Comment faire barrage au Front national ? En arrêtant de jouer le libéralisme et l’immigré contre le peuple et la laïcité !

par guylain chevrier
vendredi 25 mars 2011

Voilà, nous sommes entre les deux tours d’une élection qui aura encore été marquée par deux traits qui soulignent une crise profonde de la démocratie dans notre pays : une très forte abstention et une montée de l’influence du FN.

L’abstention qui devrait fortement interroger le personnel politique, tous bords confondus, passe à l’arrière-plan de la seule question qui vaille à ses yeux, agitent les appareils politiques et les médias complices depuis longtemps de cette situation : la question d’un Front républicain contre le FN, comme l’arbre idéal qui cache la forêt !

Mais qu’est-ce qui peut bien être à l’origine de cette catastrophe annoncée d’un glissement vers l’extrême-droite de notre démocratie ?

- C’est cette pensée unique qui enferme la vie politique de l’UMP au PS, passant par les satellites hypocrites de ces deux leaders de la bipolarisation de la vie politique qui jouent la différence aujourd’hui en espérant avoir leurs strapontins demain dans un gouvernement. Certaines de ces organisations auto-déclarées antilibérales, mettront alors en œuvre sans état d’âme, une politique libérale inspirée par l’Europe du traité de Lisbonne, seul l’emballage faisant la différence. 

- C’est cette gauche qui n’en a que le mot, qui a renoncé depuis longtemps à un changement de la société, où il n’est question que de partage des hautes-charges et du pouvoir au service de la gestion des intérêts des actionnaires, contre le peuple au lieu de le représenter. Cette gauche qui n’a plus comme projet que la promotion des minorités de toutes sortes. Exemples : droit de vote aux étrangers non européens pour les élections locales, défense des minorités visibles dans les médias et dans l’emploi, financement public des lieux de culte musulmans…

- C’est cette extrême-gauche qui a la haine de la nation et qui sert de cache-misère et de fausse bonne conscience à cette gauche sans courage ni perspective. Elle n’a, en lieu et place de l’ouvrier depuis longtemps oublié, que la défense du sans-papier, de l’immigré clandestin, et de l’islam communautariste du revoilement comme pseudo causes révolutionnaires, présentées sous le jour d’un droit à réparation en regard du passé colonial que l’on nous ressert sous forme de culpabilisation collective, pour intimider toute velléité à les contester. On oppose ces causes aux nationaux sous prétexte d’internationalisme justifiant la fin des frontières et de la France au nom de la liberté de circulation des miséreux du Sud vers le Nord. On sert ainsi à merveille les intérêts des plus riches qui ne rêvent que d’en finir avec les Etats-Nation, leurs frontières, et avec les acquis sociaux qu’ils protègent pour faire place nette au marché sans limite et exploiter sans fin.

- Ce sont ces écologistes qui, au-delà de partager déjà la même idéologie gauchiste que celle décrite ci-dessus, proposent de régresser pour durer, jusqu’à leur avoir laissé installer jusque dans notre constitution l’obscurantisme avec le principe de précaution. Ils jouent sur les peurs comme moteur d’une nouvelle religion, l’écologie, source de pouvoir sur les foules nous soumettant encore un peu plus à l’ordre injuste prétendument « inéluctable » des choses. Un fonds de commerce offrant une voie royale vers le pouvoir politique et ses gratifications. On en profite au passage pour mettre en accusation l’homme et le progrès comme responsables de tous les méfaits, pour mieux nous faire oublier ce capitalisme qu’ils défendent et qui est à l’origine même de l’impossibilité d’une maitrise démocratique du développement harmonieux de l’homme et de la libération de ses possibilités fabuleuses, qui restent encore à l’heure préhistorique de leur véritable expression.

Un positionnement des syndicats contre le FN, doublé d’une défense du principe d’une immigration sans limite ni frontières : une gageure !

Même les syndicats s’y sont mis avec une déclaration commune rejetant les valeurs du FN, à la veille de l’élection cantonale. Les 5 organisations qui composent encore l'intersyndicale (CGT, CFDT, Unsa, Solidaires et FSU) affirment que "la préférence nationale n'est pas compatible avec le syndicalisme" et même "est antinomique avec les valeurs fondamentales du syndicalisme". Certes, on pourrait dire très bien, mais cela ne règle rien de ce qui se développe dans les esprits en regard de la situation décrite ci-dessus qui est plutôt encouragée par ces organisations tentées, pour certaines, de plus en plus par une gauchisassions qui fait précisément le lit du FN.

Exemple : la régularisation des sans-papiers sans condition, qui justifie et favorise l’immigration clandestine, contredit toute idée de maîtrise à minima des entrées et des sorties sur notre territoire, se fichant ainsi des lois de la Nation et de la République sous prétexte de réduire la souffrance du monde en organisant le désordre. Il est évident que ce genre de posture flatte l’idée selon laquelle on entend faire de la France une sorte de carrefour de la mondialisation où plus personne ne puisse se reconnaitre, à plus ou moins long terme, dans ce qu’il considère comme son pays. Par-delà les polémiques du genre de celles lancées récemment par Claude Guéant de façon opportune, qu’on le veuille ou non, ce n’est pas un problème secondaire, même si certains l’instrumentalisent en donnant des arguments à ceux qui veulent faire taire les voix discordantes à ce propos dans leur camp.

On sait combien le risque pèse de favoriser le communautarisme par cet encouragement à l’absence de toute règle en matière de flux migratoires. Plus l’immigration est importante et moins elle peut s’intégrer, moins les moyens existent pour en réunir les conditions positives. Cette démarche prétendument humanitaire d’un accueil sans condition des populations venues de partout, c’est renier l’intégration qui est un processus essentiel pour que chaque nouvel arrivant puisse trouver sa place dans notre République en s’en appropriant les valeurs, ce qui n’a rien de spontané. Ce en dehors de quoi cette République laïque, sociale, démocratique et indivisible bien que décentralisée, ne puisse survivre. Il faut protéger le modèle de progrès que nos institutions constituent pour d’autres peuples qui façonnent leurs nations et puissent s’en saisir pour encore le porter si possible plus loin.

Derrière la dénonciation du FN, le risque d’un amalgame avec tous ceux qui défendent la laïcité et l’intégration, refusent une immigration sans limites et le multiculturalisme.

Dans cette déclaration commune anti FN, il est dit : "L'exclusion, le rejet de l'autre, le repli de la France sur elle-même et la fermeture des frontières, la désignation de boucs émissaires, la dénonciation de l'immigration comme responsable de tous les maux sont des attitudes qui, l'histoire en témoigne, ne peuvent conduire qu'au pire. Les organisations syndicales sont déterminées à empêcher l'instrumentalisation du syndicalisme par le Front national qui n'est pas un parti comme les autres et dont les orientations sont à l'opposé des valeurs qu'elles portent." Cette déclaration, qui fait suite à la polémique née de la candidature de responsables de la CGT et de FO aux cantonales sur des listes FN, sert d’ors et déjà, par amalgame, à une intimidation générale, voire une chasse aux sorcières, en regard de ceux qui par hasard oseraient porter le débat sur la question de la place de l’immigration en France ou de la laïcité opposé à un port du voile que certains entendent imposer partout. Tout questionnement en la matière est prédestiné à être immédiatement interprétées comme s’inscrivant dans ce périmètre de valeurs infréquentables, de la xénophobie ou de la fameuse "islamophobie" (délit de blasphème) se traduisant finalement par une pensée unique, un interdit à la liberté de pensée, une atteinte aux libertés et droits individuels. On marche sur la tête !

On remarquera que si l’on dénonce d’un côté le concept de « préférence nationale », plusieurs organisations syndicales et organisations politiques de gauche convergent dans une proposition de loi visant à l’abrogation du principe de nationalité pour l’accès à la Fonction publique, au nom de la non-discrimination. Ceci, comme la recommandation en avait été faite par la Halde dans l’esprit de l’Europe libérale qui l’avait déjà ouverte aux ressortissant de la communauté européenne jusqu’à l’ouvrir ainsi à présent aux non-communautaires. Dans la Fonction publique, on parle de résoudre le problème de la précarité de l’emploi, concernant les travailleurs immigrés employés comme agents contractuels (puisque non-nationaux), en donnant l’accès à celle-ci à des agents non-européens. Ainsi, au nom d’une minorité encore une fois, on entend détruire un principe clé du rapport de la nation à ses missions d’intérêt général et de service public, celui du principe de la nationalité pour devenir fonctionnaire. Que vaudrait donc ce mot si demain n’importe quel nouvel arrivant pouvait se voir le devenir, quel sens aurait tout simplement la notion même de Fonction publique, jusque-là attachée à la nation, à son identité si particulière, propre à cette France au modèle social et laïque unique !

N’est-ce pas une véritable provocation dans le contexte actuel ? Les missions de la Fonction publique sont habitées par l’’intérêt général qui repose entre les mains des citoyens que sont les nationaux, qui seuls sont censés, en raison de leur adhésion à des valeurs communes synthétisées dans l’Etat français et le principe de la nationalité assumé, répondre aux garantis d’exécution des missions de bien public, garant de la neutralité et de l’impartialité dans le traitement égal de tous... Ceux qui doivent exercer, de façon permanente dans la Fonction publique, des missions de l’Etat-nation doivent être ceux qui en choisissent les lois et les représentants, sinon on signe sa fin. S’attaquer au principe de la nationalité dans l’accès à la Fonction publique, c’est l’affaiblir en lui portant un coup mortel, et ainsi aller dans le sens de son remplacement par la notion de Services d’intérêt généraux ouvrant la prise en charge des missions de service public par des entreprises privées comme des marchandises, tel que dans les pays anglo-saxons, sans plus aucun obstacle à l’emploi d’étrangers non européens, tel que l’Europe libérale encore une fois le préconise. Quelle avancée pour les travailleurs !

Refuser une logique des minorités divisant les forces sociales et faisant le lit du libéralisme

On tourne ici le dos à l’esprit de 1789 comme aux grand principes de liberté, égalité et fraternité auxquels on préfère celui de non-discrimination qui est un véritable cheval de Troie promouvant les minorités de toutes sortes, avec lesquelles on veut nous imposer une société fondée sur la reconnaissance des identités, sur une addition de différences. Une société multiculturelle faite de clans et de ghettos ethnico-religieux. Ceci, en lieu et place de l’égalité des droits et de la laïcité qui met la citoyenneté, comme bien commun, au-dessus des différences. Seule la laïcité précisément permet que ces dernières vivent ensemble en bonne intelligence, à leur interdire toute intervention dans le politique, annulant ainsi le risque que l’une d’entre elles soit tentée de prendre le pouvoir sur les autres. La laïcité, c’est faire société d’abord sur ce qui nous rassemble, sur ce qu’on met ensemble.

Cette société multiculturelle est un véritable modèle pour les tenants du libéralisme, car c’est la certitude qu’à travers la mise en concurrence des individus réunis en communautés ethniques, culturelles, religieuses et de couleurs, concurrentes, les forces sociales se divisent rendant impossible toute lutte collective contre le système. Immigrés ou Français, nous avons tous besoin de la laïcité !

Rien d’étonnant à ce que Marine Le Pen récupère au passage la laïcité, pour l’instrumentaliser à sa façon, puisqu’elle a été lâchée de tous bords et tout spécialement par une gauche qui pratique le clientélisme religieux et une extrême-gauche qui en fait une référence à abattre au nom d’un droit à la différence qui se traduit par la différence des droits et la logique de la discrimination positive.

Une impardonnable classe politique qui tourne le dos à la laïcité et au peuple : un boulevard pour le FN ! 

Autant de motifs qui poussent le FN au milieu de la scène et à ce que, au lieu de parler projet politique on ne soit plus qu’à tout cristalliser autour de cet enjeu, à ne rien vouloir changer de ce qui détruit à petit feu la France, pratiquement toutes forces organisées, peu ou prou, confondues.

La laïcité est la valeur cardinale de notre société qui, à travers l’interdiction d’accès du religieux au politique, le respect de la liberté de conscience comme du droit de croire ou de ne pas croire, la liberté- l’égalité et la fraternité comme valeurs supérieures à toutes caractérisant le peuple, la nation et la République, reste le moteur de tous les progrès à venir et un acquis universel du développement de la civilisation. C’est le combat contre les inégalités qui porte en lui l’émancipation de tous qui permet le mélange, bat en brèche le racisme, qui apporte la fraternité et la paix, qui ouvre les portes de la liberté commune, et non la lutte contre les discriminations qui sert de marchepied à une logique des minorités ! Comment laisser ces débats au Front National qui en détourne le sens pour en faire une arme de combat contre la démocratie et la défiance de l’autre !

Le peuple, l’ouvrier, le travailleur, le citoyen d’origine immigrée ou non, n’a plus personne pour faire entendre sa voix à travers ce que sont devenus les partis, et là le danger est majeur. C’est l’heure des périls, et comme toujours avec pour préalable, la trahison de l’intérêt de la nation par les élites, de gauche ou de droite.

 

Guylain Chevrier, historien.


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