Dans notre France politique un séisme moral est-il en train de se produire ?
par Patrick Samba
samedi 5 avril 2014
Ce n’est pas de l’onde progressant depuis l’épicentre politique de Grenoble dont il est question dans ces lignes, pas plus uniquement de la nomination à la tête d’un gouvernement soi-disant de gauche d’un premier ministre ayant manifesté une orientation gravement problématique sur le plan des valeurs philosophiques et humaines. Non, ce dont il question ici c’est du séisme apparent que fait naitre une récente décision d’Europe Ecologie-Les Verts.
On ne comprend pas, ça ne rentre en effet dans aucun logiciel de décryptage, qu’un parti politique puisse refuser une offre aussi alléchante que celle que lui a faite le tout nouveau premier ministre. Faire le choix de la dignité, rejeter la compromission, c’est dans ce cas tout simplement de la folie. Même un député EELV l’a dit et redit : ça relève de la psychiatrie.
Il n’y a pas à dire ils sont complètement fous ! Totalement azimutés ! Il n’y a pas à y revenir, le diagnostic est posé.
Mais curieusement, ici ou là, des murmures puis des bruissements se font entendre, des mots curieux : espérance, l’espoir, la dignité, que sais-je encore, des mots qui en évoquent d’autres tout aussi saugrenus comme valeurs ou vertu, se font jour. Que se passe-t-il donc ? Les français(es) seraient-ils tous en train de devenir fous, de se laisser contaminer par le comportement insensé des hurluberlus de l’écologie politique ?
Rassurez-vous ! Tout ceci ne présente aucun élément de gravité. C’est juste qu’un certain nombre de français(es) ont une mémoire un peu moins déficientes que celle d’une grande majorité de leurs concitoyen(ne)s. Un peu plus de dignité. Voyez, ce n’est pas grand-chose. C’est juste un peu d’humanité.
Qui se souvient encore qu’il n’y a pas si longtemps la démission du ministre de l’Intérieur avait été réclamée ? Oui, oui, sa démission, pas juste un simple rappel à l’ordre, sa démission, pas moins. N’avait-il pas tenu des propos, n’avait-il pas agi d’une manière telle, et à ce point répréhensible, qu’il pouvait mériter qu’on exige sa démission ?
Mais ces si nombreux commentateurs ont eux la mémoire courte, et si on leur proposait à eux un magnifique cadeau, une si brillante carrière, même après avoir été gravement scandalisés, quand bien même ces présents émaneraient de celui qui avait trahi des valeurs soi-disant communes, quand bien même ils ne pourraient n’être qu’un leurre, et bien eux, amnésiques mais pas fous, les auraient acceptés.
Et c’est pourquoi à leurs yeux la décision des dirigeants d’EELV de ne pas participer au gouvernement de Manuel Valls relève à l’évidence de la folie.
Et aucunement du sens de la dignité.
Et tout cela semble créer un séisme…
Aurait-elle quelques difficultés à assumer des valeurs humanistes dont elle n’a aucunement à rougir ? En quoi ne constitueraient-elles pas un repère politique et moral honorable, et à ce titre défendable ? Ne serait-ce pas désormais qu’un calcul politique erroné prévale sur la nécessité d’affirmer la prééminence de la dignité sur la politique outrageusement politicienne dont l’abstention record aux municipales a confirmé le rejet ?
Le séisme va-t-il s’en trouver contrarié ? Ou au contraire se retrouver amplifié ?