François Hollande classe sans suite l’affaire Clearstream
par LM
vendredi 22 décembre 2006
Premier secrétaire du Parti socialiste et concubin de madame Royal, François Hollande dépose le bilan de son année 2006 dans les Inrockuptibles cette semaine, en « refaisant » Clearstream comme d’autres refont le match.
En cette période de bûche et de vœux, de rétrospective et d’espoir, le numéro « Best of 2006 » des Inrockuptibles, avec en couverture le peinturluré et inchantable Philippe Katerine, ne faillit pas à la règle, et propose à quelques acteurs du cru 2006 de revenir sur leur année. Christine Angot, Joey Starr et Laetitia Casta, ou encore Christophe la tortue de la Nouvelle Star se prêtent au jeu. Mais le plus spectaculaire d’entre tous est incontestablement François Hollande. « Flanby » comme l’ont surnommé les Guignols, dresse sur deux pages son constat de l’année écoulée. Rien jusqu’ici de très sismique, six paragraphes où il dit rien, ou du banal, enfin en apparence. Si on se rapproche, et si on lit les propos du successeur de Jospin, on a de quoi bondir.
Sur les scandales, on peut lire : « 2006 fut aussi l’année du retour des scandales, des affaires, des révélations, avec leurs gorges profondes, leurs corbeaux, leurs faussaires. Des généraux supposés garder des secrets qu’ils retracent, comme des moines copistes, dans les cahiers à spirale ; des industriels, spécialistes de géopolitique, qui se vengent de l’ingratitude de leurs patrons en dénonçant leurs rivaux par la manipulation de feux listings ; des informaticiens sans scrupule qui trompent des journalistes sans méfiance, lesquels font tomber dans des pièges des juges sans défense ; et je n’oublie pas les ministres qui utilisent les acteurs précédents à des fins de déstabilisation d’un ou plusieurs de leurs collègues du même gouvernement à côté de qui ils siégeaient pourtant, comme si de rien n’était, chaque mercredi autour de la même table pour régler, paraît-il, les grandes affaires de l’Etat. »
Denis Robert, journaliste "sans méfiance", mis en examen dans l’affaire Clearstream, pour « recel de faux et abus de confiance », appréciera. Le juge Van Ruymbeke, « sans défense » appréciera de même. Le temps d’apprécier cet aller, ils dégusteront ce retour. Même page, paragraphe suivant, consacré aux « Règlements de compte » :
« De cette affaire Clearstream, les Français n’auront sans doute rien compris. Blanchiment d’argent sale ? Conflits de personnes au sein d’une grande entreprise européenne (EADS) ? Ou machination politique ? Mais y avait-il quelque chose à comprendre autre que le dérèglement des mœurs, des usages, des pratiques ? « Clearstream » n’est un scandale que parce qu’a été mis à jour le climat de haine dans lequel vivent les protagonistes d’un régime finissant. Quand il n’y a plus au sein d’une famille politique ni débat d’idées ni choix démocratique du successeur légitime, c’est le règlement de comptes qui fait office de sélection. Ce n’est plus le meilleur qui gagne, mais le survivant. »
En deux paragraphes secs, François Hollande, rouage essentiel de la machine à gagner royaliste, a réussi à exécuter tout le travail de Denis Robert. En même temps qu’il assène une terrible vérité : Clearstream n’est effectivement devenu un scandale qu’à compter du jour où les politiques s’y sont trouvés mêlés. Et c’est bien là le problème. C’est bien là le scandale, et Hollande aurait été bien inspiré justement de continuer dans ce sens-là, en ajoutant que Clearstream, la lessiveuse luxembourgeoise radiographiée par Denis Robert, était en soi un gigantesque scandale, représentait en soi un trou noir de la finance dont l’existence même au cœur de l’Europe est inadmissible. Et François Hollande et ses amis socialistes auraient été bien inspirés d’évoquer cette affaire-là, qui n’est pas « de mœurs », dans leurs meetings, et de se faire plus entendre que maintenant pour soutenir par exemple Denis Robert, pas si naïf que le premier secrétaire du PS le laisse entendre.
Mis en examen, soutenu par quelques-uns, le journaliste qui s’est fatigué bien des yeux à examiner les listings et à comprendre comment la dissimulation était effectuée à l’échelle mondiale, sera sans doute dépité d’apprendre que le patron d’un des deux plus grands partis de France laisse entendre d’une part que les Français n’ont « rien compris » à tout cela, et que d’autre part, il n’y avait peut-être... rien à comprendre. Rien en tout cas de bien nouveau que la politique et ses mesquineries.
Les chambres de compensation, les comptes dissimulés, l’argent qui disparaît, le chef d’un des deux plus importants partis de France laisse cela aux journalistes « sans méfiance » et aux juges « sans défense ». Clearstream ? Affaire classée.