Des milliards, comme s’il en pleuvait

par Michel DROUET
samedi 21 décembre 2019

Vous avez sans doute remarqué que sous ce gouvernement (mais cela avait commencé sous le précédent), les milliards défilent. Et que je te donne du CICE, que je te supprime de la taxe d’habitation, de l’ISF ou bien encore des cotisations, que je te défiscalise des primes et des H S, que je te diminue l’impôt sur les sociétés ou bien encore que je crée une flat tax forfaitaire sur les revenus du capital afin de les plafonner.

Tout cela donne le tournis et on n’est pas certain de percevoir la logique qui sous-tend cette vaste opération de bonneteau.

 Comme dit notre Président : « L’objectif de la réforme, c’est de construire la confiance et la transparence dans le système », mais on n’est pas du tout certain que cela s’adresse également au CAC 40 qui par nature n’est pas très transparent.

La nouveauté de 2020 : la diminution des Impôts sur le Revenu

Cela va coûter 5 milliards d’euros par an au budget de l’Etat qui depuis quelques décennies est en déficit de manière chronique et qui a recours à l’emprunt pour financer ses dépenses.

La presse, dans son ensemble, nous dit que les 12 millions de foyers de la première tranche auront un gain moyen de 350 € et les cinq millions foyers de la tranche suivante de 180 €.

Monsieur M. en couple (deux retraites), avec des revenus annuels de près de 50 000 €, curieux de nature, était allé voir il y a quelques semaines sur le simulateur du Ministère de l’économie comment le système fonctionnait et il est tombé sur le cul. Quelle ne fut pas sa surprise de constater qu’il aurait droit à un rabais de près de 900 euros, soit environ 20 % de son impôt sur le revenu ! La consultation de son taux de prélèvement à la source pour 2020 a confirmé cette baisse.

Quelques vérifications plus loin, il dû se rendre à l’évidence : le simulateur avait dit vrai et il se posa la question de la parole du Président, lequel dit fréquemment : « Le travail doit payer », sous-entendu les retraités devront faire des efforts.

D’ailleurs, Monsieur M. avait accepté, (en râlant, tout de même, parce que les « premiers de cordée » venaient juste de bénéficier de la suppression de l’ISF), l’augmentation de sa CSG, qui dans son cas ne lui sera pas remboursée, au nom de l’équilibre des budgets sociaux, ce qui est entendable.

L’aberration dans cette histoire, c’est que la « ristourne » sur l’impôt sur le revenu de 900 € correspond à peu de choses près à la somme prélevée pour la CSG, et qu’à l’horizon 2023, cerise sur le gâteau, il ne payera plus la taxe d’habitation.

Merci M. Macron, serait-il tenté de dire, s’il n’avait pas l’impression qu’on cherche à le caresser dans le sens du poil en vue des prochaines échéances électorales tout en faisant croire qu’il fait de même pour les contribuables salariés qui n’ont pas les revenus de Monsieur M. et qui devront, eux, se contenter de quelques dizaines d’euros.

Poussons le raisonnement un peu plus loin…

Les cinq milliards en moins de l’impôt sur le revenu, la défiscalisation des heures supplémentaires, la baisse de l’impôt sur les sociétés ou bien la flat tax, tout cela contribue, pour de simples visées électorale ou bien pour satisfaire le Médef (qui continue de clamer que les charges des entreprisses sont encore trop élevées), à augmenter le déficit du budget de l’Etat, dont on ne voit pas comment il pourrait se financer sans recours massif à la dette.

Le « remède » est connu : « il faut diminuer les dépenses de l’Etat » ce qui revient à supprimer des services publics en milieu rural, par exemple, en contradiction avec les grandes promesses post « gilets jaunes », ou bien encore quelques milliers de postes au Ministère de l’Ecologie, malgré la promesse du « Make our planet great again » et ramenant l’ambition gouvernementale à la suppression immédiate des cotons tiges et des pailles en plastiques et en différant la suppression des plastiques à usage unique dans quarante ans…. On a les ambitions des moyens que l’on se donne !

Cependant, l’Etat, tout en supprimant des emplois de fonctionnaires dans des secteurs où ils pourraient être utiles, en crée pour les forces de l'ordre, par nature improductifs, ce qui est un bon révélateur de la crainte de ce gouvernement d’une jacquerie finale qui l’obligerait à prendre la porte.

Car, en fin de compte, hormis l’éducation, il n’y a que très peu de création de postes « productifs » dans la fonction publique puisque la logique est de transférer au privé ces emplois en faisant payer les clients. Par conséquent, pas de postes dans les hôpitaux, ni dans les maisons de retraite et les collectivités territoriales sont priées, du fait de la diminution de leurs dotations, de serrer la vis de l’emploi, y compris des pompiers dans les Conseils Départementaux.

Faisons maintenant le lien entre budget de l’Etat et retraites

A priori, ce sont deux choses séparées, mais lorsque l’Etat, dans la course à la baisse de ses dépenses imposées par l’économie et la finance en vient à dégraisser les effectifs de fonctionnaires, comme une entreprise qui fait un plan social, il diminue les sommes versées aux régimes sociaux et en particulier celui des retraites et créé donc lui-même des déficits.

C’est le cas actuellement puisque le C.O.R. (Conseil d’Orientation des Recettes) nous a sorti un déficit (entre 8 et 17 Milliards, admirez la précision…) qui provient essentiellement de la suppression de 80 000 postes prévue par le Gouvernement, de la modération salariale des fonctionnaires (gel du point d’indice) et de la non compensation de la désocialisation d’heures supplémentaires ou de prime « Macron ».

L’Etat organise le déficit, c’est aussi simple que ça.

Par conséquent, en conclusion, il est possible de dire que le jeu de bonneteau fiscal voulu justifie un serrage de vis budgétaire de l’Etat avec comme effet induit un déficit du régime des retraites. Monsieur M. (voir ci-dessus), attaché aux régimes de protection sociale et aux services publics, se trouve favorisé bien malgré lui, car il ne cautionne pas cette faillite artificielle de l’Etat qui profite au CAC 40, qui ne s’est jamais aussi bien porté qu’en ce moment (cherchez l’erreur…).

Quel impact sur les négociations en cours le futur « régime universel » ?

Le Premier Ministre, droit dans ses bottes, tient absolument à faire payer aux actifs d’aujourd’hui le déficit du régime de retraite qu’il a lui-même créé et c’est pour cela qu’il tient absolument à son fameux « âge pivot » à 64 ans, qui n’est rien d’autre que le futur âge légal de départ qui complait au Médef.

On peut donc dire, sans risque de se tromper, que c’est bien le gouvernement, s’appuyant sur une logique néolibérale, qui est à l’origine de la crise sociale actuelle, avec ses effets sur l’économie et sur le quotidien des usagers des transports.

Beaucoup de gens qui ont compris le système, même s’ils se disent gênés par les grèves, soutiennent néanmoins le mouvement. Tout est dit !

 

Macron compte les points avant peut-être de désavouer son premier Ministre en lui intimant l’ordre de battre en retraite. Au final, si on laisse faire, à force de restreindre le périmètre de l’Etat il se pourrait que l’on puisse se passer d’un gouvernement en ayant uniquement un Préfet de Police et un Ministre de l’Intérieur chargés de la protection des intérêts privés. 

 


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