Du G7, de Macron et du sarko-trumpisme « bien-pensant »
par Laurent Herblay
mercredi 4 septembre 2019
La fin de semaine dernière avait lieu le G7. Dans un tourbillon de rencontres, d’annonces fracassantes, de promesses et de rebondissements, le président de la République s’est mis en scène d’une manière très sarkozyste pendant 72 heures, d’une déclaration d’ouverture à l’interview bien trop complaisante de France 2. Que pensez au-delà des petites phrases et des polémiques.
Postures et fabrication d’un ennemi
Les objectifs de ce G7 laissent songeurs : réduction des inégalités et défense de l’environnement. Pour qui prend un peu de recul, les 20 millions d’aide pour lutter contre les feux en Amazonie montrent à quel point nos dirigeants ont pris au sérieux ces objectifs. Un montant totalement dérisoire pour des pays dont le PIB cumulé tourne autour de 40 000 milliards de dollars. Comment peuvent-ils avec sérieux annoncer une aide équivalente à 0,00005% de leur PIB tout en ayant fait de ce sujet la seule action concrète du sommet ? Nous sommes dans une posture totalement grotesque et il est triste que tant de média ait embrayé cette manœuvre communicante aussi malhonnête qu’intéressée.
Des dirigeants, usés pour partie, et incapables de trouver des solutions aux vrais problèmes de la planète se sont trouvés une cause de circonstance pour remplir le vide de l’agenda. Mais comme ils n’avaient aucune intention de traiter les problèmes (20 millions pour lutter contre des feux de forêt, cela fait un peu court comme programme environnental du G7), Macron a fabriqué de toute pièce une cause : le sauvetage de l’Amazonie, et un méchant : Jair Bolsonaro. Ce faisant, du fait des petites phrases, peu de gens, et surtout pas Anne-Sophie Lapix, ont démonté la gigantesque opération de communication de l’Elysée. En quelques jours, le sauvetage de l’Amazonie est devenu grande cause planétaire.
Même s’il ne faut pas sous-estimer ce qui se passe en Amérique du Sud, Yann Arthus-Bertrand tempère cet incroyable unanimisme en disant qu’il « est trop facile d’accuser le président brésilien Bolsonaro », qui avait raison de dénoncer le caractère colonialiste des déclarations de Macron lors du sommet du G7. Le célèbre photographe souligne que ce sont notre modèle économique et notre mode de consommation qui poussent à la déforestation de l’Amazonie… En outre, assez rapidement, sont apparus des informations selon lesquelles les feux de forêt sont plus importants en Afrique ou en Sibérie. Pire, pour qui lit The Economist, qui avait fait sa une sur l’Amazonie début août (inspirant Macron ?), on constate aussi que le rythme de la déforestation a beaucoup baissé et que l’on reste loin des pires excès passés.
Bref, tout cela n’était qu’une immense opération de communication, destinée à cacher la pauvreté des mesures prises, la lutte contre les inégalités étant tristement logiquement oubliée par ces promoteurs d’une augmentation des inégalités chez eux que sont Trump et Macron de manière assumée, et les autres qui ne font rien contre… Mais le flot de polémiques et de déclarations a permis au président d’échapper à un vrai questionnement, Anne-Sophie Lapix lui laissant dire que le CETA avait des garanties sanitaires alors qu’il va laisser entrer des bœufs cannibales canadiens, ou que l’irréparable n’aurait pas été commis contre les Gilets Jaunes, ce que ceux qui ont perdu un œil ou une main apprécieront…
Ce faisant, notre président de la République se montre un digne successeur de Sarkozy, omniprésent et orchestrant un coup sur l’Iran, tout en défendant oralement des causes qu’il sape par ses politiques… Mais il semble également s’inspirer de son ami Trump en fabriquant hâtivement un ennemi imaginaire pour mieux polariser et simplifier le débat à l’extrême. Il n’y a guère que ses soutiens qui marcheront…