Conte philosophique en Macronie

par Mylene Doublet-O’Kane
jeudi 28 avril 2016

S'il est insupportable aux esprits éclairés qu'on puisse décemment envisager l'avenir d'un souverain régnant avec 10 à 15% de citoyens convaincus des bienfaits de son action, on criaille ces jours-ci jusque dans le Tout-Paris, qu'un autre Alexandre fait grandement vaciller le trône sur lequel le premier est assis pour encore quelques mois. Assurément disciple de Socrate, celui-ci laisse parler son poulain à sa guise. Puis, lorsque la coupe est pleine et menace de déborder, il fait précipiter son conseiller sur le téléphone pour lui régler le pas. Ou alors, le monarque en personne rappelle-t-il publiquement tout ce que le jeune prodige lui doit. L'élégance de la formule y perd ce que la clarté d'un piège qui se referme sur soi y gagne. "Est pris qui croyait prendre". La jeunesse est ainsi faite qu'elle est toujours "En marche !", nous échappe, et le socialisme de l'Ancien ne lui convient pas s'en va-t-elle crier sur tous les toits de France, tandis que son héros conquérant se gonfle de sourires, papillonne des yeux, prend infinimenent de plaisir à infiniment de pauses avant de feindre de fuir les caméras ; en un mot se disant, exulte devant une foule exquise et pâmée.

Est-ce une pensée intolérable au Phénix élyséen ? Assurément, selon l'adage qui admet qu'on jalouse toujours celui sachant conjuguer avec génie la savante rhétorique attachée à la casuistique jésuite ; cet humaniste excellemment brillant, et l'inoxydable culte de l'argent ; joyau indépassable de nos sociétés post-modernes.

Certains osent brosser le portrait d'une union mariant la figure lettrée pompidolienne avec le talent réformateur innovant giscardien. Soit, quoique l'audace pût paraître un peu timide à celui dont l'ambition eût formé le projet de se hisser sur l'Acropole d'un talent prêt à sacrifier la réputation de son épouse bien-aimée, sur l'autel de la niaiserie la plus divinement échevelée. Qu'est-ce à dire ? L'homme du moment serait-il cet autre Léonte, prêt à embarrasser jusqu'à sa compagne pour parvenir au sommet ? Pauvre, pauvre Hermione moderne...

Or, quelle leçon en tirerons-nous, si l'on considère seulement le sort d'un fidèle dévoué offrant de sillonner les territoires de France pour la gloire de son nouvel Amphitryon ? Et que penserons-nous de cette autre stratégie flamboyante, laquelle n'a plus de secret pour ce géniteur de NOE (Nouvelles Opportunités Économiques apportées par la révolution numérique), qui consiste à faire d'un candide visiteur de la page internet du mouvement "En Marche !", un nouvel admirateur enrôlé d'office parmi les nouveaux sympathisants ? En amour, comme en affaires, a shark must bite hard (un requin doit mordre fort). Remarquez, me direz-vous, qu'il fût encore heureux qu'au moins celui-ci eût considéré les Français autrement que sans-dents !

Enfin, puni au dernier remaniement ministériel qui le vit chuter de la 11e à la 14e place du rang protocolaire, faudra-t-il penser que notre Don Quichotte fût de ces desdichados qui pussent tout, à condition que l'on n'eût pas commis la sottise de les freiner dans leurs élans créatifs ? Peut-être, mais peut-être pas. Car, si l'on s'est tient au bilan économique, les résultats sont maigres. De même, si l'on observe le programme du jeune mouvement, on ne trouve ni progamme clair ni vision du monde.Or, n'est pas-ce pas précisément là que la nouvelle coqueluche est la plus attendue, particulièrement en France ? Car, si l'on admet que nul ne peut plus gouverner sans tenir compte d'un Islam politique parvenu au pouvoir par culte du clientélisme communautaire dont les ramifications s'étendent bien au-delà de nos frontières, Macron sera-t-il ce futur homme d'état que l'on connaît déjà, prêt au sacrifice des valeurs laïques françaises au nom d'intérêts financiers arrosant depuis le Royaume du Maroc jusqu'au golfe persique ?

S'il est bon d'avoir formé son caractère tôt dans l'âge, il est toujours supérieur de l'avoir exercé à acquérir une vision géopolitique claire, et c'est uniquement à ce prix, que l'on s'entoure d'amis fidèles.

Si l'un n'était que fumée, l'autre doit prendre garde à n'être pas que vent. Les déserts d'amertume les recouvrent toujours, avec la même indifférence.

© Mylene Doublet-O'Kane

Professeure et chroniqueuse indépendante.


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