5ème loi en 7 ans sur l’immigration : ridicule ou danger ?

par cimade63
jeudi 9 septembre 2010

Traduction officielle de la directive européenne relative aux normes et procédures communes applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier dite « Directive de la honte », l’avant-projet de loi « Besson » est le prétexte d’un nouveau durcissement des lois relatives aux étrangers et d’une déclinaison concrète de l’immigration choisie (avec la création d’une « carte bleue européenne »).
 
Après 4 lois en moins de 7 ans, le gouvernement s’apprête à nouveau à restreindre les droits des étrangers sans titres de séjours.
 
En dehors de mesures qui permettent une légère amélioration des droits des travailleurs sans-papiers et de dispositions de lutte contre le travail illégal, ce projet comprend plusieurs mesures particulièrement attentatoires aux droits fondamentaux des étrangers :
 
L’accélération du processus d’éloignement
 
Aujourd’hui, un étranger en situation irrégulière soumis à une mesure d’expulsion – avec une obligation de quitter le territoire (OQTF) – dispose d’un délai de 30 jours pour déposer un recours – suspensif – devant le Tribunal Administratif.
 
Désormais, l’autorité administrative pourra décider qu’il doit repartir « sans délai ». L’étranger n’aura plus que 48 heures, contre un mois actuellement, pour déposer un recours, ce qui empêche la constitution du recours dans des conditions matérielles satisfaisantes.
 
L’allongement de la durée de rétention et l’affaiblissement du rôle du Juge des Libertés et de la Détention (JLD)
 
Ce projet prévoit l’allongement de la durée de rétention dont peut être l’objet un étranger sur décision préfectorale, avant saisine du juge, qui passe de 2 jours à 5 jours.
 
L’intervention du juge judiciaire garant – aux termes de la constitution – des libertés individuelles, est ainsi repoussée. Le JLD ne pourra être saisi que 5 jours après le placement en rétention (contre 2 jours actuellement).
 
L’objectif étant de permettre ainsi au Tribunal Administratif de statuer avant même que le JLD se soit prononcé sur la régularité de la procédure d’interpellation de l’étranger.
 
Le juge pourra en outre prolonger la rétention de 20 jours, au lieu de 15 aujourd’hui. Aux termes de ce nouveau délai, la rétention pourra être prolongée de 20 nouveaux jours.
 
La durée maximale de rétention passe ainsi de 32 jours à 45 jours.
 
La légalisation de l’arbitraire des autorités administratives
 
Le projet prévoit en effet que le JLD sera tenu de prendre en compte « des circonstances particulières liées notamment au placement en rétention d’un nombre important d’étrangers pour l’appréciation des délais relatifs à la notification de la décision, à l’information des droits et à leur prise d’effet ».
 
Ce qui signifie concrètement que cela permettra à l’administration de justifier de retards pris dans la notification aux étrangers de leurs droits.
 
Une telle disposition pourrait ainsi empêcher que les JLD remettent en liberté pour cette raison les étrangers, comme ce fut le cas pour les 123 kurdes découverts en corse le 22 janvier dernier.
 
La création d’une zone d’attente individuelle et itinérante
 
Aux termes de l’avant-projet de loi, l’article L.221-4 du CESEDA stipulera : « Lorsqu’il est manifeste qu’un ou plusieurs étrangers viennent d’arriver à la frontière en dehors d’un point de passage frontalier, la zone d’attente s’étend du lieu de découverte des intéressés jusqu’au point de passage frontalier le plus proche où sont effectués les contrôles ».
 
Cette possibilité offerte à l’administration permet de légitimer la privation immédiate de liberté des personnes, ce qui est le cas en zone d’attente, aujourd’hui réservées aux principales frontières aéroportuaires.
 
L’objectif est d’empêcher les demandeurs d’asile de bénéficier du droit d’être admis au séjour au titre de l’asile par la préfecture, de bénéficier d’une autorisation provisoire de séjour et de solliciter l’asile dans le cadre de la procédure de droit commun auprès de l’OFPRA et ainsi d’accéder, pendant l’examen de la demande, au droit aux conditions matérielles d’accueil décentes (logement dans un CADA ou bénéfice d’un hébergement ou de l’Aide Temporaire
d’Attente).
 

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