Attal, Bardella, Mélenchon : stigmatisation et moindre mal

par Laurent Herblay
vendredi 28 juin 2024

Dimanche prochain, au terme d’une campagne ridicule par sa brièveté, nous devrons voter. Un choix devra être fait, en prenant en compte les innombrables faux-semblants des candidats. S’il est clair qu’il faut s’opposer au camp présidentiel et défaire un maximum de ses candidats, notamment les ministres, se pose ensuite la question des candidats qu’il faudrait privilégier dimanche prochain.

 

Mais qui est le moins repoussant ?

Ce qui est assez frappant dans cette campagne, c’est à quel point la stigmatisation des adversaires semble être l’argument numéro un des trois principaux camps. La critique des sortants, en charge depuis 7 ans, est plus que légitime : ils ont un bilan et la configuration politique actuelle est le produit de ce bilan. Que le RN et le NFP les critiquent fortement est parfaitement normal. En revanche, le fait que le camp présidentiel concentre son argumentation sur la critique catastrophiste des deux camps opposés est, a contrario, l’admission d’un bilan trop mauvais pour s’appuyer dessus. Outre l’opposition à la macronie, pourtant issue d’une de ses principales composantes, le NFP s’est largement constituée contre une « extrême-droite » en large partie fantasmée, la seule glue encore efficace pour unir de Poutou à Hollande, en passant par un ancien ministre. Mais, s’il joue lui aussi la carte de la stigmatisation, contre une gauche dont certaines composantes n’ont pas besoin d’être caricaturées, le RN n’est pas le plus excessif ici.

La priorité numéro un pour moi, c’est de faire reculer le plus possible la macronie, et lui ôter toute capacité de se maintenir au pouvoir. Ce président et ses équipes sont toxiques pour notre pays. Outre une personnalité totalement détestable, qui élude les nécessaires débats démocratiques, le bilan est calamiteux : chômage de masse, déficits commerciaux et budgétaires records, gestion calamiteuse de la crise énergétique ou de la hausse de l’inflation, avec les OATi, ou le refus de sortir du mécanisme européen de fixation des prix de l’électricité, des réformes de l’éducation calamiteuses et une poursuite de l’effondrement de la notre système éducatif, une explosion de l’insécurité, un système de santé à court de moyens comme l’indique la remontée de la mortalité infantile, un effacement diplomatique de notre pays par le comportement enfantin et arrogant de notre président. Pour couronner le tout, la macronie, c’est une arrogance maximale, et le recours aux postures les plus grossières pour tenter de se défendre.

Bref, la première priorité pour moi, c’est l’élimination démocratique de tous les élus rattachés, de près ou de le loin, à Macron, qu’ils soient membres de Renaissance ou des partis alliés, ou candidats PS ou LR de circonscriptions où il n’y a aucun candidat de la minorité présidentielle opposé à eux, sans afficher officiellement le soutien du camp du président. En l’absence de candidat défendant le Frexit dans la plupart des circonscriptions, tous ces candidats macronistes, de près ou de loin, doivent être battus. C’est particulièrement vrai pour les figures du camp présidentiel : j’espère que Darmanin, ce ministre de l’intérieur tout aussi autoritaire avec ses opposants, et incapable de faire quoique ce soit contre l’explosion de la violence, mordra la poussière, tout comme Gabriel Attal ou Elisabeth Borne. Et dans leur cas, je ne serais guère regardant à l’égard de leur opposant le mieux placé, du moment qu’il permet de sanctionner cet exécutif détestable de la manière la plus forte et marquante possible.

Bien sûr, il y a des points positifs dans le programme du NFP, qui remet à l’ordre du jour la nécessaire redistribution, l’investissement dans le service public ou la hausse du SMIC. Malheureusement, le NFP pose bien des problèmes. D’abord, le virage fiscal proposé va un peu trop loin pour moi. Et on peut se demander si cela est vraiment réaliste dans une UE sans frontières pour les mouvements de capitaux et les biens. L’argent peut partir facilement, et l’augmentation de la demande provoquée par la hausse des salaires risque de creuser le déficit commercial, en l’absence de politique protectionniste forte ou d’une politique monétaire nationale. Bref, l’appartenance à l’UE est largement contradictoire avec son programme et cela pose d’autant plus problème qu’une large partie du NFP (PS et Verts) est UE-béate et sans doute prête à le sacrifier au nom de l’europe… Comment croire une seconde que le programme du NFP serait mis en place par le parti de Hollande, son candidat en Corrèze ? Il y a un vrai risque qu’après les législatives, les élus du PS finissent par s’allier avec la macronie pour former une grande coalition.

En outre, plusieurs points du programme du NFP posent problème. Comme trop souvent, la question de l’insécurité semble taboue, malgré l’explosion des violences depuis 2017 (+63% de coups et blessures volontaires). De même la politique migratoire est proprement délirante, avec une ouverture plus grande des frontières complètement délétère dans la situation actuelle de chômage de masse, de violence et d’assimilation en panne. Plus globalement, je suis totalement opposé à la créolisation communautariste portée par une grande majorité du NFP. Et pour couronner le tout, comment vouloir prendre le risque de confier à Jean-Luc Mélenchon et ses affidés les clés de Matignon et du gouvernement ? Le comportement du patron de LFI ne donne pas envie de lui donner la moindre responsabilité. Ses nouvelles saillies de la campagne (indulgent avec Hollande, mais pas avec Garrido, Corbières et Simmonet, ou sa sortie affirmant que Panot et Bompard étaient davantage prêts que Blum en 1936, bêtement repris par la première) démontre un problème de comportement pas moins préoccupant qu’avec Macron…

Si Ruffin était le patron du NFP, la question pourrait se poser, mais là, il est en marge. Au premier tour, ma boussole sera l’efficacité contre Macron  : choisir le candidat qui a le plus de chance de mettre en échec la minorité présidentielle. Bien sûr, il faudra choisir un moindre mal, mais la priorité, c’est tourner la page Macron, vite, et fort. Aujourd’hui, le pire c’est lui, et le mettre en échec est ce qui est responsable.


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