Epilogue mitterrandien pour la crise de famille des Le Pen ?
par Laurent Herblay
mercredi 15 avril 2015
Bien sûr, on ne peut que spéculer sur les motivations réelles des crises qui secouent le parti de la famille Le Pen, mais la conclusion qui se dessine renforce une fois encore la thèse que toute cette chorégraphie est en réalité complètement étudiée, à son plus grand profit.
De la crise familiale à la passation d’héritage
L’histoire qui s’écrit depuis quelques jours est probablement trop idéale pour être honnête. Le président d’honneur du Front National dérape quelques jours après les cantonales et juste avant une affaire. Ainsi, il ne prend pas le risque de mobiliser les électeurs qu’il effraie, tout en assurant un nuage de fumée médiatique suffisamment épais pour faire complètement oublier ce qui est peut-être le Bygmalion du parti familial… Marine Le Pen en profite pour marquer à nouveau sa différence, et ainsi continuer à creuser le sillon de la dédiabolisation, puisque presque tous les média dissertent longuement sur les différences entre père et fille, et donc la relative modération de la seconde.
Mieux, la réponse du père, qui « renonce » à se présenter en PACA, en transmettant la région à sa petite fille, parvient à l’exploit de lui offrir une porte de sortie plus qu’honorable, puisqu’il renonce de lui-même et qu’il adoube celle qui lui succèdera à la tête de son parti dans cette région, sa petite-fille. En renonçant à la région, il pourrait échapper à toute autre sanction, écrivant une conclusion en douceur pour un épisode qui a pourtant fait couler beaucoup d’encre. Marine Le Pen poursuit sa stratégie, qui sort renforcée de ce conflit ouvert avec son père, en marquant sa différence. Et son père ne fait que renoncer à une candidature dont il est tout sauf évident qu’il la souhaitait vraiment, à 86 ans.
Les Le Pen, héritiers de Mitterrand ?
Ce nouvel épisode dans les déchirements de la famille Le Pen en fait les dignes héritiers du manipulateur qui les avait propulsés sur le devant de la scène il y a plus de trente ans. Déjà, le fait que ces conflits ouverts semblent profiter au parti familial devrait pousser à la vigilance. Ne dit-on pas qu’il faut toujours chercher à qui profite le crime ? Le timing trop parfait est une autre raison pour se méfier. Comme par hasard, les dérapages du patriarche n’ont jamais lieu dans la dernière semaine d’une campagne, mais à des moments bien plus neutres politiquement. Et enfin, la scénographie de ces incidents semble trop parfaite pour ne pas donner au moins de doute sur la sincérité des esclandres.
Ce nouvel épisode atteint l’exploit de bien marquer la différence entre le père et la fille, qui n’avait jamais été aussi dure à son égard, tout en lui offrant une porte de sortie plus qu’honorable. Car il est tout sauf certain que sa non candidature, à 86 ans, soit une renonciation. On peut raisonnablement penser que Jean-Marie Le Pen n’avait plus l’envie, ou la force, de faire une telle campagne et il trouve le moyen de présenter cela comme prix payé à sa fille pour avoir dérapé, tout en adoubant sa petite-fille, gardant de la sorte le statut du faiseur de reines de son parti, du moment qu’elles sont de sa famille… Le maintien du père rassure les plus extrêmes et les modérés peuvent croire à la modération de la fille.
Un autre indice amène à douter de la sincérité de ces esclandres trop parfaitement chorégraphiés, c’est le fait que Marine Le Pen trouve le moyen de concilier comme architectes de son programme l’étatiste Florian Philippot et un économiste en chef, Bernard Monot, libertaire.