Hollande coupe l’arbre Montebourg, qui cachait la forêt Macron

par Laurent Herblay
mercredi 27 août 2014

Mardi a été nommé le nouveau gouvernement avec départ d’Arnaud Montebourg, Benoît Hamon et Aurélie Filipetti. Le candidat pour qui la finance était une ennemie nomme un banquier d’affaire à Bercy. Il assume toujours davantage le cap eurolibéral défendu depuis le début d’année.

La fin du grand écart économique
 
François Hollande était assez difficile à suivre sur les questions économiques. Pendant la campagne présidentielle, il faisait de la finance son ennemie, quelques jours avant d’aller à Londres pour rassurer le monde financier dans le Guardian, comme si l’information ne pouvait pas traverser la Manche. Arrivé au pouvoir, il nomme Pierre Moscovici à Bercy, en duo avec Arnaud Montebourg à l’Industrie, un couple de contradictions entre un représentant de l’aile la plus droitière du PS et de son aile gauche. Néanmoins, la ligne suivie par le gouvernement penchait déjà largement vers le premier, qui défendait les banques contre les timides projets européens de taxe sur les transactions financières, d’autant plus qu’Emmanuel Macron, à l’Elysée, appuyait déjà un cap économique plutôt libéral.
 
En début d’année, le président va plus loin dans un discours libéral avec sa priorité donnée à la compétitivité et à la baisse du prix du travail. Mais c’est Arnaud Montebourg qui remplace paradoxalement Pierre Moscovici à Bercy, même si la nomination de Laurence Boone pour remplacer Emmanuel Macron soutient le camp droitier au sein de la majorité. Le nouveau gouvernement clarifie la situation avec le départ d’Arnaud Montebourg et l’arrivée de l’ancien conseiller du président à Bercy. Désormais, l’aile droite du PS dispose de tous les leviers économiques, de Bercy à l’Elysée, en passant par l’Assemblée. La ligne est désormais claire alors même, paradoxalement, qu’elle est en échec. François Hollande a décidé de ne plus garder un fer alternatif au feu pour donner le change vis-à-vis de son aile gauche.
 
Confirmation du cap delorien

Le président a tardé à trancher. La majorité est affaiblie par l’éviction de son aile gauche, ce qui pourrait mettre en péril sa situation à l’Assemblée. En outre, cela s’ajoute à une impopularité très forte, qui prend sa source dans une situation économique toujours mauvaise et le sentiment justifié que l’équipe au pouvoir n’est pas à la hauteur. En outre, le cap eurolibéral, davantage assumé depuis le début d’année, qui fait de la compétitivité l’alpha et l’omega du gouvernement, au point de chercher 50 milliards d’économies budgétaires pour en rétrocéder 40 aux entreprises pour baisser le prix du travail, n’est pas parvenue à convaincre de son bien-fondé, notamment auprès de l’électorat traditionnel de la gauche, qui a déserté en masse pour voter Front National, comme on a pu le voir lors des élections européennes.

Malgré tout, même si ce cap est une erreur, cette crise peut être positive pour l’exécutif. D’abord, elle semble indiquer qu’il y a un capitaine dans le bateau, avec la sanction des ministres qui prenaient bien des libertés avec la solidarité gouvernementale. Mieux, ce remaniement est cohérent avec la ligne assumée et défendue depuis janvier. En un sens, il pourrait représenter l’achèvement de la mue de François Hollande, qui assume de plus en plus clairement son héritage delorien. Cette ligne transforme le paysage politique. En se rapprochant du centre, le PS réduit l’espace politique de l’UMP et semble faire le pari que le second tour de 2017 verra son champion affronter Marine Le Pen au second tour.
 
La présence d’Arnaud Montebourg au gouvernement était sans doute une aussi grosse arnaque que le plan de General Electric pour dépecer Alstom, qu’il a accepté. Il n’était qu’une caution verbeuse de l’aile gauche de son parti. François Hollande a choisi la clarté. Pas sûr que ce soit pour le meilleur…

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