, l’homme des 35 heures qui profitèrent aux cadres, fut l’homme du laisser-faire qui privatisa plus que Juppé et Balladur réunis !
Mais le plus paradoxal est sans doute que les années Hollande et Macron, après dix ans de pouvoir de droite, ont marqué une très forte accélération anti-sociale et oligo-libérale, d’un point de vue fiscal (pour les riches et les entreprises), que législatif (droit du travail). La grande crise financière de 2008 n’a pas permis la moindre prise de conscience, seuls les gros ayant été sauvés, quand les petits ont été abandonnés à leur triste sort. La politique sociale semble être sortie de l’histoire dans tous les pays de l’UE, tant les « modérés » et « la gauche » n’y portent plus la moindre attention, se contentant de défendre une mondialisation à visage un peu moins inhumain, un vœu pieux dans la réalité…
Bref, pas la moindre conquête sociale depuis trois décennies, alors même que le chômage est resté massif, que les inégalités ont explosé, multipliant les sujets où une politique sociale aurait pu être menée. Il y a quelque chose de comique à voir le PS critiquer le caractère antisocial de Macron, après avoir mené une politique économique plus à droite que Sarkozy… Et que dire des marcheurs présidentiels ? On sent bien que leurs déclarations sont purement électoralistes, pour la forme, et pas le fond, pour tenter de donner un peu le change. La seule chose que l’on peut reconnaître à Macron, c’est d’assumer assez largement son programme anti-social et profondément oligarchique.
On atteint un point où le progressisme social est même sorti des média, qui véhiculent très majoritairement l’agenda économique du Medef et des plus riches, comme avec le conflit sur la réforme de la SNCF. Et même si les peuples, par des mécanismes bien décrits par Jacques Généreux, suivent parfois cette voie, on voit tout de même que les braises progressistes et sociales ne sont pas éteintes. Quelques que soient les limites de Mélenchon, il portait ce discours et n’a pas été très loin du second tour. Et les succès de Sanders et Corbyn, qui n’hésitent à tenir un discours très radical par rapport aux standards de leurs pays, montrent que les peuples dits occidentaux attendent autre chose.
Bien sûr, le contexte actuel semble bloqué en France, mais Macron pourrait aussi être le catalyseur d’un vrai changement tant il représente la caricature de tout ce qui ne marche pas depuis si longtemps, notamment économiquement. Et parce que nous avons déjà une droite assez radicale et antisociale au pouvoir, je ne vois pas en quoi un rassemblement plus à droite encore serait la solution.