DPDA : la faute de Marine Le Pen
par Laurent Herblay
vendredi 23 octobre 2015
Hier, Marine Le Pen était l’invitée de Des Paroles et Des Actes sur France 2. Après des jours de polémique sur sa participation à quelques semaines des élections régionales, le service public a annoncé à la dernière minute avoir invité ses deux principaux rivaux pour décembre. Du coup, elle n’est pas venue.
Abus de mauvaises polémiques
La nouvelle invitation de la présidente du Front National a beaucoup agité le milieu politique, certains allant jusqu’à y voir une promotion du parti d’extrême-droite par le service public. D’autres y ont vu un traitement inégalitaire de la campagne des élections régionales, quelques jours avant le début de la période d’égalité de traitement du CSA. Xavier Bertrand s’est agité en dénonçant la participation de sa rivale, rejoint ensuite par Nicolas Sarkozy et le Parti Socialiste. Tous ont écrit au CSA pour se plaindre. Puis, nous avons eu droit à la polémique sur les opposants refusés (Dany Cohn-Bendit) et acceptés par Marine Le Pen. Puis, coup de théâtre mercredi soir : France 2 annonce l’inclusion d’un débat entre les trois principales têtes de liste de la région Nord-Pas-de-Calais-Picardie à la fin de l’émission.
Dernier coup de théâtre : Marine Le Pen refuse le changement d’agenda de dernière minute et décide donc d’annuler sa participation. L’émission est carrément annulée. Au début, je trouvais que la polémique était assez ridicule. Même si la présidente du FN est souvent invitée, son quota de participation est parfaitement légitime étant donnés les scores de son parti lors des élections. Ses fréquentes invitations sont le reflet de son audience démocratique. Ce n’est pas la première fois qu’un leader national bénéficie d’une audience supérieure à celle de ses concurrents locaux. Et on peut imaginer que France 2 aurait davantage reçu la présidente d’un des trois premiers partis du pays plutôt que la candidate régionale. Toutes ces polémiques reposaient sur beaucoup de mauvaise foi du PS et de l’UMP.
Que penser de la réaction du FN ?
Bien évidemment, le changement de dernière minute du programme et la capitulation de France 2 devant les demandes de Xavier Bertrand et Pierre de Saintignon pouvaient être irritants pour Marine Le Pen, qui a vu le programme qui lui était proposé changer moins de 24 heures avant l’émission. Cependant, le refus de participer peut être considéré comme une faute. Après tout, il n’était pas totalement illégitime que le service public organise au sein de l’émission un débat avec les deux autres têtes de liste qu’elle affrontera dans quelques semaines. Les habitants de la région auraient sans doute été heureux de pouvoir regarder un tel débat. Dans une véritable démocratie, même si un participant peut ne pas tout accepter, il est normal que les médias puissent avoir un mot à dire sur leur programme.
Du coup, la réaction extrême de Marine Le Pen peut nourrir les critiques à son égard. On pourra y voir un manque de préparation. Mais surtout, on peut y voir un refus des règles démocratiques et une attitude qui donne une autre perspective à l’admiration qu’elle dit avoir pour Vladimir Poutine. Cela ne caractériserait-il pas la tentation autoritaire d’un parti bien peu nuancé vis-à-vis de régimes qui prennent des libertés avec la conception de la démocratie que nous avons ? Si le FN ne doit pas être interdit, cela renforce l’idée que ce parti serait capable de prendre certaines libertés avec ma vision de la démocratie s’il est au pouvoir et qu’il n’est pas de la même nature que le PS ou les Républicains. Je ne pense pas que Hollande, dans la même position qu’elle en 2010, aurait annulé sa participation.
Bien sûr, il y a eu beaucoup de mauvaises polémiques sur la venue de Marine Le Pen à Des Paroles et Des Actes, parfaitement légitime dans l’état des votes des Français aujourd’hui. Le service public imposait de l’inviter. En revanche, son refus de participer en dit long sur elle et son parti…