Copé brise le cordon sanitaire

Au lendemain du premier tour des élections cantonales, la percée du Front National pose un dilemne à la fois aux socialistes et aux membres de la majorité présidentielle. Quelle consigne de vote donner aux électeurs dans les 394 cantons où le FN est parvenu à se maintenir au second tour ? Si le Parti Socialiste a appelé ses électeurs à se prononcer massivement en faveur des candidats de l'UMP, le secrétaire général du mouvement populaire Jean-François Copé a lui rejetté l'idée d'un front républicain. Nous laissons nos électeurs libres de leur choix, il n'y aura pas d'alliances avec le FN ni de Front républicain a déclaré l'ex président du groupe UMP à l'Assemblée Nationale. 

Fort heuresement, François Fillon, figure tutélaire d'une conception de la droite gauliste et républicaine qui tend à devenir minoritaire, a appelé à se prononcer en faveur des candidats socialistes. Malheuresement, le message du "ni-ni" de Jean-François Copé est bien passé. C'est grave, car en rejettant le Front Républicain, l'UMP légitime la place du Front National comme membre à part entière de notre échiquier politique. Il induit une relation d'équivalence entre FN et Parti Socialiste. 

La stratégie du "ni-ni" est d'ailleurs une faute politique pour l'UMP. Copé cherche à dédiaboliser le FN pour éviter de victimiser le parti de Marine Le Pen et donc empêcher que le Front National ne reste le refuge du vote protestataire. Or, c'est justement en le légitimant que le FN parvient à percer dans les sondages et lors de ces échéances cantonales ! Le vote FN s'est banalisé (voir mon billet : Marine Le Pen au 2nd tour : faut-il croire les sondages ?) et son audience s'accroît dès lors. Copé a fortement contribué à briser le cordon sanitaire qui existait entre droite républicaine et droite nationale. En le brisant, il assoît la domination de cette dernière. L'hermétisme de la frontière entre FN et UMP tend à s'estomper, et c'est un jeu dangereux : car à pied d'égalité le combat devient loyal, et tous les scénarios deviennent possibles...