Avis de tripatouillages sur les chiffres du chômage

par Laurent Herblay
lundi 3 août 2015

Il y a quelques mois, François Hollande avait décidé de lier son destin à la courbe du chômage, après avoir échoué à la faire reculer comme il avait promis. Curieusement, les méthodes de comptabilisation du nombre de chômeurs sont modifiées en plein cœur de l’été 2015

 
Deux façons de faire baisser les chiffres
 
Les choses sont tout de même extrêmement troublantes, pour de nombreuses raisons. D’abord, même si Pôle Emploi a annoncé ce changement de méthode de manière transparente, il le moment choisi pour le faire est extrêmement suspect : fin juillet, alors que la France est largement en vacances, que les médias rentrent moins facilement dans les sujets de fond. Et cela est assez tôt avant les élections présidentielles pour que l’on ait largement oublié cette modification au moment du vote, au printemps 2017. Mais le choix du moment est également suspect parce qu’il intervient trois ans après l’élection de François Hollande, et que le chômage progresse, contrairement à ses promesses.
 
Et, comme par hasard, alors que le nombre de chômeurs de catégorie A aurait progressé de 11 300 selon l’ancien modèle, il ne progresse que de 1 300 avec la nouvelle façon de compter, à 3,55 millions. Mais que penser des baisses du nombre de chômeurs de moins de 25 ans ou de la baisse de 0,3% du nombre de chômeurs de catégorie B et C (5,4 millions en métropole, 5,7 millions au total). Bref, devant l’échec de son gouvernement dans la lutte contre le chômage, pourtant une de ses priorités, il est difficile de ne pas penser que la majorité a recours à des moyens pas complètement honnêtes pour mettre les statistiques dans une meilleure direction qu’elles n’iraient naturellement, sans artifice.
 
Modifications forcément malhonnêtes ?
 
Dans un long papier intéressant, France Télévisions plaide la cause du gouvernement. Un économiste dit que Pôle Emploi « a un peu mieux rangé sa chambre  ». Après tout, l’administration ne devrait pas s’interdire de remettre à jour ses méthodes pour les améliorer. Dans le détail, selon la journaliste de France TV, « les nouveaux recoupements de données permettent de mieux repérer les personnes en formation, en service civique ou en contrat aidé. Des personnes qui n’ont donc pas besoin de chercher un emploi, et peuvent sortir des catégories A, B et C ». En clair, cela se traduit par une reclassification de personnes comptées comme au chômage alors qu’elles ne devraient pas en faire partie.
 
Présenté comme cela, cela peut sembler plus juste. Au mieux, on peut y voir un moyen d’avoir des chiffres plus fiables. Mais on peut aussi y voir un moyen d’obtenir des résultats plus rapides avec l’augmentation du nombre de contrats aidés décidée par le gouvernement, mais aussi l’opportunité d’avoir un effet plus sûr en cas de nouvelles mesures qui pourraient augmenter les légions de demandeurs d’emploi en formation, au service civique ou en contrat aidé. On peut penser que le gouvernement a des arrières-pensées et qu’il change opportunément les méthodes de classification des demandeurs d’emplois pour maximiser l’impact de mesures déjà prises, ou même de mesures bientôt prises.
 

Mais dans ce nuage de fumée, ce qui ressort surtout, c’est le caractère très suspect de cet ajustement dans la méthode de comptage du nombre de demandeurs d’emplois. Bien sûr, on ne peut pas avoir de certitudes, mais les présomptions de magouilles n’en restent pas moins très fortes.


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