DSK pris au piège de sa candidature au FMI

par Henry Moreigne
jeudi 30 août 2007

Rien ne va plus pour Dominique Strauss-Kahn (DSK). Après l’échec de sa candidature à la candidature pour les élections présidentielles, l’ancien ministre de l’Economie et des Finances semblait avoir trouvé dans la désignation du prochain directeur du Fonds Monétaire International (FMI) une occasion de rebondir. Le favori d’hier se trouve aujourd’hui en posture délicate. Les Russes lui opposent désormais un candidat Tchèque, Josef Tosovsky, soutenu par les milieux financiers conservateurs dont le « Financial Times » dans un édito au vitriol (« Not Strauss-Kahn ») se fait le porte-parole.

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Le cadeau de Nicolas Sarkozy était un peu trop beau pour être dénué d’arrière-pensées. DSK le savait. Alors que le PS est en pleine décomposition, DSK était trop content tout à la fois de bénéficier d’un éloignement salutaire et de soigner, à travers un poste prestigieux, toujours utile pour un éventuel retour sur la scène politique nationale, sa stature internationale. Nicolas Sarkozy lui, par son soutien sans faille apparaissait grand seigneur et éloignait dans le même temps un opposant dangereux. Le seul réellement en capacité de redonner des couleurs à la vieille maison socialiste.

Le scénario était presque parfait. C’était donner à la France un statut qu’elle n’a pas en pensant, un peu rapidement, que les nations de la planète se rallieraient sans sourciller à son panache blanc. Après avoir réussi, joli tour de force, à amadouer le président Brésilien Lula, DSK qui a bénéficié dans ses manoeuvres de séduction de toute la logistique de la République française, pensait avoir levé tous les obstacles sur sa route. C’était oublier son principal handicap, être français.

L’apparition soudaine d’un challenger fait suite à la trop grande proximité affichée par le président Sarkozy avec son homologue américain mais aussi aux critiques formulées à l’égard de la politique russe, qualifiée de brutale, qui ont fait tousser le Kremlin. C’était également oublier les vieux réflexes séculaires antifrançais de nos voisins d’outre-Manche et l’extrême méfiance, quoi qu’on dise, des milieux financiers internationaux à l’égard d’un ancien ministre socialiste.

Evidement du côté des supporters du candidat surprise, on écarte d’un revers de main ces suspicions. Josef Tosovsky ne serait pas un “ami de la Russie”. Simplement, un économiste compétent. Le Tchèque, ancien Premier Ministre, ancien gouverneur de la banque centrale de son pays avant de travailler à Bâle dans un institut auprès de la Banque des règlements internationaux, présente il est vrai un cursus professionnel qui n’a rien à envier à celui de DSK. Au contraire, selon eux le FMI a besoin d’un “vrai” économiste, à l’inverse d’un DSK jugé trop politique et pas intellectuellement crédible. L’intéressé appréciera.

Dans un éditorial, plus que sévère, du très influent quotidien économique britannique, le Financial Times, DSK est qualifié de “mauvais candidat, choisi de la mauvaise façon”. Le journal n’hésite pas à exprimer tout le mal qu’il pense de la candidature du Français en reprenant étrangement des arguments développés par le camp russe. “Personne ne peut soutenir que M. Strauss-Kahn est le candidat le plus qualifié dans le monde de par son expérience, son intelligence ou sa formation, n’hésite pas à asséner, bien loin de l’entente cordiale, le Financial Times.

Certes Dominique Strauss-Kahn est encore loin d’avoir perdu la bataille. Il est le candidat officiel de l’Union européenne et continue son tour du monde en vue de s’assurer le soutien des principaux pays électeurs. Il n’empêche, la diplomatie russe est encore influente notamment dans les pays en voie de développement et ce type de scrutin, malgré toutes les promesses formulées, est propice aux surprises. Avec un tiers des voix, les pays en développement se retrouvent de facto en position d’arbitre et devraient profiter de la situation pour tenter d’obtenir une modification des règles d’élection du patron du FMI qui leur sont actuellement défavorables. Ce n’est donc pas tout à fait un hasard si DSK se présente dans les capitales étrangères comme le candidat de la réforme du FMI.

Un échec marquerait immanquablement une remise en cause de l’avenir politique du leader socialiste. Handicapé par son âge, aussi bien à l’égard de l’actuel président de la République que par rapport à ses rivaux socialistes, DSK dispose d’une fenêtre de tir restreinte pour s’ouvrir les chemins de l’Elysée. A l’inverse, dans tous les cas de figure, Nicolas Sarkozy apparaît comme le grand gagnant de l’opération. Soit en éloignant un adversaire potentiellement dangereux soit en le transformant en perdant, en sympathique mais éternel looser. En attendant, Jean-Claude Juncker, Premier Ministre luxembourgeois, président de l’Eurogroupe et véritable artisan de la candidature de DSK, inquiet des attaques contre son poulain, a pris sa défense dans la version allemande du Financial Times, en n’hésitant pas à dénoncer l’hypocrisie des Britanniques et à évoquer une réforme du mode d’élection en cas de succès.


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