Ce que signifie l’abandon du Frexit par le FN
par Laurent Herblay
samedi 6 janvier 2018
Depuis toujours, je dénonce le manque de sérieux et de travail de Marine Le Pen et du FN à l’égard des questions économiques, qui me faisait alors douter de sa sincérité dans la défense de certaines idées. Le masque est tombé en 2017 avec l’enterrement précipité de la souveraineté monétaire entre les deux tours de la présidentielle, plus que jamais confirmé cet automne.
Patriotes à éclipse, démagos à plein temps
Pendant six longues années, avec l’aide de Florian Philippot, Marine Le Pen a tenté de défendre un discours progressiste appuyé par un retour plein et entier à la souveraineté nationale, notamment à travers la sortie de la monnaie unique et le retour au franc. Mais faute de convictions et de travail, elle a été totalement incapable de défendre ces idées dans les médias, aboutissant à un bien piteux recul entre les deux tours de l’élection présidentielle, qui ne lui a pourtant pas épargné un débat calamiteux face à Macron, qui était pourtant l’incarnation idéale de tout ce qu’elle combat, le meilleur adversaire qu’elle pouvait trouver face à elle, pas moins superficiel, même si plus sûr de lui.
2017 a marqué un virage pour le FN, et son allié d’entre-deux tours, qui, faute de parvenir à convaincre les français, ont préféré solder leurs idées et renoncer de manière de plus en plus claire au retour à la souveraineté économique. Ils affirmaient alors que « la transition de la monnaie unique à une monnaie commune européenne n’est pas un préalable à toute politique économique ». Depuis, la reculade se poursuit au ralenti, comme un tableau impressionniste, où le retour à la souveraineté se fait tous les jours un peu plus distant, elle qui disait pourtant que 70% de son projet en dépendait en mars… Depuis le départ de Philippot, il n’est plus question que de réforme de l’UE et l’euro…
C’est ainsi que, comme le PS et LR avant elle, elle affirme que « nous sommes résolument européen. Nous devons définir quels mécanismes démocratiques nous permettront de réformer l’Europe ». Et, comme le rapporte David Desgouilles, lors de son passage à l’Emission Politique, elle a défendu une réforme de l’euro, se contentant seulement de ne pas exclure une sortie, réduite à une option de plus en plus hypothétique. Ce faisant, le FN privilégie ses intérêts sur ceux des Français, en voulant devenir le Trump hexagonal, sulfureux, mais pas si différent des autres. Aujourd’hui, le FN ne devient qu’une variante à peine moins politiquement correcte du LR que propose Laurent Wauquiez…
Or, sans mandat clair pour reprendre les rênes du pouvoir, en sortant vite et pleinement de l’UE et de l’euro, le FN serait réduit à une continuité dans bien des domaines. Comment espérer reprendre le contrôle de nos frontières sans sortie du marché unique et de Schengen ? Cette inconstance et ce manque de sérieux sur les moyens pourtant fondamentaux pour mettre en place la partie de son programme sur laquelle le FN est resté constant démontre à nouveau la superficialité de ce parti, qui est décidément le meilleur ennemi des eurolibéraux mondialistes. Le recul devant l’obstacle des sondages en dit long sur les convictions réelles de ces dirigeants qui préfèrent leur confort aux principes.
Cette évolution pousse certains à demander un rapprochement des droites. Après tout, dans l’UE et l’euro, ils pourraient se rejoindre sur le maigre agenda politique qu’ils maîtriseraient pleinement. Mais cela se ferait aussi sans doute sur une ligne plus ultralibérale encore que celle de Macron. Voilà pourquoi je combats totalement un tel projet qui ne ferait qu’empirer la situation sur bien des sujets.