Budget, allocations familiales, TGV : les choix révélateurs du gouvernement

par Laurent Herblay
mardi 28 octobre 2014

Depuis le changement de gouvernement, la majorité est rentrée dans une phase hyperactive, où elle multiplie les décisions. Outre le caractère de plus en plus néolibéral de son agenda, on peut aussi y voir la réduction de la politique à de la simple gestion et l’oubli de la défense d’un modèle de société.

Gérer au lieu de diriger
 
Si tout ce qui se passe depuis l’été (ou même depuis le début du mandat) n’est pas sans cohérence d’un point de vue idéologique, il est frappant de constater à quel point le gouvernement semble naviguer à vue, sans jamais sembler capable de voir plus loin que le bout de ses pieds. D’où l’annonce à l’automne 2013 qu’il tiendra les 3% de PIB de déficit budgétaire en 2015, qu’il est obligé, un an après à peine, de repousser de deux ans de plus. Il en va de même dans le bras de fer sur le déficit budgétaire pour 2015. Après avoir indiqué qu’il ne négocierait pas avec la Commission, il a fini par lâcher un peu de lest, sous la forme d’une réduction de 3,6 milliards d’euros du déficit budgétaire.
 
Et cette lutte dérisoire et contre-productive contre les déficits, les mains dans le dos sans l’appui d’une banque centrale, comme à Tokyo, Washington, Londre ou Stockholm, pousse le gouvernement à multiplier les mesurettes destinées à réduire les déficits. On peut penser aux 700 millions que devrait rapporter la réforme des allocations familiales. Incapable de fixer un cap solide qui peut réussir, François Hollande et son équipe se font que réagir, ne cessant d’adapter à la marge le cap politique de la France en fonction des échecs que provoque leur politique, dans une adaptation continue mais dérisoire et superficielle. Nous n’avons plus des dirigeants mais des gestionnaires à la petite semaine.
 
L’oubli complet des principes

L’une des caractéristiques de ce mode de gestion est une incapacité effarante à se poser la question des principes de leurs réformes. On coupe, on rabote, on « réforme » sans sembler se poser la question des implications de ces changements, ce qu’ils représentent par rapport à notre contrat social. Bien sûr, couper 700 millions d’euros d’allocations familiales pour les ménages les plus riches répond sans doute au sacro-saint verdict des sondages d’opinion, mais il s’agit d’un pas de plus vers le démantèlement de notre modèle de protection sociale, un nouveau pas dans la direction du modèle étasunien, où il ne resterait plus qu’un petit filet de protection et où tout serait finalement privatisé.

A ce titre, le dernier rapport de la Cour des Comptes sur le TGV est édifiant. L’immense majorité des médias a repris sans nuance ses conclusions. Certes, il est possible que les comptes soient plombés par des arrêts un peu trop nombreux par rapport à ce que devrait faire le TGV. On peut faire confiance aux élus locaux pour ne pas penser plus loin que les intérêts de leurs édiles, en oubliant ceux de la collectivité plus large… Mais, heureusement, Médiapart rééquilibre quelque peu le paysage. Car après tout, l’objectif de la SNCF n’est pas de maximiser son profit, mais de fournir un service public, dont la logique n’est pas la même. Et on pourrait au contraire questionner les pratiques tarifaires inspirées des compagnies aériennes, qui crée un maquis inégalitaire qui fait de plus en plus du TGV un produit de luxe.
 
En revanche, même si elles contribuent à enfoncer notre pays dans une impasse, ces mesures ont l’intérêt de révéler la vraie nature de ces politiques qui se succèdent depuis des décennies : des gestionnaires à la petite semaine incapable de penser ce que représente le projet d’une vie en société.

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