Candidature Chevènement, la pantalonnade finale

par Olivier Perriet
jeudi 14 décembre 2006

Retour sur une campagne avortée et sur ses précédents. Où l’on voit que le militant de base est loin d’être le mieux informé...

Fin du suspense dimanche 10 décembre, pour le candidat républicain et citoyen qui a annoncé le retrait de sa candidature à la présidentielle ainsi que son ralliement à Ségolène Royal. Il est vrai que loin du démarrage prometteur qui s’était produit en 2001-2002 (le Che tutoyait les 15% d’intentions de vote en janvier 2002), cette campagne avortée a eu un début plus que chaotique.

Après avoir déclaré sa préférence pour le candidat Fabius qui avait courageusement défendu le non au sein du Parti socialiste, Jean-Pierre Chevènement, officiellement, s’interrogeait sur la probabilité de sa candidature en septembre-octobre... alors que le site www.chevenement2007.com était déjà lancé sur la Toile. Finalement, au vu du "manque de clarté" du projet socialiste, il décidait de se lancer dans la course le 6 novembre, non sans évoquer la possibilité d’un "désistement républicain" dès avant le premier tour, au profit du candidat le mieux placé, s’il s’avérait au cours des mois qui allaient suivre que Le Pen risque d’éliminer le candidat de gauche dès le début. Une manière bien étrange d’entrer en campagne en "remuant le couteau dans la plaie", pour le seul candidat promu bouc émissaire de l’éviction de Lionel Jospin du second tour en 2002. Après tout, comme le film de Patrick Rotman l’a rappelé[1], en 1981 Jacques Chirac a bien fait battre Valéry Giscard d’Estaing, pourtant un homme "de son camp", sans aucun état d’âme...

Loin de 2001-2002, cette campagne ne se voulait d’ailleurs plus "au-dessus de la gauche et de la droite" mais résolument à gauche, fidèle en cela à la ligne fixée très arbitrairement par l’ex-candidat dès 2002. Faisant fort peu de cas de l’avis de "la base", Jean-Pierre Chevènement se prononçait, par voie de presse, à la veille des législatives de juin, pour un "ancrage à gauche" du Pôle républicain, la formation provisoire qui a fait le lien entre le MDC[2] et le MRC[3]. Ces gages de bonne volonté ne suffirent de toute façon pas pour sauver les députés MDC/Pôle républicain sortants, dont Chevènement lui-même, que le PS concurrença rageusement dans les circonscriptions.

Démentant avec indignation les rumeurs de retrait imminent et de négociations avec le PS, poursuivant sa campagne sur le terrain (recherche de parrainages, visites...) l’ex-candidat déclarait toutefois lors de son premier meeting de campagne[4] qu’il "ne se présent[ait] pas contre Ségolène Royal". D’abord "parce qu’elle n’était pas encore désignée lorsqu’[il s’était] déclaré". Ensuite parce que la priorité était de battre Sarkozy. Et enfin parce qu’il y avait tout de même certaines convergences entre eux deux, en matière d’ordre, de sécurité notamment. Une entrée en campagne toujours à reculons, comme on le voit.

Cette série de "convergences", dont le dernier acte a été la critique de l’indépendance de la Banque centrale européenne par la candidate socialiste samedi dernier, a donc été entérinée par des accords, où Ségolène Royal et le PS abandonnent entre autres toute velléité d’imposer à la France une nouvelle Constitution européenne[5]. La candidate souhaitant pour sa part "faire une synthèse entre la gauche du oui et celle du non". Incidemment, dix circonscriptions, dont celle de Jean-Pierre Chevènement (Belfort-2) seront privées de candidats PS au profit du MRC.

Alors, évolution réelle, promesses sans lendemain, ou ruse stratégique visant à couper l’herbe sous le pied des partisans du "non de gauche" en ratissant le plus large possible ? À voir.

Pour terminer sur une note d’humour, on peut se demander ce que vont devenir les affiches "Chevènement 2007" qui étaient fin prêtes pour être collées par les militants. Voilà en tout cas une idée de cadeau "série limitée" pour les fêtes de fin d’année. Avis aux amateurs !



[1] "Le Jeune loup" et "Le Vieux lion", diffusés sur France 2 les 23 et 24 octobre.

[2] Mouvement des citoyens, crée après la Guerre du Golfe et sa démission du gouvernement et du Parti socialiste.

[3] Mouvement républicain et citoyen, issu des décombres de l’ancien MDC et des nouveaux ralliés après la campagne de 2002.

[4] Meeting organisé au gymnase Japy, le 28 novembre dernier.

[5] Voir www.chevenement2007.com pour les textes exacts.


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