Bayrou, Mélenchon : du courage et du panache en politique

par Henry Moreigne
lundi 11 juin 2012

Etranges élections que ces législatives 2012. Un scrutin sans vie, sans confrontation des idées, où les jeux d'appareils l'emportent sur tout, ne laissant aucune chance aux rares personnalités atypiques qui donnent des couleurs et de l'épaisseur à la vie politique française. On n'est pas obligé de partager leurs idées, mais l'absence de François Bayrou et de Jean-Luc Mélenchon de l'Assemblée nationale sera démocratiquement préjudiciable.

A la mode au plan environnemental, la biodiversité est un concept loin d'être partagé dans le milieu politique. Si les législatives 2012 évitent le phénomène de vague qui permet à n'importe quel âne labellisé par la formation politique en vogue du moment d'être élu, on regrettera que l'hégémonie socialiste d'aujourd'hui conduise à l'éradication politique de Jean-Luc Mélenchon et de François Bayrou, deux hommes politiques cultivés, à la République chevillée au corps.

A juste titre Daniel Cohn-Bendit et différentes personnalités de gauche, dont Pierre Moscovici, avaient appelé la direction du Parti socialiste à ne pas présenter de candidat face à François Bayrou dans la 2e circonscription des Pyrénées-Atlantiques ceci, afin de garantir l'élection de ce dernier à l'Assemblée nationale. Hélas, l'esprit de Voltaire, "Je ne partage pas vos idées mais je me battrai jusqu'à la mort pour que vous puissiez les exprimer" ne souffle guère dans les locaux de Solferino.

Pourtant, François Bayrou et Jean-Luc Mélenchon ont chacun à leur façon une qualité de plus en plus rare en politique : le courage. Le premier l'a démontré en s'affirmant dès 2007 comme un adversaire irrésolu de Nicolas Sarkozy.

Avec intelligence car l'homme de lettres du Béarn ne s'est pas contenté de formules orales à l'emporte-pièce mais a formalisé ses griefs dans un ouvrage au titre parlant, publié en 2009  : "Abus de pouvoir". Avec cohérence et panache pour appeler, contre son camp, à voter François Hollande à la présidentielle. Or c'est bien parce qu'il est un homme de droite lâché par les siens et ignoré des socialistes, que François Bayrou sera battu le 17 juin prochain.

Invité de la matinale de France Inter le 28 mai dernier, François Bayrou s'était épanché sur la posture adoptée par le Parti socialiste pour les élections législatives. "J’ai fait un choix qui a été regardé par tout le monde comme un choix sans précédent. C’est la première fois qu’un responsable politique du centre dit : cette ligne que vous essayez de tracer entre les Français comme un mur infranchissable, cette ligne-là, nous devons la franchir". "J’ai fait un pas, tendu la main au-dessus de cette ligne pour une raison certaine, c’est que nous n’arriverons pas à nous sortir de la crise si nous ne sommes pas en mesure de travailler ensemble entre Français. Si c’est une majorité coupée en deux avec en face, une opposition agressive décidée à la faire perdre, alors c’est le pays qui va s’enfoncer", avait détaillé le leader centriste.

"À ce choix sans précédent dont on voit bien qu’il est difficile, si on ne répond que par du sectarisme, que par les intérêts d’appareil, alors on est sûr que la France ne s’en sortira pas et la majorité actuelle, moins encore", avait prévenu en vain le leader centriste.

Même motif, même punition pour Jean-Luc Mélenchon qui a préféré quitter la douceur du cocon socialiste pour tenter de réveiller une gauche ronronnante. C'est sur le champ d'honneur des idées face à un Front national en pleine ascension que le co-président du Front de Gauche a été défait. Au-delà du coup médiatique consistant à défier Marine Le Pen à Henin-Beaumont il y avait de réelles convictions et un courage physique qu'il convient de saluer.

Le crime du député européen aura été d'avoir cherché à s'emparer de terres appartenant historiquement à une famille socialiste qui se comporte dans cette région, mais aussi ailleurs, en grand propriétaire foncier dans le plus pur style latino-américain.

Bayrou et Mélenchon peuvent partir la tête haute. Ce ne sera pas le cas Martine Aubry qui quittera à l'automne les fonctions de Première secrétaire du PS. Non contente d'y être rentrée par une élection entachée de nombreuses fraudes, elle en sortira par la petite porte. Celle de l'autoritarisme et du sectarisme à l'image de son visage plus souvent fermé qu'ouvert et souriant.


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