Hollande et la « déchéance de crédibilité »

par Fergus
mardi 5 janvier 2016

Le chômage reste au plus haut. Le pouvoir d’achat est en berne. Les menaces terroristes perdurent. Dans un contexte aussi déprimant, la Présidence n’a rien trouvé de mieux pour enfumer les Français que la « déchéance de nationalité pour les auteurs d’actes terroristes »...

Certes, cette mesure est, si l’on en croit les sondages, plébiscitée par nos compatriotes. En l’occurrence, les Français laissent leur légitime émotion, née des attentats du 13 novembre, prendre le pas sur leur raison. Car il ne faut pas se leurrer : la « déchéance de nationalité » relève avant tout du symbole. Cette disposition ne sera d’ailleurs juridiquement applicable – si elle est un jour gravée dans la Constitution – qu’à l’encontre de quelques individus à leur sortie de prison dans plusieurs décennies !

Qui plus est, il est probable que Hollande se contrefiche de la « déchéance de nationalité ». En pratiquant cette démarche de triangulation consistant à faire sienne une proposition emblématique des caciques de LR, notre Mitterrand au petit pied cherche avant tout à obtenir de la droite un vote massif d’adhésion à la réforme constitutionnelle qu’il entend soumettre dans quelques semaines aux parlementaires réunis en Congrès à Versailles. Quitte à faire grincer des dents les députés et sénateurs LR piégés par la manœuvre. Quitte à faire également grincer les dents de leurs collègues PS, obligés une fois de plus de chausser leurs godillots et de manger leur chapeau !

Quant à Hollande, peut lui chaut que la « déchéance de nationalité » se révèle d’une totale inefficacité dans l’avenir pour contrer les désirs de djihad d’une minorité de jeunes musulmans déboussolés et manipulés. Comme peut lui chaut que cette mesure soit, le cas échéant, porteuse d’un danger identitaire pour ce qu’est actuellement la France, ce pays qui s’enorgueillit – à juste titre – d’être à l’origine de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme et du Citoyen. 

Entre son discours enflammé du Bourget et sa brillante tirade anaphorique lors du débat qui l’a opposé à Sarkozy, François Hollande a beaucoup promis. Mais si peu tenu sur les principaux dossiers ! Ceux-là même – emploi, pouvoir d’achat, droits sociaux – où ceux qui l’ont porté au pouvoir attendaient de sa part une action énergique « de gauche » en rupture avec les dérives du quinquennat de Sarkozy.

C’était évidemment compter sans les convictions foncièrement libérales d’un homme dont le socialisme affiché s’est très vite fondu dans une social-démocratie infiniment plus proche des intérêts du grand patronat et des puissances financières que de ceux des classes populaires. En agissant comme il l’a fait, particulièrement après le virage libéral pleinement assumé de janvier 2013, Hollande a trahi non seulement ces classes populaires, mais aussi une large part des classes moyennes. Ce faisant, il a amplement contribué à pousser toujours plus haut le vote Front National.

Mais de tout cela, Hollande n’a cure, il n’a qu’un objectif en tête : sa réélection en 2017. Et cela passe nettement moins par le courage politique mis au service des Français que par des options stratégiques et tactiques de nature politicienne. Mais ne lui en déplaise, c’est moins la « déchéance de nationalité » qui est à l’ordre du jour que la « déchéance de crédibilité  ». En l’occurrence, la sienne. Puisse la présidentielle de 2017 se dérouler sans Hollande ni Sarkozy : les Français valent mieux que ces deux graves erreurs de casting politique !


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