Et si le FN faisait à l’UMP ce que Syriza a fait au PASOK ?
par Laurent Herblay
samedi 28 février 2015
En Grèce et en Espagne, c’est le PS local qui semble devoir s’effacer dans le cadre de la recomposition du paysage politique. Les similitudes avec la situation française peuvent faire penser que le Parti Socialiste sera la prochaine victime européenne. A moins que ce soit l’UMP ?
La terre tremble à droite
Le premier facteur évident de ce scénario vient du fait que la contestation des partis dits de gouvernement s’incarne en France plus par l’extrême droite que la gauche radicale. Et s’il est vrai que le FN a recruté les classes populaires, en France, elles n’étaient pas l’apanage exclusif de ce qu’on appelle la gauche. On a longtemps souligné que le parti lepéniste a commencé à recruter dans les classes populaires jadis attirées par le gaullisme, quand les dirigeants de ce parti ont trahi nombre d’idéaux, et notamment la souveraineté nationale. Et les scores aux élections présidentielles de 2007 et de 2012 montrent une forte porosité entre l’UMP et le FN, notamment dans l’Est, qui penche à droite.
Le FN ne pourrait-il pas faire à l’UMP ce que Syriza a fait au PASOK et Podemos pourrait faire au PSOE ? Ne faut-il pas voir dans la revendication d’un discours plus à droite, plus musclé de la part d’une partie de l’UMP une convergence vers un discours plus identitaire et sécuritaire, qui la rapproche du FN ? Bien sûr, la crise explique sans doute en partie la progression actuelle du FN, mais il est tout de même frappant de noter que le virage droitier de Nicolas Sarkozy en 2012 n’a en aucun cas freiné la progression du Front National, mais semble au contraire avoir donné à l’extrême-droite une rampe de lancement efficace pour l’amener à de nouveaux sommets, tout en rapprochant les électorats.
Les barrages tombent
Les innombrables limites de Nicolas Sarkozy, entre l’arbitrage scandaleux en faveur de Bernard Tapie et ses conférences payées à prix d’or par des banquiers ou des émirs, est une aubaine pour ses opposants, PS comme FN. En outre, il faut noter que depuis 2012, il semble que le parti lepéniste tempère ses accents parfois gauchistes de la campagne présidentielle, comme on a pu récemment le voir au sujet de la Grèce. Car l’UMP bénéficiait d’une double protection de son électorat : l’Europe et l’économie, puisque sur les questions d’identité et de sécurité, le rapprochement s’opère. Mais la différenciation sur l’Europe n’est pas forcément positive étant donnée son impopularité actuelle.
On peut se demander si l’effacement des accents progressistes de la campagne présidentielle ne vise pas à effacer les lignes de démarcations avec l’UMP pour mieux vampiriser un électorat, qui, s’il est très hostile au PS, mesure les limites de son chef, qui préfère donner des conférences plutôt que gérer les consignes de vote dans le Doubs. Plus grande proximité avec l’UMP, préférence nette pour affronter le PS au second tour en 2017, tout pousse aujourd’hui le FN à viser le parti de l’ancien président. Et on peut se demander si les discrets mais réels ajustements dans son discours ne pourraient pas mettre l’UMP dans une position très inconfortable, surtout si la conjoncture s’améliore un peu.
Tout ceci ne retire rien à ce que je pense du FN. Mais la convergence du PS et de l’UMP ne met-elle pas le second plus en danger que le premier quand l’opposition au système est d’abord incarnée par le FN ? D’autant plus les carences de Hollande ne sont pas plus grandes que celles de Sarkozy…