Démocratie ! Démocratie ! ou l’indignation sélective du PS...

par Albert Ricchi
lundi 2 février 2009

Réunis le 20 janvier 2009, à l’Assemblée nationale, pour l’examen d’une loi organique visant à "encadrer" les relations entre le parlement et le gouvernement, les députés socialistes ont crié "démocratie, démocratie", entonné la Marseillaise et hurlé contre la limitation de leur rôle en rappelant qu’ils étaient les représentants du peuple…

Ces vifs incidents mettent en évidence l’extrême gravité pour la démocratie du projet de loi modifiant le droit d’amendement. il s’agit ni plus ni moins que de verrouiller la procédure parlementaire et d’empêcher l’opposition de s’opposer.

Avec la limitation arbitraire du temps de parole, les députés seront obligés de se taire plutôt que d’exprimer les attentes, impatiences, colères et aspirations du peuple dont ils sont les représentants. C’est l’une des conséquences pratiques de la révision constitutionnelle de juillet 2008 qui était censée revaloriser le rôle du parlement.

Mais la réaction du PS arrive un peu tard ! Il suffit de se rappeler par exemple ce qui s’est passé le 4 février 2008 lors du congrès de Versailles. Ce jour-là, la majorité des députés socialistes s’est pudiquement accommodée du traité de Lisbonne, texte largement similaire au traité constitutionnel, rejeté par les Français le 29 mai 2005.

Jean-Marc Ayrault, président du groupe à l’assemblée nationale, ne s’est pas opposé à la ratification parlementaire du traité, Il s’est abstenu ! Et l’abstention revenait à laisser passer la ratification sans référendum. Seul le « Non », s’il avait été voté par les deux cinquièmes des parlementaires, aurait eu pour résultat d’obtenir un référendum.

Autre personnalité socialiste, Manuel Valls s’est exprimé récemment sur France Inter en accusant le gouvernement et sa majorité parlementaire de vouloir réduire la démocratie. C’est vrai, mais Manuel Valls a fait pire que Jean-Marc Ayrault, il ne s’est même pas abstenu le 4 février 2008, il a voté Oui !

Quant à Martine Aubry, elle persiste et signe. Elle a confirmé lors de ses vœux à la presse que la ligne du PS pour les européennes sera celle du très pro-traité de Lisbonne "manifesto" adopté par le PSE à Madrid le 2 décembre dernier...

Les députés PS semblent ainsi découvrir tout à coup combien la démocratie laisse à désirer dans les institutions de la 5ème République. Mais jamais, ils ne remettent en cause ces institutions, dans lesquelles le ver de l’exclusion était présent, en son cœur, dès 1958. Et si François Mitterrand publia Le Coup d’Etat permanent, aux Editions Plon en 1964, il s’est néanmoins glissé confortablement dans les velours de la 5ème République une fois devenu président de la République et ce pendant deux mandats consécutifs.

La personnalisation de la vie politique sous la 5ème République a toujours dépolitisé les personnes, produit largement des députés et sénateurs plutôt « godillots » et c’est pourquoi il faut diminuer les pouvoirs du président de la république et les transférer au gouvernement et au parlement pour que la France devienne enfin une démocratie moderne.

Le Premier ministre et le gouvernement doivent être responsables devant le Parlement dont il faut renforcer les pouvoirs afin de contrôler l’exécutif, avec une place nouvelle accordée aux citoyens.

Pour cela, Il convient d’introduire notamment une forte dose de proportionnelle à l’assemblée nationale, une proportionnelle intégrale au sénat, le non-cumul des mandats dans le nombre et dans le temps, le droit de vote aux élections locales pour les résidents étrangers installés depuis 5 ans et la parité femmes-hommes qui permet au plus grand nombre de s’investir dans la vie politique.

Les écueils et dérives du cumul des mandats sont connus : accaparement des responsabilités, des pouvoirs et des décisions par un petit nombre de personnes, constitution de véritables fiefs, fonctionnement en castes, guerre des clans, délégation de pouvoir, tous dysfonctionnements qui n’ont plus rien à voir avec la démocratie.

Cette nouvelle République doit être également laïque, notamment par l’abrogation du statut concordataire d’Alsace-Moselle, véritable anachronisme au sein de la République française.

D’autres formes de décentralisation démocratique et de déconcentration des pouvoirs doivent être mises en œuvre également, toutes respectueuses des droits des collectivités comme des citoyens. A ce titre, la fiscalité locale, fiscalité indirecte de plus en plus lourde et frappant indistinctement les personnes très aisées comme les plus modestes doit être intégrée urgemment à l’impôt progressif républicain.

Aujourd’hui, cette nouvelle affaire de limitation du droit d’amendements à l’assemblée nationale par l’UMP, pour inadmissible qu’elle soit, ne change rien à l’essence anti-démocratique de la 5ème République. Ce dont nous avons besoin maintenant, c’est de la mettre à bas et d’aller vers une 6ème République...


Photo : Séance à l’Assemblée nationale par David Reverchon (http://www.flickr.com/photos/david_reverchon/)


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