Chasse aux Roms : Sarkozy, applaudi par l’extrême droite italienne, obéit au Front national

par Olivier Bonnet
mardi 24 août 2010

A quand Marine Le Pen au gouvernement ?

Si la surenchère xénophobe actuelle de Sarkozy - avec ses hommes de main du gouvernement, Hortefeux-le-condamné-pour-injures-raciales et Besson-le-traître - déchaîne les critiques de la presse internationale, de l’ONU et de la Commission européenne, il en est qui applaudissent à tout rompre : la Ligue du Nord italienne. Son député Claudio d’Amico a en effet estimé que les actuelles expulsions de Roms étaient la « ligne juste à suivre » et devraient servir d’exemple à l’Italie : « Nous devons intervenir au plus vite, dans la mesure où le risque est que les Roms expulsés de France se dirigent aussitôt vers l’Italie. Il faut donner un signal fort pour éviter que cela se produise. Qu’il soit clair pour tous, Roms et non-Roms, que dans notre pays, ceux qui vivent d’expédients et de violations de la loi ne sont pas tolérés et ne doivent plus remettre les pieds sur notre territoire. » C’est beau comme du Estrosi et son désormais fameux : "Français ou voyou, il faut choisir". Pour bien mesurer la "qualité" de ce soutien à la politique sarkozyste, il faut savoir ce qu’est exactement la Ligue du Nord. Extrait de notre billet du 31 mars dernier, juste après son "triomphe" aux élections régionales, Vent mauvais sur l’Italie, lui-même reprenant en partie un article de 2006 (merci à nos archives !) : "ce n’est pas d’hier que Berlusconi montre sa sympathie envers l’extrême droite. Lorsqu’elle remporte les législatives de 2001, sa coalition s’appuie entre autres sur la Ligue du Nord d’Umberto Bossi, ce dernier étant nommé ministre de la Réforme du premier gouvernement Berlusconi de l’histoire, poste qu’il occupera jusqu’en juillet 2004, lorqu’il est victime d’un accident cardiaque. La Ligue du Nord revendique l’autonomie régionale d’une région mythique baptisée Padanie, pour éviter que ne soient versées des aides au Sud du pays, qualifié de "véritable Tiers-Monde italien". Xénophobe obsédé par l’immigration, Bossi a proposé l’érection d’un mur le long des côtes italiennes, pour empêcher les clandestins d’arriver. Ses troupes en chemises vertes, la "garde nationale padane", diffusent des tracts au contenu sans équivoque : "Usines de la Padanie, n’embauchez pas de Méridionaux". Bossi lui-même vitupère le "nazisme rouge né de l’alliance entre banquiers et francs-maçons [qui] tient l’Europe avec le lobby des gays". Marqué par un nouveau souci de santé, un accident cérébral, il a pourtant fait son retour sur la scène politique à la fin de la campagne, pour tenter d’apporter à Berlusconi les 4% de voix que peut mobiliser la Ligue, ce qui lui vaudrait de conserver des ministères."

 

Parenthèse avant de poursuivre la citation de notre billet d’avril 2006 : notons que les 4% sont aujourd’hui devenus 12,7% ! Où s’arrêtera une formation capable de plus que tripler son score en quatre ans ? En s’alliant à l’extrême droite dès 2001, Berlusconi n’a-t-il pas joué à l’apprenti sorcier ?

"Dans le gouvernement sortant lui appartenaient en effet les portefeuilles du Travail, de la Justice et de la Réforme, du moins jusqu’à la démission du titulaire de ce dernier, Roberto Calderoli. Ce roi de la provocation proposait l’année dernière : "Pour chaque journée de captivité d’un otage italien, il nous faut expulser et renvoyer chez eux mille musulmans vivant en Italie et originaires des États voyous." Le 16 février, un ultime dérapage entraîne son départ du gouvernement : il ouvre sa chemise pendant le "20 heures" de la première chaîne de la RAI pour montrer un tee-shirt qu’il s’est fait confectionner, représentant les fameuses caricatures de Mahomet. Le lendemain, en Lybie, se déroule une violente manifestation devant le consulat d’Italie de Benghazi, qui est incendié, et les affrontements entre protestataires et policiers font onze morts. Berlusconi lui demande sa démission le soir-même et il obtempère le 18 février."

Les sinistres membres de la Ligue du Nord aujourd’hui, qui vont gouverner deux régions italiennes, sont loin de s’être calmés. En témoigne l’opération suivante, à laquelle Celestissima consacrait un billet le 19 mars dernier : "Toujours à l’avant-garde de la xénophobie (et pourtant la concurrence est rude) la Lega Nord a inventé une nouvelle ignominie. Dans la province d’Arezzo, ses militants distribuent aux passants des échantillons de savon liquide en leur recommandant de les utiliser après avoir touché un (ou une) immigré(e). Indigné, à juste titre, Alfio Nicotra, chef de file de la Fédération de gauche et membre de Rifondazione Comunista s’est étonné que Maroni, le ministre de l’Intérieur, n’intervienne pas pour lutter contre cette « apologie du racisme » : « Ce qui se passe dans la Province d’Arezzo est très grave (…) le message délivré est dévastateur : il signifie que, parce qu’ils sont étrangers, des êtres humains sont sales et porteurs de maladies. N’ayant pas la moindre proposition politique pour combattre la crise qui frappe aussi dans notre région et dont le gouvernement Berlusconi est responsable, les dirigeants de la Ligue du Nord, qui appartiennent au gouvernement, préfèrent distraire l’opinion publique en prenant des initiatives répugnantes qui doivent être immédiatement et sans restriction, condamnées par toutes les forces politiques. Qu’attend le ministre de l’Intérieur qui doit appliquer la loi interdisant l’apologie et la diffusion du racisme pour alerter les forces de l’ordre afin de mettre fin à cette honte ?" Un coup d’oeil au journal ou à la propagande électorale de la Ligue du Nord parachève la démonstration : l’extrême droite italienne décomplexée est encore pire que notre Front national !"

Voilà la formation qui plébiscite les expulsions de Roms opérées par le pouvoir sarkozyste ! Ah il y a certes de quoi être "fier d’être Français"...

Marine Le Pen ordonne, Sarkozy le fait

Tiens, justement, qu’en disent ceux qui n’ont que cette devise à la bouche, notre Front national ? Communiqué de Marine Le Pen, 28 juillet : "La réunion consacrée aux nomades à l’Elysée est l’occasion pour un Président de la République en grande difficulté de gonfler les biceps devant les caméras, espérant faire croire aux Français qu’il agit. En réalité, comme d’habitude depuis huit années que Nicolas Sarkozy est en charge de la sécurité, il n’y aura que discours, vagues déclarations d’intention et détermination feinte. Comme sur tous les sujets, aucune action concrète ne suivra et la situation continuera de se dégrader, dans nos villes et nos villages où des centaines de camps illicites perturbent gravement la vie de nos concitoyens. La technique de communication sarkozyste est maintenant bien connue et elle trouve dans la gauche et les associations bobos des complices bien commodes. Les cris d’orfraie de ces « idiots utiles » permettent au gouvernement de faire croire à l’opinion qu’il est sur une ligne dure. Que ces professionnels de l’indignation se rassurent : le gouvernement ne fera strictement rien." Raté, Marine ! Sarkozy, Hortefeux et Besson exaucent en réalité ses désirs : "Marine Le Pen, vice-présidente du Front national, demande à Nicolas Sarkozy de cesser l’esbroufe médiatique et d’engager enfin une action de restauration de l’ordre public sur l’ensemble du territoire national. Les camps illicites doivent être démontés, les populations nomades en situation illégale renvoyées chez elles, sans pécule et avec l’assurance qu’elles ne reviendront pas, contrairement à ce qui se passe aujourd’hui." Bon, pour obéir pleinement à l’injonction de la formation d’extrême droite française, il n’eût pas fallu verser 300 euros par adulte et 150 par enfant à ces Roms "volontaires" pour retourner en Roumanie et en Bulgarie. Quant à obtenir "l’assurance qu’elles ne reviendront pas", la Le Pen gonfle les muscles mais ne trompe personne : c’est strictement impossible. Et la grande majorité de ces Roms, citoyens européens de plein droit bénéficiant de la liberté de circulation à l’intérieur de l’Union, reviendront. Parce que s’ils vivent en France dans des campements qui sont d’innommables amas de détritus, dans la misère la plus noire, c’est pourtant encore pire chez eux. En attendant, puisque la clique sarkozyste fait si bien ce que demande le FN, une suggestion : pourquoi ne pas confier le ministère de l’Immigration et de l’Identité nationale à Marine Le Pen ? Au point où l’on en est...

Mise à jour : "Depuis plusieurs mois, le ministre de l’Intérieur Roberto Maroni (Ligue du Nord, NdA) "s’inquiète" de l’augmentation du nombre des gens du voyage d’origine étrangère présents sur le territoire italien. Aussi veut-il employer les grands moyens et faire mieux que la France, qui a procédé cette semaine au rapatriement de 216 Roms en Roumanie : dans le Corriere della Sera, un des principaux quotidiens du pays, Roberto Maroni a annoncé qu’il demanderait à Bruxelles "l’autorisation d’expulser des ressortissant d’Etats membres lorsque leurs conditions de vies sont jugées inadéquates" par l’Etat." La suite à lire dans le Journal du dimanche du 21 août.


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