François Bayrou fait planer le doute sur les coulisses du SarkoShow

par Henry Moreigne
jeudi 8 février 2007

Alors que la première du grand rendez-vous politique de TF1 « J’ai une question à vous poser », diffusée lundi 5 février, a réuni, selon Médiamétrie, 8,24 millions de téléspectateurs, François Bayrou se dit « infiniment choqué » d’apprendre que l’émission a été organisée par une société de production appartenant à Dominique Ambiel, membre de l’UMP, ancien conseiller de Jean-Pierre Raffarin.

Comme souvent dans une pièce de théâtre, il y a la scène et les coulisses. Côté scène, on ne peut objectivement que saluer la performance de la prestation TV de Nicolas Sarkozy, imperturbable, véritable monsieur je-sais-tout. Trop beau pour être vrai ? C’est ce que sous-entend sans ambiguïté François Bayrou, qui lui aussi a des questions à poser.

Le candidat de l’UDF à la présidentielle a réclamé mercredi 7 février des "explications" à TF1, se disant "infiniment choqué" d’apprendre que l’émission de débat consacrée à Nicolas Sarkozy lundi soir avait été notamment organisée par A Prime, une société de production appartenant à Dominique Ambiel. "Je suis infiniment choqué par ce que j’apprends", à savoir "que l’émission est organisée par les amis, les copains, les salariés de l’UMP".

Dans un communiqué, la société a fait savoir qu’elle allait porter plainte contre François Bayrou pour "diffamation publique et injures" après ces accusations "qui portent gravement atteinte à l’honneur et à la considération de la société A Prime Group et du diffuseur", TF1. Trop tard. Celui qui aime à se poser comme le chevalier blanc et à dénoncer l’alliance des trois pouvoirs, médiatique, politique et économique, stratégie qui lui réussit dans les sondages, a réussi son coup. Il a instillé ce qu’aucune déclaration ou communiqué ne pourra enlever : le doute.

La suspicion lui permet également de ne pas s’engager sur sa participation prévue à l’émission prévue le 26 février, en raison officiellement de doutes sur la "déontologie" des conditions d’organisation. Nicolas Sarkozy, il est vrai, a placé la barre très haut pour ceux qui suivront. Vif, percutant, avec du répondant, il est sorti plus que bien d’un exercice qui, sur le papier, se présentait comme périlleux, face à une centaine de téléspectateurs. La machine de guerre UMP pouvait-elle prendre le moindre risque alors qu’elle avait fait de l’émission un moment important de la campagne en conviant par tous moyens, dont SMS, les Français à regarder l’émission ? Le professionnalisme de l’équipe de campagne de l’UMP, la détermination de son président à conquérir le pouvoir permettent d’en douter. Reste à savoir si l’émission a donné lieu à une préparation normale à base de fiches et de briefings ou si, entre le milieu de journée et le direct, les questions ont été éventées.

Deux éléments contribuent à entretenir ces interrogations. Une autre interrogation tout d’abord. Erreur technique ou censure, de nombreux internautes ont constaté que les rediffusions de l’émission le lendemain sur le net (LCI.fr) étaient amputées d’un passage pouvant être considéré comme gênant pour le ministre candidat. Dans cette séquence, le candidat de l’UMP à la présidentielle, interrogé sur l’immigration, se déclarait favorable à "l’immigration choisie" en affirmant : "Personne n’est obligé, je répète, d’habiter en France, mais quand on habite en France, on respecte ses règles, c’est-à-dire qu’on n’est pas polygame, on ne pratique pas l’excision sur ses filles, on n’égorge pas le mouton dans son appartement et on respecte les règles républicaines."

Une dépêche de l’AFP ayant confirmé cette coupure, l’intégralité des images était de retour quelques heures plus tard, TF1 plaidant un "incident technique indépendant de (sa) volonté".

Autre élément de nature à susciter de la perplexité, l’information délivrée par Le Canard enchaîné (toujours lui) selon laquelle Franck Tapiro, un ami-conseiller en communication de Nicolas Sarkozy, PDG de l’agence Hémisphère Droit, aurait participé à la préparation de l’émission. De quoi faire regretter aux publicitaires de l’UMP le slogan selon lequel "Avec Nicolas Sarkozy, tout est possible".

NDLR : Suite à cet article Dominique Ambiel a souhaité publier ce droit de réponse.



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