Communication gouvernementale : la publicité doit pouvoir remplacer les idées !

par Jean Claude BENARD
mercredi 25 juin 2008

On ne parle plus que de ça depuis quelques jours : le gouvernement vient de lancer des spots TV, presse écrite et internet pour expliquer aux Français le bonheur de vivre en France sous la présidence de Nicolas Sarkozy.

La campagne réalisée par Young et Rubicam (agence qui a gagné l’appel d’offres et qui ne dispose pas de site web en propre) a démarré lundi 23 juin au soir.

Elle comprend le dispositif suivant :

TV : sur les 5 grandes chaînes de télévision nationale, 20 chaînes de la TNT, du câble et du satellite, 8 chaînes d’outre-mer. Il comprend un spot générique de 45’’ diffusé en fil rouge, 4 spots thématiques de 20 secondes diffusés sur l’ensemble des chaînes. Le gouvernement prévoit environ 1 630 diffusions.

Web : diffusion des spots TV et de 4 bannières thématiques sur 9 sites web commerciaux et environ 40 sites de la toile gouvernementale.

Presse : 3 annonces thématiques diffusées dans 10 titres de la presse quotidienne nationale, 59 titres de la presse quotidienne régionale et 4 titres de la presse quotidienne gratuite, soit 147 insertions.

Espace web : dédié à l’ensemble des mesures et celles à venir que l’on retrouve sur le portail du gouvernement http://www.mesurespouvoirdachat.gouv.fr - source UJJEF.




L’inénarrable Thierry Saussez, publicitaire de métier est à la barre de cette réhabilitation de l’action gouvernementale. Il était justement ce matin sur RTL pour s’en expliquer avec J.-M. Apathie.

A la question de J.-M. Apathie sur les "mesures que vous vendez... ", Thierry Saussez répond avec décontraction qu’avec "plus de 50 lois votées, il faut réexpliquer les bénéfices des principales". Il ajoute : "il y a le temps de l’information et le temps de la médiatisation... " Interrogé sur le montant de 4 millions d’euros (ce qui représente tout de même 26 238 280,00 de nos vieux francs) alors que le Premier ministre nous rappelle de façon régulière le vide profond des caisses, il répond par le terme "démagogie".

En effet, selon lui, il y a bon gré mal gré 1 million de Français en difficulté et leur donner à chacun 4 € ne résoudrait rien. C’est vrai, mais ne pas les dépenser serait une forme de gestion sérieuse comme l’explique si bien Eric Woerth, notre grand argentier. Vidéo RTL intégrale de l’interview.

Mais, le SIG, c’est quoi au juste ?

Rattaché à Matignon, le SIG est en quelque sorte le département Communication du gouvernement depuis 1996. Avec un budget d’environ 50 M€ , il positionne l’Etat en 45e place des plus gros annonceurs de France, juste derrière Canal+ ou Coca-Cola ; cette somme étant d’autant plus importante qu’on lui octroie des abattements sur l’achat d’espace pub allant jusqu’à 65 %. Source Opinion Watch.

Le Service d’information du gouvernement (SIG) sert surtout à coordonner la communication ministérielle. Derrière cette communication, se cache la rue de Constantine. Le nombre de fonctionnaires attachés à ce service est pléthorique : plus ou moins cent vingt personnes. Le SIG n’a signé seul que quelques grandes campagnes : les référendums sur la Nouvelle-Calédonie (1988) et sur le traité de Maastricht (1992), la Consultation nationale des jeunes (1994) et la campagne sur la réforme de la Sécurité sociale (1995). De fait, ses fonctionnaires planchent surtout sur des opérations d’intérêt public qui sont signées par les ministères de tutelle.

Grâce au label du SIG, les campagnes publiques bénéficient d’un abattement dans tous les médias sur l’achat d’espace (jusqu’à 65 % sur France Télévision). « Chaque ministère est capable de mener une campagne seul, mais le SIG permet une certaine cohérence entre les différentes actions gouvernementales. »

La rue de Constantine doit aussi délivrer l’information officielle. Qui pourrait assumer ce rôle, sinon le gouvernement ? Outre l’annuaire MédiaSid (qui ne semble plus édité depuis celui de 2000), cet annuaire de la presse et de la communication, le SIG édite La Lettre du gouvernement, qui vulgarise les décisions étatiques auprès des élus locaux, des fonctionnaires et des partenaires sociaux.

Enfin, le SIG sert aussi d’œil de Matignon sur l’opinion publique. Ses fonctionnaires enregistrent en moyenne entre 400 et 500 sondages publiés chaque année dans la presse, sans oublier la vingtaine d’études ad hoc plus ou moins confidentielles. Le tout vient nourrir le travail des cabinets - source Stratégie.

Mais, Thierry Saussez, le nouveau patron du SIG, dépendra-t-il de Matignon ou de... l’Elysée ? Pour connaître la réponse, il est indispensable de regarder sa biographie.

Thierry Saussez est fondateur de la société Image et Stratégie Europe spécialisée dans la communication publique et institutionnelle. Conseiller en communication institutionnelle et politique français, il a participé à ce titre à plus de 500 campagnes électorales dont celles de Jacques Chirac, Édouard Balladur, Alain Juppé et Nicolas Sarkozy. Il est ce que les anglophones appellent un « spin doctor ».

Ancien membre du Rassemblement pour la République (RPR), il fait partie l’Union pour un mouvement populaire (UMP). C’est un des proches conseillers de Nicolas Sarkozy.

En 1982, Thierry Saussez a créé l’agence de communication Image et Stratégie Europe, dont il est président-directeur général. En dehors des leaders de la droite française, il intervient comme conseiller auprès d’entreprises, d’organisations professionnelles et de collectivités territoriales.

En 2006, Thierry Saussez est fait Chevalier de la Légion d’honneur, place Beauvau, par Nicolas Sarkozy alors ministre de l’Intérieur.

Il est conseiller municipal de Rueil-Malmaison (Hauts-de-Seine) depuis 1983. Longtemps dauphin désigné de Jacques Baumel, il fera sécession un court moment lorsque celui-ci désignera Patrick Ollier comme son successeur. En 2002, il s’est présenté, sans succès, au scrutin législatif dans la 7e circonscription des Hauts-de-Seine sous l’étiquette divers droite contre l’UMP Patrick Ollier (compagnon de Michelle Alliot-Marie), maire de Rueil-Malmaison - source Wikipedia.

Nous ne sommes pas en mesure de vous indiquer de quelle façon Thierry Saussez est rémunéré : salaire ou prestation ? Car bien qu’en "travaux" (Image & Stratégie fait peau neuve et revient bientôt avec un nouveau site internet), le site web de l’agence de M. Saussez existe toujours. Quant à savoir s’il pourrait y avoir mélange des genres : c’est mystère et boule de gomme...

Que rajouter si ce n’est notre impatience de connaître le slogan (et son coût financier) qui va remplacer "Ensemble... tout est possible" !!!


Sources et crédit
Le site de Thierry Saussez
Opinion Watch
UJJEF
Pubard
Wikipedia

Crédit et copyright images
Delucq






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