François Fillon : de Séguin à Bush

par Laurent Herblay
mardi 22 septembre 2015

Dimanche, l’ancien Premier ministre de Nicolas Sarkozy, actuellement troisième de la course aux primaires des Républicains, était l’invité d’Europe 1, où il a développé ses propositions. Mais l’ancien séguiniste continue à se tourner de plus en plus vers les idées des néo-conservateurs étasuniens.

 
Néolibéralisme et interventionnisme
 
Le nom « Les Républicains » avait plus que jamais un sens dimanche matin, tant le discours de François Fillon se rapproche des Républicains d’outre-Atlantique. Sur l’économie, nous avons eu droit au cocktail ultra-libéral et austéritaire : passage de 35 à 39 heures hebdomadaires, passage de l’âge de la retraite à 65 ans. L’ancien Premier ministre suit le courant néolibéral dominant en cherchant à dépasser Nicolas Sarkozy par sa droite économiquement. Il développe un discours où il place l’ancien Président de la République comme trop conservateur et pas assez réformateur, qui aurait bridé les volontés réformatrices de Matignon pendant son mandat. Là où Nicolas Sarkozy semble parier sur les questions de société et l’immigration pour battre Alain Juppé, François Fillon parie sur l’économie.
 
Mais l’ancien Premier ministre a également longuement développé les questions internationales, sans doute le moyen de se donner une crédibilité sur une question où il apparaît en retrait par rapport à ses concurrents qui sont davantage capés sur la question. Pour lui, « la priorité, c’est d’éliminer le totalitarisme islamique  ». Il a aussi estimé qu’il « fallait s’appuyer sur la Russie mais aussi reprendre le dialogue avec le régime syrien  ». Même s’il a souligné avec raison que les interventions occidentales peuvent sans doute finir par être contre-productives, et qu’il faudrait que les pays de la région soient en première ligne, comment ne pas voir qu’une alliance avec la Russie et les chiites pour faire tomber les extrémistes sunnites est un pari sans filet ? Car le précédent Libyen démontre les limites de ces raisonnements.
 
Des moutons au bord d’un précipice
 
Il y a quelque chose d’effarant à voir des politiques persister à ce point dans des directions qui ont pourtant montré leur nocivité depuis des années. Cela est vrai pour les interventions au Moyen-Orient ou en Afrique, qui, à l’exception du Mali peut-être, ont mal finies, au point que l’on peut même se demander si les morts qui ont éventuellement été évités temporairement, ne sont pas largement dépassés par les morts provoqués par des interventions mal conçues et souvent arbitraires. Et l’on peut se demander si les opérations occidentales ne contribuent pas à renforcer le camp des terroristes en poussant une partie de la population à les soutenir, placés entre la peste islamistes et le choléra venu de l’étranger. Pourtant, François Fillon ne semble pas tirer la moindre leçon des interventions des 15 dernières années.
 
Et que dire de son discours économique néolibéral-austéritaire. Certes, il surfe sur les vents du moment, qui ont même poussé un gouvernement théoriquement de gauche radicale a accepté une potion thatchérienne en Grèce. Mais comment croire une seconde que davantage d’austérité et de recul des droits sociaux aurait un quelconque effet positif pour le pays ? Ce sont ces politiques qui ont replongé le continent européen dans une crise économique. Et la quête de compétitivité est totalement suicidaire alors qu’à quelques milliers de kilomètre, le prix du travail est cinq fois plus bas. Mais cette erreur est tout autant celle de l’actuelle majorité, François Fillon ne tenant pas un discours très différent de celui du ministre de l’économie actuel, Emmanuel Macron, Hollande réalisant une synthèse façon grand écart.
 

L’ancien Premier ministre a réussi à trouver un positionnement politique, surfant sur l’air du temps tout en réussissant à se démarquer du président sortant sans non plus trop s’éloigner de sa famille politique. Mais, encore une fois, difficile de ne pas y voir qu’un positionnement, sans véritable réflexion.

 


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