Aides sociales, piscine, « lèpre », fête de la musique : Macron en roue libre

par Laurent Herblay
mercredi 27 juin 2018

Après son élection, Sarkozy, sans doute ivre de son succès, s’était un peu trop lâché, sur le fond comme sur la forme, provoquant une rupture durable avec l’opinion, qui a ouvert la voie à Hollande. Déjà, comme ministre, Macron manquait de retenue. Aujourd’hui, malgré des sondages faibles, il continue à se comporter comme bon lui semble, faisant presque de Sarkozy un modèle de retenue

 

Fête de la musique pour la gauche, « pognon dingue  » pour la droite
 
Manque de retenue ne signifie pas absence totale de stratégie de communication. Macron est un calculateur et on peut notamment voir dans la fête extravagante organisée à l’Elysée pour la fête de la musique et la photo du couple Macron avec des danseurs, la stratégie, à plusieurs facettes, de cette « gauche » ultralibérale, qui va de Blair à Trudeau, et pour qui le cool remplace le social. Les apprentis sorciers de l’Elysée espèrent sans doute plaire à la gauche libertaire métropolitaine, d’autant plus que la séquence s’attire les foudres d’une grande partie de la droite. Cela permet d’entretenir le discours sur les « ouverts » et les « fermés », pour tenter d’attirer la droite Juppé-Calmels…
 
Sur les migrants, la ligne de crète est délicate pour Macron qui navigue, en bon fils du roi de la synthèse, sur une position complexe, où il tente de pas totalement désespérer les internationalistes partisans du « laisser-passer » tout en consolidant son ancrage à droite pour asphyxier les Républicains. D’où, après le refus d’accueillir l’Aquarius et quelques mesures très critiquées à gauche, un petit coup de barre dans la direction des internationalistes avec la dénonciation de la « lèpre populiste  ». Il faut reconnaître qu’il y a une forme de cohérence dans cette ligne, que je qualifierais volontiers de ligne The Economist, malgré la synthèse parfois délicate à réaliser, notamment sur la question des migrants.
 
Mais ce qui frappe aussi dans la communication du jupiter élyséen, c’est sa grossierté et son manque de retenue personnelle. Comment ne peut-il pas voir qu’il est délicat de recadrer, justement, un enfant pour l’avoir appelé « Manu », eu égard à la fonction, quelques jours seulement avant d’infliger à la France la vue d’une fête de la musique à l’Elysée que Jack Lang n’aurait pas imaginée ? Comment ne peut-il pas voir qu’il est tout de même délicat de dénoncer le « pognon de dingue  » que coûteraient les aides sociales avant de voir circuler des nouvelles sur les dépenses de vaisselle, et de piscine, de l’Elysée ? Macron incarne jusqu’à la caricature le décalage entre la France d’en haut et celle d’en bas.
 
Et pour couronner le tout, il frappe cette dernière d’ignominie en la disant victime d’une « lèpre populiste » : en clair, il faudrait être malade pour s’opposer véritablement à la ligne qu’il suit. Ce faisant, il montre son côté autoritaire et bien peu démocrate, refusant le débat en qualifiant ces ennemis de « malade ». Et que dire du fait du fait d’adjoindre « populiste » au terme « lèpre » ? Ce peuple qui n’est rien dans le système de valeur de ce banquier d’affaire, que même le milliardaire François Pinault juge trop éloigné des Français, est simplement malade, selon l’auguste sire qui nous gouverne, une Marie-Antoinette pas seulement coupée des réalités, mais également particulièrement méprisante.
 
 
Régis de Castelnau lui a réglé son sort dans un papier enlevé que je vous recommande. Mais en se montrant sans doute encore plus détestable que Nicolas Sarkozy, parce qu’il se croit invincible après avoir tué le PS et affaibli les Républicains, Macron pourrait être bien malgré lui le moteur d’un vrai changement. N’est-il pas le président idéal pour favoriser l’émergence d’une vraie alternative en 2022 ?

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